Le premier album de ce trio de Brooklyn m’avait jeté par terre. Des chansons remplies d’émotions, cathartiques, qui vous libèrent un motton en deux temps, trois mouvements. Le leader du groupe, Zach Williams chante comme s’il était illuminé par le Saint-Esprit. Et lorsqu’il est accompagné par Brian Elmquist et Kanene Pipkin, les harmonies qui en résultent semblent sortir tout droit du Paradis. De la pop de grange finement maîtrisée et fort prometteuse.
Après une longue tournée qui leur a fait faire le tour des États-Unis à un nombre incalculable de reprises, voyant les salles grandir à chaque passage, le groupe est retourné à la maison, question de prendre une pause bien méritée et de se consacrer à la suite des choses.
Quand est venu le temps d’enregistrer leurs nouvelles chansons, Williams, Elmquist et Pipkin ont fait appel à Aaron Dessner (The National) pour les diriger derrière la console. Celui-ci a aussitôt compris les ambitions des membres du trio et il a trouvé l’emplacement idéal pour les atteindre, voire les dépasser. Il a réservé les studios Dreamland, une ancienne église convertie à quelques heures de New York, où les chansons du groupes ont vraiment pris leur envol. Il a invité une pléthore de musiciens à embellir la trame de base du trio, sans jamais dénaturer celle-ci.
Dans de telles conditions, et avec ces propos de Williams, qui affirmait que ce nouvel album pouvait rappeler Elvis, période Vegas (rien de moins!), le groupe ne pouvait que frapper la balle à l’extérieur du stade.
Alors, le résultat? Rien de moins qu’un grand chelem.
La pièce-titre, qui ouvre l’album, donne raison à Williams. Then Came the Morning, c’est le grandiose des plus grands spectacles de Vegas transposé dans une vieille église désaffectée dans les Catskill. C’est Elvis et ses paillettes, les choeurs, les cuivres, les cordes, l’émotion, toutte!!! On a hâte de passer à la suite.
La suite, c’est Fake Roses, une chanson pop adulte aux accents country. Une chanson comme on en a entendu des milliers avant aujourd’hui. Vraiment? Écoutez Zach Williams raconter son histoire, vous chanter sa peine. Vous avez des frissons? Attendez, on va ajouter un peu de violons et de lap steel. Et ce petit piano électrique si accrocheur? Parfait pour faire la transition entre la partie où Williams chante en solo et l’entrée du choeur. Juste quand les trois se mettent à chanter à l’unisson. Ce feeling-là, vous allez encore le sentir à de nombreuses reprises d’ici la fin de l’album.
Les choeurs. Les harmonies. La grande force de The Lone Bellow. Quand elles sont mises ensemble, les voix de Zach Williams, de Kanene Pipkin et de Brian Elmquist deviennent la plus belle chose que j’ai jamais entendue (sauf peut-être les premiers « papa » de mes enfants). Il y a une grâce et une perfection dans ce chant…
Chaque nouvelle chanson apporte son lot d’émotions, comme dans Marietta, une ballade en crescendo, ou Take My Love, une chanson un peu plus rock où le groupe nous envoûte et nous pousse à entonner le refrain (fédérateur à souhait) à l’unisson. Même les chansons moins chargées, comme cette magnifique Call to War (écrite par Elmquist, le rockeur des trois, et chantée par Pipkin, qui brille comme on l’a jamais entendue briller), viennent nous chercher, poil par poil.
Juste de même, on n’est même pas encore à la moitié de l’album et voilà Elmquist, qui prend le haut du pavé à son tour. Brian Elmquist, ce gentil géant tranquille, calme même en transe, brille ici dans un magnifique guitare-voix où Williams et Pipkin sont, pour une fois, les faire-valoir.
Williams revient ensuite avec la bluesée Diners, qu’on entend avec toutes ses paillettes et ses couleurs, comme à Vegas! ET BANG! Rock n’ Roll! Heaven Don’t Call Me Home est vraiment de ces chansons qui vous font bondir de votre chaise jusqu’à la piste de danse. C’est rythmé et bien sûr, c’est interprété sur le 220 par nos amis brooklynois. Ça fait du bien après toute cette émotion accumulée depuis une demi-heure.
Le rock se poursuit sur If You Don’t Love Me, une chanson qui se nourrit elle-même, qui commence simplement, mais qui devient un espèce de monstre qui fait hocher des têtes en signe d’approbation en cours de route.
Quand on arrive à Telluride, on ne peut que s’arrêter pour apprécier le jeu des voix et des guitares qui s’entremêlent doucement et qui finissent par ne devenir qu’un. Quant à To The Woods, qui suit, il s’agit d’une petite chanson chantée par Williams seul et sur laquelle semble reposer toute la lumière du monde.
Une autre chanson qui risque de devenir une préférée en spectacle, Cold as it Is, permet au groupe de donner une autre petite leçon de rock n’ roll saveur country. Vous savez, toute les émotions qu’on a ressenties tout au long de l’album? C’est le temps de les faire ressortir en tapant des mains et en chantant avec le plus grand des bonheurs avec le groupe… avant qu’il ne se taise pour laisser Zach Williams commencer I Let You Go, où on chante en douceur, vidé de toute cette énergie qu’on avait au début, mais heureux d’avoir vécu une des plus belles expériences auditives des dernières années.
Voilà, c’est dit. Then Came the Morning, c’est une expérience qu’il faut vivre au moins une fois. La grâce dans laquelle se trouvent les membres du groupe tout au long de l’album, cette espèce d’aura mystique qui les entoure nous donne envie de croire qu’il existe quelque chose de plus grand et de plus beau encore, qu’une chanson comme Fake Roses n’est que le début d’une suite de classiques intemporels que nous laissera The Lone Bellow dans quelques années, lorsque les membres du groupe accrocheront leurs bandoulières pour de bon après une longue et fructueuse carrière…
Il ne pourra en être autrement.
Si vous êtes à Montréal, faites tout ce que vous pouvez pour voir The Lone Bellow au Petit Campus le 26 février prochain. Après ça, vous n’aurez plus la chance de voir ce groupe dans un cadre aussi intimiste…
Ça vaut la peine. Je vous le jure.