Arrivé tôt à la porte verte du Bateau de nuit, j’entendais déjà une clameur excitée émanant du deuxième étage. En haut, on trouve le bar, sombre à souhait, et encombré par des étuis de guitares et par d’innombrables chandails marchandisés. J’aperçois, dans un coin, un mur impressionnant d’amplificateurs et je ne peux m’empêcher de jeter, en souffrance empathique, un coup d’œil à l’étroit escalier de la taverne. L’espace pour les spectateurs était parfaitement restreint pour donner au spectacle une ambiance intimiste et pour donner à la musique cette énergie directe ont elle avait tant besoin.
De mémoire d’homme, c’est le 3e passage à Québec des New-Jerséyens d’Au Revoir. Maintenant équipé de trois guitaristes, d’un bassiste, d’un claviériste, d’un batteur et de 46 pédales d’effets, le groupe a ouvert le bal avec un rock instrumental épais et étouffant, ponctué de crescendos impressionnants.
Enfilant trois ou quatre très longues pièces, presque sans interruption, le groupe a fait preuve d’une intensité remarquable, en particulier le batteur, qui devait combattre les murs d’amplis l’entourant.
Tourneurs aguerris, ils ont réinvité pour leur passage au Canada, les Montréalais d’Atsuko Chiba, avec lesquels ils avaient déjà enflammé le sous-sol du Cercle.
Ces derniers ont eu la lourde tâche de suivre le maelstrom auditif qu’était le premier groupe, mais ils ont réussi à merveille. À noter que le record de pédales d’effets de la soirée, auparavant détenu par Au Revoir, a été battu, avec l’impressionnant nombre de 52 pédales!
Alliant une maîtrise technique impressionnante et une recherche sonore accomplie, le rock mathématique des Montréalais rappelait autant Rage Against the Machine que les projets d’un certain Omar Rodriguez-Lopez, jusqu’à aller aux relents du post-hardcore du début des années 90. Synthétisant ces influences avec des projections visuelles à point, Atsuko Chiba a su mettre la barre encore plus haute pour les finissants de la soirée, Milanku.
Force est d’admettre que la barre était peut-être trop haute pour que le post-métal dénudé de Milanku soit apprécié à son maximum. Le quatuor a quand même su impressionner avec sa légèreté d’approche, son charisme, et une force évidente de composition derrière les chansons. Le tout s’est terminé aux alentours de 23h30, sans plaintes de bruit, à ma grande surprise!
N’importe quel fan de rock instrumental, de drone, de métal ou d’émotions fortes qui n’y était pas devrait honnêtement se mordre bien fort les doigts, car c’était une soirée d’un calibre exceptionnel!