ecoutedonc.ca

ecoutedonc.ca

archives
  • Accueil
  • Site original
  • [SPECTACLE] Perdrix + Garnotte (+Digit: Missile Command), Le Magog, 18 mai 2017

    [SPECTACLE] Perdrix + Garnotte (+Digit: Missile Command), Le Magog, 18 mai 2017

    Nous nous sommes rendus au bar Le Magog jeudi dernier pour assister à l’illustre rock tour des groupes montréalais Perdrix et Garnotte, dont le deuxième arrêt de leur tournée québécoise se faisait à Sherbrooke. Ce fut une soirée haute en couleur qui terminait parfaitement la journée nationale du Bloody Caesar.

    Photo: Erika Essertaize

    En guise de première partie, on a eu droit à un DJ set complètement déjanté, gracieuseté de Digit: Missile Command. L’artiste montréalais, un véritable showman, était en feu et enchaînait les beats de manière effrénée, tout en rappant dans le micro et en dansant comme s’il n’y avait pas de lendemain (d’ailleurs, il faut s’excuser pour l’unique photo un peu stagée que nous avons de lui, il était flou sur toutes les autres!). Nous avions vu le maestro opérer il y a quelques mois en première partie de Lesbo Vrouven à la Petite Boîte Noire, et il n’y a pas à dire, Digit: Missile Command est fidèle à lui-même à chaque performance : énergique, ludique, charismatique, absurde et 100 % efficace. Vivement son retour en sol estrien.

    Photo : Zachary Leblanc-Lavigne

    Par la suite, c’était au tour de Perdrix à monter sur la scène (complètement bizarre, mais caractéristique) du Magog, qu’ils occupèrent franchement bien. Les sœurs Harel-Michon forment un duo redoutable en prêtant leurs voix aux compositions indie du groupe, compositions vraiment solides qui méritent d’être écoutées et réécoutées. Outre l’amitié évidente des musiciens, la grande force du groupe réside dans sa personnalité, singulière et magnétique. C’était avec les yeux rivés sur les musiciens qu’on pouvait réellement voir le plaisir qu’ils avaient à donner un bon show.

    Photo: Zachary Leblanc-Lavigne

    Leur musique, tantôt rock, tantôt funk, pouvait être douce pendant un petit bout, puis exploser sans préavis, ce qui rendait les chansons excitantes. Et c’est à l’image de l’arme secrète de Perdrix : les paroles. Francophones, intelligentes, drôles et parfois acerbes, les paroles de Perdrix sont résolument excitantes (même que leur prestation contenait une « apogée sexu » incroyable) et modernes. Un groupe à surveiller… et l’une des nos plus belles découvertes à Sherbrooke cette année.

    Pour finir, c’est le groupe Garnotte, également francophone, qui a fait son apparition sur scène. Les musiciens étaient solides et favorisaient souvent les passages instrumentaux aux refrains chantés.

    Photo: Zachary Leblanc-Lavigne

    Les compositions comprenaient plusieurs détours prog-rock dans lesquels les solos de guitare prédominaient. Les sonorités aériennes des claviers étaient superbes; les solos d’orgue Hammond l’étaient encore plus. C’est durant cette performance que les spectateurs du Magog purent entendre sans doute la meilleure/pire blague de la soirée, lancée par le chanteur et guitariste David Bourbonnais : « Qu’est-ce qui donne le goût au Pepsi? Le s, sinon ça goûterait le pepi! » (pas le clou du spectacle, mais moi, je l’ai trouvée drôle!). Le groupe termina la soirée avec sans doute la chanson la plus blues de leur répertoire, et je dois admettre que le style leur allait étonnamment bien.

    Au final, ce fut une excellente soirée, et nous nous sommes beaucoup amusés. Surveillez les dates du rock tour : si les groupes passent par chez vous, on vous recommande chaudement d’aller les voir!

    Thierry Larose

    25 mai 2017
    Région : Estrie, Spectacles
    Digit: Missile Command, Estrie, Garnotte, Le Magog, Perdrix, Sherbrooke
  • [SPECTACLE] Fiche le roi + Nullius In Verba, La Petite Boîte Noire, 12 mai 2017

    [SPECTACLE] Fiche le roi + Nullius In Verba, La Petite Boîte Noire, 12 mai 2017

    Vendredi dernier, c’était une soirée 100 % Sherbrooke qui était au programme à la Petite Boîte Noire. Deux groupes locaux, les excellents Fiche le roi et Nullius In Verba, se produisaient en spectacle au grand plaisir de leur home crowd, qui remplissait assez bien la salle ce soir-là.

