Les anglophones ont une expression pour les gens comme Mara Tremblay : What you see is what you get. On l’a constaté à de nombreuses reprises tout au long de sa carrière. Le chihuahua était cru, mais il était vrai, authentique. On souffrait avec elle sur Les aurores. On la sentait contemplative sur Grande est la vie. Sur Tu m’intimides, elle s’est littéralement dévoilée. La voilà, maintenant, à 46 ans (bonne fête en retard, Mara!), qui vit À la manière des anges. Ce n’était pas un personnage, c’était elle tout le long, et c’est ce qui rend son dernier album si joli : enfin, on la sent bien, en pleine possession de ses moyens.
Mara se livre facilement, comme en témoignent les nombreuses entrevues de fond qu’elles a données ces dernières années, dont celle-ci, réalisée il y a très peu de temps, avec René Homier-Roy. Elle parle ouvertement de sa bipolarité, qui n’a été diagnostiquée qu’il y a quelques années et avec laquelle elle compose beaucoup mieux depuis qu’elle est capable de donner un nom à ses troubles. Ça a fait du bien, ça paraît.
C’est une Mara Tremblay à la voix radieuse qui répond au téléphone en ce vendredi un peu gris. Une éclaircie dans ma journée de coureur des festivals. C’est justement de ça que je voulais parler avec elle : son expérience unique comme participante à la dernière représentation de Légendes d’un peuple le 11 juillet dernier au Festival d’été. Et sa participation, vendredi, au Festif.
Lorsque je lui dis que je faisais partie des (pas si) rares qui avait choisi d’aller voir Légendes d’un peuple plutôt que les Foo Fighters, Mara me répond en riant que j’ai assisté à quelque chose de rare! « On était vraiment heureux, c’était une belle soirée pour tout le monde! Il y avait de l’euphorie avant, pendant et après. Bravo, c’était très touchant! » Pour les 3-4 qui ne s’en souviennent pas, il y a eu un déluge ce soir-là, un orage violent qui a causé l’annulation d’un des spectacles les plus attendus à Québec (celui des Foo). Quand je demande à Mara ce qui a poussé Alexandre Belliard et ses amis à donner le spectacle malgré la pluie, elle répond tout simplement que c’était pour les courageux qui sont restés là, qui criaient chaque fois que quelqu’un montait sur scène. « C’est l’équipe du Festival qui prend les décisions, jamais les artistes, ils ont observé les conditions et ils ont vu que ça allait se calmer. » Oui, l’orage s’est calmé, mais la pluie, elle, n’a jamais cessé de tomber. « Quand je chantais, j’avais de gros éclairs dans la face! Quand je chantais, je voyais un gros orage rose, j’avais la pluie dans la face. Je me sentais comme une guerrière » Un compromis a été trouvé et on a offert une version réduite et acoustique du spectacle. Malgré tout, les artistes ont été contents de leur soirée, une expérience unique selon Mara. Avouons que même si vous aviez déjà vu le spectacle, celui-là, différent, avait une couleur particulière. Une finale en beauté pour un spectacle tout aussi beau.
Cela dit, la raison de notre appel, c’était le spectacle du Festif! Je l’avoue, ça fait une dizaine d’années que je n’ai pas vu Mara sur scène. Ces dernières années, j’ai laissé à ma conjointe, fan finie et assumée, la chance d’aller voir ses spectacles. Yep, Mara est un peu comme une amie de la famille, ses chansons sont au coeur de notre trame sonore. C’est donc avec un plaisir renouvelé que je la retrouverai samedi. Je lui demande à quoi je dois m’attendre du spectacle qu’elle va donner vendredi : « On a vraiment du plaisir. C’est le groupe avec qui j’ai le plus de plaisir. Je suis avec mon chum, mon fils, c’est ma cousine qui est à la direction de tournée. C’est vraiment hyper familial et je me sens super bien. Y’a quelque chose dans la compréhension de la musique de ces gens-là qui fait que je me sens bien avec eux. Et puis, c’est un grand privilège que de pouvoir faire de la musique avec mon fils pis mon chum! »
Multi-instrumentiste reconnue, Mara nous apprend qu’elle a ajouté la guitare électrique à son arsenal. « À chaque fois, y’a comme un nouvel instrument qui entre dans ma vie, pis là, ben c’est la guitare électrique. J’ai bien du plaisir. » Paraît justement que le spectacle est beaucoup plus rock que ce qu’on a entendu précédemment. « Pas comme dans le temps du Chihuahua, quand même! Mais comme je revisite beaucoup de vieilles chansons, il y en a du premier album, quoiqu’elles sont plus développées… j’ai au moins quinze ans de plus! Je m’ennuyais beaucoup du rock. J’ai fait trois ans de tournées solo, à raconter ma vie. C’est un côté de moi qui existe, puis je m’ennuyais de faire ça! C’est pas juste rock, mais dans un contexte de festival, on coupe quelques chansons plus douces… c’est dehors! » La seule chose qui inquiète Mara, c’est le nombre de personnes qui risquent d’être là en fin d’après-midi. Je la rassure, nous sommes nombreux à avoir hâte de la voir et elle joue sans opposition. Elle ajoute un mot sur Le Festif : « J’y suis allée avec les Colocs, avec Sunny, c’est incroyablement débile! J’ai vraiment hâte d’y aller! »
Avant de terminer, comme on lit parfois des livres en écoutant notre musique, une question nous turlupine : est-ce que Mara va poursuivre sa carrière d’écrivaine? « Ben oui, je suis en train d’écrire! Un deuxième roman, pas mal dans le même style que le premier (Mon amoureux est une maison d’automne, 400 coups). J’ai aussi écrit beaucoup de poèmes, je pourrais publier un recueil de poèmes en parallèle. J’ai plein de projets, je suis en écriture en ce moment! J’aime beaucoup écrire, je suis toujours là-dedans! »
Si vous manquez le spectacle de vendredi, après avoir ralenti (un tout petit peu, vraiment) pendant quelques semaines (on t’a vue aller, Mara l’hyperactive!), la tournée qui accompagne À la manière des anges reprend de plus belle. « J’en ai pour encore au moins un an, c’est génial! » Plein de dates ont déjà été annoncées (maratremblay.com), d’autres suivront sans doute. Si vous n’avez jamais vu Mara en spectacle, sautez sur l’occasion. Vous aurez la chance de voir une des artistes les plus authentiques et généreuses de notre génération, qui a défriché tout un pan de notre scène musicale à coups de recettes de sauce à spaghetti et d’appels bouleversants.
Si #jaihateaufestif, c’est un peu beaucoup à cause de Mara. À vendredi!