Navet Confit faisait paraître son 7e album intitulé LOL vendredi dernier. J’ai eu la chance de m’entretenir avec Jean-Philippe Fréchette, l’homme à tout faire derrière l’absurde pseudonyme, pour parler de punk, de l’art de faire des spectacles spontanés, du plaisir de collaborer et de gingembre!
Pour la première fois, on ne retrouve pas la mention « LP » dans ton titre. Était-ce voulu?
Navet Confit: C’était le titre de travail, mais quand j’avais fini ça ne me tentait plus. Je m’étais mis des restrictions: avoir tel type de graphisme, tel type de sonorité puis que les albums soient numérotés. Cet album-là c’est un peu l’idée de faire table rase.
La pochette de l’album est assez différente de ce que tu as choisi auparavant…
NC: Pour vrai? (rires) Celle-là c’est moi qui l’ai fait.
C’est la première fois que tu conçois la pochette seul?
NC: Oui, j’ai appris Photoshop avec cette pochette-là. Je trouve ça drôle. Faut comprendre ici que je ne trouve pas ça beau et que ce n’était pas ça le but.
(rires) En même temps, ça va bien avec le titre LOL…
NC: Tout ça va dans le même sens. C’est une démarche à plusieurs têtes: la pochette, la musique, les relations de presse et l’imagerie qui va avec la promo. (ndlr voir les capsules de présentation des chansons sur youtube)
Comment l’enregistrement de l’album s’est-il déroulé?
NC: J’ai pas mal toujours été en campagne ou dans le bois pour faire ça. En une semaine on a enregistré toute la musique chez Pilou (Peter Henry Phillips) C’est un studio dans le bois en Estrie et c’est vraiment merveilleux. Tu es tranquille, tu travailles à ton rythme. Après j’ai fini ça tout seul pour faire les voix. Le trippe d’avoir enregistré ça en band ça s’entend aussi . On a enregistré « live », sans clique, en power-trio, assis ensemble à avoir du fun.
Ce qui est différent de la trilogie sortie en 2013…
NC: Il y avait des collabos surtout sur LP4, sinon j’ai beaucoup joué seul, le drum, la basse et la guitare.
Est-ce que les trois disques avaient été enregistrés en ordre?
NC: Non ça c’était un gros bordel. Je n’avais plus de label et je continuais à accumuler des maquettes, mais je ne sortais rien. C’est pour ça que j’ai tout sorti en même temps.
Là tu as une maison de disque (La Meute) pour t’appuyer…
NC: C’est ça… puis avant de sortir les 3 albums en même temps, j’avais tout ça et je ne savais pas quoi faire avec, mais je ne voulais pas nécessairement sortir ça DIY parce que l’énergie manquait. Aussi, c’est bien d’avoir l’endossement d’un label qui te fait confiance et qui sort tes affaires.
Pour les spectacles de lancement, comment ça se passe?
NC: On fait un show complet en trio; pas juste 3 chansons. De toute façon quand on commence à jouer ensemble, on n’est pas arrêtable. Les tounes étaient déjà montées (avant le premier show au FME il y a deux semaines) puisqu’elles ont été enregistrées live. Ce n’est pas comme remonter quelque chose construit en studio avec plein de programmation. Le passage à la scène est donc plutôt simple. En plus, le répertoire est vaste maintenant (7 albums et plusieurs EP) c’est le fun d’aller se promener dedans.
Est-ce que le « setlist » change entre les shows?
NC: Il y a un noyau central, mais je ne suis pas « stiff« sur les « setlists« . J’aime la spontanéité. C’est plate d’aller voir deux fois le même artiste et d’entendre les mêmes commentaires entre les mêmes deux tounes. Tant qu’à ça, tu regardes le DVD ou tu écoutes l’album. Un spectacle c’est un art vivant et il faut se mettre en danger.
Tu enregistres beaucoup de matériel. Est-ce qu’il en est resté qui ne cadraient pas sur LOL?