    Photo : Zachary Leblanc-Lavigne

    La soirée a débuté avec Fiche le roi, dont les compositions ont ensorcelé le public dès les premières notes. Composé de Yohann Francoz (basse, guitare et voix aiguë), Philippe Gagné (guitare, voix moins aiguë), Jean-Sébastien Lavoie (clavier) et David Letendre (batterie), le groupe semblait avoir un penchant pour les ambiances et textures éthérées, limite zen, qui seyaient parfaitement à leurs chansons. Toutes dotées d’un petit côté progressif, ces chansons étaient sérieusement bien construites et mariaient convention et imprévisibilité. Il pouvait y avoir une passe étrange ici et là, mais celle-ci était répétée quatre fois pour qu’on puisse bien la saisir. Pop-prog? À vous de voir.

    Loin de moi l’intention de diminuer l’aspect complexe des chansons de Fiche le roi : j’ai adoré la subtile accessibilité qu’ont insufflée les musiciens dans leurs chansons, qui n’en restaient pas moins bien ficelées. Et bravo pour les paroles en français! Les thèmes existentiels allaient de pair avec la musique… Serge Fiori serait fier.

    Photo : Zachary Leblanc-Lavigne

    Le groupe avait sorti leur premier simple, Liste de souhaits, sur Bandcamp la veille du spectacle, et c’était assurément l’une des meilleures qu’ils ont jouées ce soir-là. Le jeu de guitare était superbe; on sentait les musiciens dans leur élément. Tous les meilleurs éléments de la musique de Fiche le roi se sont retrouvés dans cette performance : l’originalité, la douceur, les harmonies non conventionnelles, les paroles recherchées… bref, vraiment une chanson à découvrir, puis à écouter en boucle. On en veut plus. Longue vie au roi!

    C’était ensuite au tour des frères et sœurs du groupe Nullius In Verba à entrer sur scène. Les deux grands frères, Charles et Remy Bergeron, jouaient de la guitare et de la basse, pendant que Mariana volait le show derrière sa batterie. Son énergie et sa joie compensaient grandement pour la timidité de ses deux frères.

    photo : Zachary Leblanc-Lavigne

    Nullius In Verba, c’est un jam band qui emprunte autant aux Grateful Dead qu’à Pink Floyd et qui n’a pas peur d’étirer les grooves afin de bien installer leur caractéristique vibe ésotérico-funk (oui, je viens d’inventer le terme, et oui, ça sonne exactement comme ça). Le groupe semblait avoir une curieuse façon de créer : au lieu d’écrire une chanson puis la déformer en jam psychédélique, le groupe optait pour un procédé qui semblait être plus intuitif. En effet, les chansons semblaient naître au milieu des jams improvisés, avec des paroles surréalistes chantées par Charles.

    Photo : Zachary Leblanc-Lavigne

    La musique se voulait hypnotique, alors l’apparition périodique de fumée sur la scène de la Petite Boîte Noire était d’adon. Mais le moment le plus enivrant de la prestation a été lorsque Mariana est venue à l’avant de la scène et a chanté doucement sur fond de jeu délirant de guitare et de basse. Les musiciens semblaient être en parfaite symbiose, communiquant sans doute par télépathie sans que nous puissions nous en rendre compte. Puis les tambours et cymbales ont fait leur retour, et les têtes des spectateurs se sont remises à hocher doucement au rythme des jams endiablés de Nullius In Verba.

    Thierry Larose

    18 mai 2017
    Région : Estrie, Spectacles
    Estrie, Fiche le roi, La Petite Boîte Noire, Nullius In Verba, Sherbrooke
  • [SPECTACLE] We Are Monroe (+Krief), La Petite Boîte Noire, 5 mai 2017

    [SPECTACLE] We Are Monroe (+Krief), La Petite Boîte Noire, 5 mai 2017

    Vendredi dernier, Sherbrooke a reçu deux très bons groupes dans sa Petite Boîte Noire bien-aimée, soit le groupe montréalais We Are Monroe et l’auteur-compositeur-interprète Krief (accompagné de ses musiciens). Bien qu’ayant chacun leurs forces, les deux groupes partageaient un petit côté indie qui semblait plaire aux chanceux qui étaient présents ce soir-là. Décidément, on allait avoir droit à des prestations électrisantes et chargées.

