Disques 7e ciel
Sortie : 5 février 2016
Réalisation : Koriass et Philippe Brault
En 2002, le collectif 83 interrompait le gala de l’ADISQ pour revendiquer une place à la scène rap dans les médias. Presque 15 ans plus tard, le rap queb semble être en pleine ébullition et l’on dirait que ça a évolué à la puissance V dans les dernières années. Si Alaclair Ensemble et Dead Obies ont éclaté les barrières, Koriass en est ressorti comme l’une des figures de proue, représentant à la fois le rap songé et la nouvelle vague.
Avec Love Suprême, Koriass se met la barre haute. Un titre inspiré du classique de John Coltrane et une référence au « Love is all you need » de Lennon. Se mettre la barre haute, c’est un peu le propre du rap, tout le monde veut se prouver comme étant le roi. Kanye s’est comparé à Jésus dans le passé.
N’empêche, dans Love suprême, ce n’est pas seulement une attitude, mais un thème clé. Koriass narcissique ? Oui et non. Le fil conducteur de l’album est l’amour, mais en parallèle, toutes ses contradictions. L’amour de l’autre versus l’amour de soi. Meilleur que tout le monde, mais sensible et nuancé à la fois. Il y a un début, un milieu et une fin à cet album, l’amour progresse comme une quête de vérité. En ce sens, les deux premiers titres Leader et Légendaire sont tellement égocentriques que c’est un peu lourd.
« Arrête de fronter comme si j’avais pas l’album de l’année / Arrête de fronter, sors ton carnet je vais te l’autographier ». – Légendaire
Mais rapidement, on comprend l’ironie. Nul autre que Gilbert Sicotte nous le rappelle dans quelques interludes-sermons, tel un père pas fier de son fils.
« Regarde ce que t’es devenu, t’es une parodie de toi-même » – Hate suprême # 3
On ne peut passer sous silences les références politiques, notamment dans Nulle part où le rappeur cite Pierre Falardeau, se compare à Victor-Lévy Beaulieu et crache un « fuck la reine ». Je mettrais un 20 $ que Guy A. Lepage va lui demander son avis sur le PQ, ce dimanche à Tout le monde en parle.
S’en suit une série de chansons particulièrement intéressantes, avec une poésie subtile, loin des clichés, dont Ouvre ta fenêtre, où Koriass aborde pauvreté et famille à travers la routine de vie de quartier.
« Un bum qui fouille dans mes vidanges comme si y’allait trouver un kilo d’or/ Les kids dehors qui réveillent ma fille qui dort/ Un whip qui passe bump un track de Kendrick Lamar. » – Ouvre ta fenêtre
Belle surprise dans Jolies Filles, chanson sensuelle où Lary Kidd (de Loud Lary Ajust) sort clairement de sa zone de confort. Une de mes chansons favorites, pas pour les textes, mais pour le flow et ce même si Lary fausse (un tout petit peu) dans le refrain. De son côté, Loud participe à Pardon.
L’album se termine par Rien d’autre, qui se veut un début de réponse aux grandes questions posées au fil du disque. La gloire comme la plus forte des drogues, la vie comme un combat et l’amour pour survivre.
Depuis 83, on a fait un sacré bout de chemin. J’ai hâte au nouveau Dead Obies.
Lancement à Québec le 5 février
Lancement à Montréal le 6 février