NC: Oui quelques-unes… J’avais des chansons plus relaxes qui ne « fittaient » pas dans le cadre vraiment « punché » de LOL, le collage de tounes de 1 minute. Je ne voulais donc pas de chansons de 6 minutes psychédéliques planantes sur l’album.
En même temps, il y a Mannequin de magasin qui vient 3 fois changer le rythme de l’album en apparaissant après 2-3 tounes plus punk…
NC: Ça permet de reprendre une respiration, de repartir un cycle… comme le gingembre quand tu manges des sushis. (rires) C’est rassurant puis après tu es prêt pour goûter d’autres saveurs.
En même temps les petites tounes aussi je trouve qu’elles font du bien à travers le flot d’informations quoridien . C’est comme le collage de la pochette. C’est trippant, mais c’est aussi un peu un exercice de style. Je n’écoute pas de punk dans la vie. J’avais le goût de mettre ça à « broil » pour cet album-là; de faire quelque chose de plus radical.
Il y a trois chansons de Carl-Éric Hudon sur l’album (Plumes et goudron, La jeune fille qui ignorait qu’elle était un fantôme et Un jour elle changera) . Comment ça s’est présenté?
NC: C’est moi qui lui ai demandé, on se connait depuis longtemps. On a déjà eu un projet commun où on reprenait les tounes de nos répertoires avec des invités (Émilie Proulx, Benoit Fréchette, Lydia Champagne entre autres). Une fois on a monté un show grunge en trio et on avait fait des chansons que Carl-Éric n’avait jamais endisquées. En ce moment elles ne cadraient pas sur ses projets alors je lui ai demandé de me les prêter parce qu’elles « fittaient » super bien dans le style plus grunge du disque! On les jouait déjà, mais c’est lui qui les chantait avant.
Ça sonne vraiment comme ton matériel…
NC: C’est ça le fun d’interpréter et c’est là que tu vois si la job de donner une teinte à l’oeuvre a été bien fait. En interprétation, même dans des trucs comme la Voix, si l’interprète arrive à faire oublier l’auteur derrière et qu’on a l’impression que c’est ses tounes, on sait qu’il a mis le doigt sur quelque chose.
Une question un peu difficile. Est-ce qu’il y a sur l’album une toune pour laquelle tu es particulièrement content?
NC: J’aime le côté chimique de La jeune fille qui ignorait qu’elle était un fantôme. C’est proche d’un style que j’écoute beaucoup; shoegaze assez weird, très texturé, un peu surnaturel.
Avant, en composition, j’y allais en empilade; beaucoup de couches d’instruments. Avec Pilou, la prise de son était plus élaborée, avec plusieurs micros installés à différentes distances, ça donne de quoi de plus large. La guitare prend plus de place et il y a moins de bébelles qu’on ne pourrait pas faire en show. Des fois ça devenait un peu schizophrénique avec toutes ces tracks. Pour Lol, c’était vraiment l’idée du power trio avec au final une couple « d’arrangeage » avec le gars des vues. J’ai fait de la prise de son et de la réalisation pour d’autres band, mais là avec Pilou j’ai pu me concentrer sur l’aspect artistique sans penser aux côtés techniques. Pour la réalisation, j’avais de toute façon une idée bien précise de ce que je voulais pour ce disque-là.
Tu t’enlignes pour un automne chargé?
NC: Oui, on a des shows jusqu’au mois de novembre, même si ce n’est pas intensif. Puis je travaille sur 2-3 shows de théâtre et je finis un court métrage comme compositeur. C’est vraiment l’fun tout ça parce que ça nourrit et je ne fais pas tout le temps la même affaire donc je n’en viens pas à détester ma job!
Navet Confit est en spectacle de lancement le mercredi 23 septembre à La Vitrola à Montréal, puis le lendemain, 24 septembre, au Tam Tam Café à Québec sur le boulevard Langelier. Pour plus de détails, voir le site officiel.