    La soirée débuta avec Krief (Patrick de son prénom), qui se produisait en formule band. Et quel band! Outre Krief qui chantait en jouant de la guitare, on avait un guitariste au whammy endiablé, un bassiste bien présent, un batteur efficace et un claviériste qui assurait les nuances plus aériennes tout en jouant du tambourin. Les musiciens étaient tous bien entassés sur la petite scène, entourés de milles amplis et pédales… une image digne d’un groupe qui aurait assurément eu best new music sur Pitchfork, circa 2009. La musique de Krief était douce-amère et se caractérisait par son mélange de poésie et d’explosions de guitares. D’ailleurs, vers la fin, les chansons se désintégraient souvent en jam, ce qui permit à Krief de nous montrer ses talents de guitar-shredding. Mention spéciale à son tone de guitare, sans doute l’un des meilleurs que j’aie entendus à la Petite Boîte Noire.

    C’était maintenant au tour de We Are Monroe d’entrer sur scène et de nous prouver qu’ils étaient un quatuor digne des nombreuses comparaisons qu’ils ont eues avec des groupes tels Joy Division ou bien The Killers. Ces comparaisons sont faciles à faire, mais pas tout à fait représentatives du son bien caractéristique que s’est forgé le groupe. On retrouve bel et bien des éléments post-punk et new wave dans les chansons de We Are Monroe, mais ces chansons semblent aussi être influencées par le dance-punk et le power-pop, un mélange de styles efficace et dansant à souhait.

    Comme sa première partie, le groupe a surtout joué des chansons de leur nouvel album. Et comme sa première partie, l’un des musiciens avait un tone exceptionnel (mention spéciale au tone de basse, sans doute l’un des plus monstrueux que j’aie entendus à la Petite Boîte Noire!), ce qui n’a pas nui à l’immensité des refrains de We Are Monroe. C’est pas compliqué, ils sont un power band. Les chansons étaient efficaces, et la voix puissante du chanteur n’avait rien à envier à tous les Brandon Flowers de ce monde. Krief nous avait d’ailleurs prévenu : « Le prochain groupe, j’ai travaillé sur leur nouvel album, pis ça va être vraiment bon! »

     

    Thierry Larose

    10 mai 2017
    Région : Estrie, Spectacles
    Estrie, Krief, La Petite Boîte Noire, Sherbrooke, We Are Monroe
  • [SPECTACLE] Lary Kidd (+ DJ OliHood), La Petite Boîte Noire, 29 avril 2017

    [SPECTACLE] Lary Kidd (+ DJ OliHood), La Petite Boîte Noire, 29 avril 2017

    C’était un Lary Kidd énergique qui nous demandait de « faire du fucking noise » vendredi dernier à la Petite Boîte Noire de Sherbrooke… et sa requête ne se fît pas ignorer. Membre fondateur du groupe Loud Lary Adjust, notre patnais Lary Kidd se produisait ce soir-là en formule solo (accompagné seulement d’un DJ) dans le but de promouvoir son premier album, Contrôle, qui paraîtra prochainement. Il y a environ huit mois, Loud Lary Adjust annonçaient qu’ils se retiraient de la scène pour une durée indéterminée afin de pouvoir se concentrer sur leurs projets respectifs. Les gars n’ont pas chômé : Lary n’a même pas encore sorti d’album qu’il se produit déjà dans les salles du Québec, et Loud vient tout juste de sortir son premier EP, New Phone.

    Hypothèse : il y a une certaine compétition entre les membres de LLA, et c’est le premier qui se taillera une place dans le monde du rap queb qui en sortira vainqueur. Totalement plausible.

    La soirée commença avec DJ OliHood (10/10 pour le nom, en passant), qui réchauffa la salle de son DJ mix aux influences hip hop et trap. Puis, ce fut au tour de Lary, qui arriva sur scène avec son coat de cuir. On ne l’a pas vu longtemps celui-là : plus le spectacle avançait, moins il y avait de vêtements! Voir Lary Kidd finir un show en bédaine : check.

    Si je me fie à son calendrier de tournée, cet arrêt à Sherbrooke paraissait être le premier vrai spectacle solo du rappeur (son unique autre spectacle solo était un DJ set). Lary Kidd en profita pour nous proposer quelques nouvelles chansons tirées de son prochain album ainsi que des chansons de LLA que les fans ont reconnu tout de suite. Parmi les nouvelles chansons, notons la très solide Les palmiers brûlent dans la nuit, qui fut interprétée sans Yes McCan des Dead Obies, à la déception de tous. Pas grave : McCan avait probablement quelque chose à faire, et puis c’était vraiment le show de Lary et personne d’autre (même son DJ, DJ Manifest, se tenait assez tranquille dans son coin).

    Toujours le plus tendance, Lary n’a pas hésité à faire une reprise franglaise du plus gros hit trap de l’heure, Bad And Bougee de Migos. C’était aussi étrange que c’était logique : l’Atlanta sound qu’ont popularisé Migos se retrouve partout dans le rap québécois moderne. L’influence se faisait évidente dans les beats de Lary, toujours lents, nocturnes, éthérés et résolument trap.

    Mais ce qui a failli voler le show, c’était les projections lumineuses générées en live (au grand dam du photographe qui tentait tant bien que mal de capturer les effets hallucinants desdites projections). Ce côté visuel un peu psychédélique a parfaitement agrémenté la musique de Lary, déjà assez intoxicante en soi. Il n’y a pas à dire, le rappeur était accompagné d’un éclairagiste talentueux.

    Le rappeur a terminé sa prestation avec deux de ses meilleures chansons, soit celle que tout le monde attendait, XOXO, de LLA, puis la chanson-titre de son album, Contrôle. De quoi finir la soirée en force.

    Thierry Larose

    4 mai 2017
    Région : Estrie, Spectacles
    Coyote Records, Dead Obies, DJ Manifest, DJ OliHood, Estrie, La Petite Boîte Noire, Lary Kidd, Loud Lary Adjust, Rap queb, Sherbrooke
  • [ALBUM] Damien Robitaille – «Univers parallèles»

    [ALBUM] Damien Robitaille – «Univers parallèles»

    Il est de retour et n’a pas oublié comment groover… Damien Robitaille, le seul, l’unique!

    Univers parallèles, son plus récent opus, nous démontre à nouveau à quel point il sait brouiller les lignes de démarcation entre le ressenti et la parodie, et ce, avec brio. Tout le long de l’album, on l’imagine derrière le micro avec les yeux pétillants et le sourire en coin.

    Avec un pied dans l’absurde, l’autre dans le kitsch, il va sans dire que notre homme sait ce qu’il fait depuis un petit bout déjà, et son exécution est impeccable. La musique, plutôt dansante, est particulièrement funk, un style que Damien avait quelque peu délaissé dans son disque précédent, plus tropical. Ce coup-ci, les bongos, les chœurs gospel et les tapages de mains abondent et rendent les chansons toutes plus énergiques les unes que les autres. Mais Damien sait comment calmer un plancher de danse et a inclus un bonne dose de slow-jams dans la liste des pièces de l’album (on pense ici à la délicieusement quétaine Le fleuve et au somptueux exercice de chorale Signe de vie).

    Toutes les paroles sont chantées avec cet optimisme naïf et enfantin qu’on lui connaît bien, mais je dois dire que le charme de celui-ci commence à s’estomper. Pour citer l’une de ses meilleures chansons, il est « grand comme un homme, un homme autonome » – mais semble refuser de vieillir. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi : le côté débonnaire et farfelu des chansons de Damien a toujours été ce qui les rendait si comiques et accrocheuses. Mais la magie ne fait pas effet dans toutes ses chansons. Preuve à l’appui : Sortie de secours, une chanson qui semble tout droit sortie d’un jam de Belle et Bum et qui parle littéralement… d’une sortie de secours.

    Mais bon, le nouveau de Damien Robitaille est à prendre pour ce qu’il est : une nouvelle batch de chansons solides qui sauront faire danser les foules endiablées lors de ses spectacles. Car il faut savoir que, pour pleinement apprécier la musique de Damien Robitaille, il faut absolument l’entendre en spectacle… Damien étant une bête de scène hors pair.

    À quand l’album live?

    [bandcamp width=100% height=120 album=1987334144 size=large bgcol=ffffff linkcol=ff9933 tracklist=false artwork=small]

    Thierry Larose

    29 avril 2017
    Albums
    Audiogram, Damien Robitaille, Univers Parallèles
  • [ALBUM] Father John Misty – « Pure Comedy »

    [ALBUM] Father John Misty – « Pure Comedy »

    Faire la critique du nouveau Father John Misty, c’est plutôt intimidant : le pseudonyme que s’est donné Josh Tillman est celui de son alter-ego-qui-n’en-n’est-pas-un, un moyen de pouvoir jouer le dandy désabusé et prétentieux et, paradoxalement, d’impudiquement dévoiler sa pensée la plus personnelle, ce qui fait en sorte que ses paroles sont souvent teintées de pseudo-supériorité intellectuelle. Rien de bien nouveau, alors! Ses deux précédents albums, tous deux magnifiques, nous avaient déjà introduits au personnage. Complexe univers qu’est celui de Father John Misty…

    Pure Comedy, son dernier opus, est toute une expérience. De tous ses albums, c’est probablement le plus grandiloquent de l’artiste. Le thème majeur est l’humanité avec un grand H, ce qui est autant savoureusement immodeste qu’approprié pour un projet de Father John Misty. En ce sens, c’est un album-concept, comme les derniers. Dans une entrevue, le chanteur et multi-instrumentaliste a expliqué que son premier disque, Fear Fun, se voulait une introduction à Father John Misty, que son deuxième, I Love You Honeybear, était une exploration de ses sentiments romantiques et viscéraux à l’occasion de son récent mariage et que ce troisième serait une profonde réflexion sur l’humanité et tout ce que cela implique. Ceci dit, je dois évidemment paraphraser les mots du maestro, car ses dires sont infiniment plus obtus.

    Cyniques tout en étant étrangement touchantes, les paroles de Misty, bien que poétiques, ont toujours eu un petit manque de nuance attachant (et maintenant caractéristique) qui surprend toujours. Cette «pure comedy», c’est l’absurde d’ici-bas, et Misty connaît son Camus. L’album regorge de personnages pathétiques, de questionnements politiques, de critiques acerbes et d’observations nihilistes. Dans un des moments les plus émouvants, Misty chante :

    My first memory of music’s from
    The time at JCPenney’s with my mom
    The watermelon candy I was choking on
    Barbara screaming, « Someone help my son! »
    I relive it most times the radio’s on
    That « tell me lies, sweet little white lies » song
    That’s when I first saw the comedy won’t stop for
    Even little boys dying in department stores

    Ces vers, chantés avec une sincérité assez désarmante, sont les plus personnels que Misty n’aie jamais chantés. Comme quoi le personnage s’efface peu à peu à chaque album… Mais Misty n’est pas prêt de se départir de ses tics : il y a encore un peu de provoc’ dans les paroles, ça va de soi, mais celle-ci est toujours traitée avec humour. Cet humour, souvent kaufmanien et sardonique à souhait, fait partie intégrante de l’expérience.

    Sur le plan musical, on a droit à du folk doux agrémenté d’arrangements symphoniques toujours captivants (on pense ici à la splendide «Leaving L.A.», qui dure 13 minutes!) des bribes d’Americana, des passages plus atmosphériques…  et beaucoup de fétichisme de piano-rock de années soixante-dix. Les rythmes sont particulièrement lents, chose plus ou moins inhabituelle pour Misty, sans doute pour mettre davantage l’emphase sur les paroles. On ne s’en plaint pas. Toutefois, la variété prend un peu le bord : exit les rythmes rock, les guitares grunge et les éclectismes électro de ses meilleurs chansons.

    Bien qu’I Love You Honeybear reste mon préféré, ce nouvel album de Father John Misty n’en demeure pas moins excellent. Quand la personnalité d’un artiste est si forte, si singulière, et que la musique qui l’accompagne est à ce point efficace, il est difficile de ne pas tomber sous le charme.

    [bandcamp width=100% height=120 album=1125059352 size=large bgcol=ffffff linkcol=e99708 tracklist=false artwork=small]

    Thierry Larose

    11 avril 2017
    Albums
    2017, Father John Misty, Pure Comedy, Sub Pop
  • [ALBUM] Ghostly Kisses – «What You See»

    [ALBUM] Ghostly Kisses – «What You See»

    Margaux Sauvé, l’artiste qui se cache derrière le pseudonyme de Ghostly Kisses, nous prouve à nouveau qu’elle maîtrise le sens de l’esthétique et de l’ambiance. Ghostly Kisses a fait paraitre quelques chansons au fil des deux dernières années et celles-ci ne passèrent pas inaperçues, atteignant notamment deux millions d’écoutes sur Spotify. Avec ce premier EP, intitulé What You See, la chanteuse et violoniste Québécoise nous propose de revisiter trois de ses chansons déjà parues et d’en découvrir trois nouvelles.

    Dès la première chanson, «Garden», le son caractéristique de Ghostly Kisses est au rendez-vous : textures aériennes, rythmes effacés mais propulsifs, voix éthérées et feutrées ainsi que violons langoureux se font entendre et forment un paysage sonore très agréable. Ces éléments se retrouvent sur presque toutes les six chansons de cet EP, ce qui le rend très (trop?) cohésif, à la fois pop et ambiant. En effet, l’artiste ne dérogera jamais vraiment de cette formule. Je n’ai toujours pas décidé si je trouvais cela admirable ou un peu trop conservateur.

    Qu’à cela ne tienne, la facture électro du projet, bien que subtile, agrémente très bien les compositions et ajoute un petit côté pop contemporain aux chansons, les rendant un peu moins abstraites. Je dis abstraites car ces chansons le sont évidemment par leur lyrisme, mais aussi par leur rejet apparent des normes de la pop vocale commerciale. Sauvé est dotée d’une voix alto toujours tendrement voilée, ce qui rend les paroles inintelligibles, soit, mais qui plane toujours doucement au dessus de la musique, ce qui créé un effet enivrant.

    Les paroles sont à l’image de la musique qui les accompagne : tristes, rêveuses, pensives et toujours un peu vagues. Les paroles du refrain de «Such Words» sont un bon exemple de ce que j’avance:

    Can it stay between us?
    (But we do not say such words)
    Among the other things you know
    (But we do not say such words)
    In this endless “in between”
    (But we do not say such words)
    I will never learn, I know
    (But we do not say such words)

    Le titre de cet EP est trompeur. Le plus captivant avec Ghostly Kisses, ce n’est pas ce que tu peux voir, mais bien ce que tu peux ressentir. On peut souvent deviner un sentiment de regret, mélancolique sans être viscéral, qui hante les paroles de Sauvé. Les journées pluvieuses n’auront jamais eu d’aussi parfaites trames sonores.

    Thierry Larose

    5 avril 2017
    Albums
    Ep, Ghostly Kisses, Margaux Sauvé, quebec, What You See
  • [SPECTACLE] Valaire (+Khali Abdu), Théâtre Granada, 17 mars 2017

    [SPECTACLE] Valaire (+Khali Abdu), Théâtre Granada, 17 mars 2017

    Je suis vraiment bien situé à Sherbrooke. Mon appart’ se trouve à exactement vingt-six pas de la Petite Boite Noire, où je suis allé voir les Deuxluxes la semaine dernière. Et si je fais ces vingt-six pas dans la direction opposée, je me retrouve au Théâtre Granada, où je suis allé voir le plus récent spectacle de Valaire vendredi dernier. Et quel spectacle, mesdames et messieurs.

    Comme la dernière fois, j’étais en compagnie de mon photographe/ami d’enfance Zachary et ce spectacle s’annonçait un petit trip de nostalgie. En effet, avec Acid Rap de Chance the Rapper, l’album Golden Bombay de Valaire (R.I.P. Misteur) fut une partie intégrante de notre soundtrack de secondaire. Une fois rendus au parterre du théâtre, nous entreprîmes l’écriture d’une liste de chansons que nous voulions absolument entendre dans la soirée :

    • Monster Donte (celle qui m’a fait découvrir le groupe, lors d’une prestation incroyable dans le cadre du très regretté magazine culturel télévisé Mange Ta Ville);
    • «La toune avec Béni BBQ» (suggestion de Zach) Ndl’A : la chanson en question s’intitule «Gumshoe», le titre nous avait échappé;
    • Ave Mucho;
    • «Une toune avec Fanny Bloom, peu importe laquelle» (elle est géniale, je m’ennuie de La Patère Rose).

    Eh bien nous fûmes servis ce soir-là, car non seulement est-ce que Valaire a joué toutes ces chansons, mais les gars (originaires de Sherbrooke, en passant) ont profité de leur retour au bercail pour en mettre plein la vue aux spectateurs, qui étaient vendus d’avance.

    La première partie était assurée par Khali Abdu. Alors qu’il chantait sur des rythmes tantôt électro, tantôt tropicaux en se pavanant sur scène, son DJ restait bien effacé derrière sa console et son portable Mac. La formule était très simple et malheureusement plutôt ennuyante. Disons que l’arrivée de Valaire se faisait attendre. Khali revint sur scène plus tard dans la soirée pour accompagner le groupe avec une énergie nouvelle qui lui allait à merveille.

    Par la suite, le spectacle commença et tout de suite, on eut droit à l’excellente «Mama Donte», abrégée et remixée pour l’évènement. Et ça sonnait aussi bien que lorsque le groupe l’avait joué en version acoustique dans un barbershop, quelques années plus tôt. Décidément, les musiciens sont versatiles dans ce groupe. Pour rendre tout ça encore plus intéressant, nous apprîmes qu’un invité spécial allait chanter et jouer du trombone tout au long de la soirée : Alan Prater, véritable légende de la musique soul et l’un des secrets les mieux gardés de Montréal.

    Après quelques chansons de leur plus récent album, les gars, qui étaient dotés d’un uniforme custom-made, entamèrent une routine réglée au quart de tour. Le reste du spectacle allait être constitué de jeux de lumières époustouflants, de chorégraphies, d’invités spéciaux (allô Fanny Bloom! Allô Alan Prater!), de marionnettes géantes et même d’un immense bonhomme vert avec soufflerie qui dansait au devant de la scène. Époustouflant, ridicule, incroyable.

    Quelques moments forts : toutes les notes aigues de Prater, la chanson de Fanny Bloom («November N.3»), le tshirt de Fanny Bloom («I’m the brain behind the Sherbrooke Machine»… #Sherbylove #UdeS), les quelques solos de trompette et le medley final, qui se termina avec une reprise extrêmement funk de «Where It’s At» de Beck qui fut sauter la foule au complet. Décidément, il s’est passé beaucoup de choses durant ce spectacle. Mais comme absolument tout semblait être axé sur l’expérience du moment, je ne saurais trop vous recommander de vous procurer vos billets le plus vite possible… Je dis ça comme ça, bien entendu.

    Thierry Larose

    27 mars 2017
    Région : Estrie, Spectacles
    Alan Prater, Estrie, Fanny Bloom, Khali Abdu, Misteur Valaire, Sherbrooke, Spectacle, Théâtre Granada, Valaire
  • [SPECTACLE] Les Deuxluxes (+ Hoodooed), La Petite Boîte Noire, 10 mars 2017

    [SPECTACLE] Les Deuxluxes (+ Hoodooed), La Petite Boîte Noire, 10 mars 2017

    «Fuck yeah Sherbrooke!»

    L’énergie de la foule (foule qui, soit dit en passant, était assez dense pour une salle comme la Petite Boîte Noire) allait bientôt être à son comble lorsque l’incroyable Anna Frances Meyer nous lança (cria) cette phrase toute simple (mais si puissante lorsque bien épuisés après une chanson à mosher comme s’il n’y avait pas de lendemain)… Eh oui, les Deuxluxes étaient dans la place et la magie opérait en s’il-vous-plait.

    Vendredi le 10 mars, ma salle de spectacle sherbrookoise fétiche recevait Anna Frances Meyer (guitare tenor, voix) et Étienne Barry (guitares, kick et snare et voix… simultanément!), un duo mieux connu sous le nom des Deuxluxes, que nous connaissons bien ici à Ecoutedonc.ca et qui sont en feu ces derniers temps. Il faut dire qu’ils ne chôment pas : après ce passage à Sherbrooke, ils s’envolaient pour le Texas! Il n’y a aucun doute à y avoir : leur son empreint de blues et de rockabilly saura assurément séduire là-bas.

    La soirée débuta avec le mystérieux groupe Sherbrookois Hoodooed (possiblement le deux-tiers du groupe Mojo Wizard) qui étaient eux aussi un two-man band. Le chanteur et guitariste assurait le côté mélodique (quoique très répétitif) en dansant alors le batteur, très compétent, se cachait plutôt derrière un masque de vieil homme pour assurer une rythmique endiablée et assez constante. Leur musique aux accents surf, punk et psychédéliques était efficace, quoique saugrenue.

    S’en suivit la performance des Deuxluxes, une performance électrisante et à leur image. Ces deux musiciens ont compris c’était quoi un bon pacing de spectacle rock. Plus ça allait, plus les rythmes se faisaient rapides, ce qui créa un momentum incroyable. Avec sa voix mi-Dolly Parton, mi-Betty Boop, Anna Frances Meyer chantait et faisait crier la foule avec une assurance bien à elle, alors qu’Étienne Barry fournissait une trame musicale minimaliste mais extrêmement dansante. Tirée de leur album Traitement Deuxluxe, la chanson «I’m In Love» continue d’être une pièce qui, en spectacle, fait brasser la cabane comme nulle autre de leur répertoire. J’ai même vu un mec faire du crowd surf pour finir par s’accrocher au plafond… bref, très rock, très amusant.

    Vers la fin du spectacle, Étienne nous a révélé (peut être un peu avant qu’il n’en ait la permission, selon ses dires) que le groupe reviendrait cet été pour le festival Sherblues, festival dont le nom fut bien disséqué (et ridiculisé [avec raison, dois-je avouer]) par la suite. Oh mais quelle désinvolture! On lui pardonne, et on attend impatiemment leur retour.

    Thierry Larose

    17 mars 2017
    Région : Estrie, Spectacles
    Estrie, Hoodooed, La Petite Boîte Noire, Les Deuxluxes, Sherbrooke
  • [ALBUM] Clay and Friends – «Conformopolis»

    [ALBUM] Clay and Friends – «Conformopolis»

    Ne sait-on jamais quand un courant musical connaitra sa renaissance?

    Les esthétiques et les sonorités peuvent varier, mais tous les revivals ont souvent un point en commun : l’enthousiasme. Un courant nait d’un enthousiasme général, une soif d’innover. Lorsque ce courant renait des cendres, ses nouveaux adeptes font également preuve d’enthousiasme, mais aussi de respect envers les traditions et principes établis. Toutefois, un groupe peut aussi bien avoir un côté irrévérencieux, souvent vu comme de la prétention, lorsqu’il puise son inspiration dans le passé.

    Tout ça m’amène au nouvel album de Clay and Friends.

    À première vue, leur son parait particulièrement éclectique : la bande de Clay n’a pas peur de mélanger tous les ingrédients du garde-manger. Ça goutera drôle, mais ce sera nouveau.

    Est-ce que le groupe montréalais prône un certain revival, ou mille à la fois? Oui, il est vrai que Conformopolis saute un peu du coq à l’âne côté genre, mais reste que le projet est résolument original, excitant et moderne. Ce mélange des genres est habile et loin d’être prétentieux. En soi, ce nouveau disque rappelle surtout une époque où les artistes québécois n’avaient pas peur d’expérimenter avec les sonorités électros et exotiques dans leurs chansons (on pense ici à Daniel Bélanger circa Rêver Mieux, à Doba Caracol, à Stefie Shock…). L’histoire ce répète donc ici, en quelque sorte.

    Dès la première chanson, l’excellente «TITO» (dont on a déjà parlé ici), on a l’impression d’être dans l’appart’ des musiciens : ça sent drôle, y’a des plantes et des guitares un peu partout, le studio est dans le salon et tous les gypsies jamment en souriant. Ce vibe s’installe dès le début de l’album et ne partira jamais, pour notre plus grand plaisir.

    Les paroles sont généralement très imagées et cosmopolites : on a droit à un hymne au spleen urbain (l’excellente «DanS mA CITÉ»), des réflexions de cours de philo («BUDDhA ET MARX») et plusieurs moments d’introspection et de pure poésie.

    Musicalement, c’est à l’image de notre métropole multiculturelle : les guitares manouches se frottent au hip hop, au jazz et agrémentent même des bouts de trap, les paroles empruntent aussi bien à l’anglais qu’au français, il y a du piano swing, du reggae au flow effréné… Bref, un beau melting-pot et plusieurs clins d’œil aux grands de chaque style.

    Est-ce qu’on s’y perd? Pas du tout. Les chansons forment un tout cohérent et étonnamment accrocheur. Comme quoi il faudrait ajouter «pop» à la liste.

    Thierry Larose

    15 mars 2017
    Albums
    Clay and Friends, Ste-4 Musique

Proudly Powered by WordPress