[SAINT-ROCH EXPÉRIENCE] Compte rendu, jour 3

Toutes les photos : Jacques Boivin

Dernière journée de la première présentation de Saint-Roch Expérience, le nouveau bébé de 3E, la filiale du Festival d’été de Québec. S’il faisait un temps magnifique en après-midi, ce qui était parfait pour la portion Cuisinez Saint-Roch du festival, la pluie s’est malheureusement manifestée en fin d’après-midi, ce qui a quelque peu vidé le centre-ville. Les artistes n’ont pas semblés trop affectés par la pluie (sauf Perreau, qui a profité de sa balance de son pour jouer les stand-up comics devant la vingtaine de guerriers qui attendaient sa prestation… avec Yann, un citron, ça sert à faire de la limonade). Ouf!

Jacques Boivin – Anthony Roussel, Loïc April et La Bronze

Anthony Roussel
Anthony Roussel

L’après-midi a commencé avec Anthony Roussel, auteur-compositeur-interprète originaire de Québec. Accompagné, entre autres, d’Antoine Lachance (On a créé UN MONSTRE), le jeune chansonnier a su plaire au parterre avec ses morceaux qui, même s’ils ne brillent pas par leur originalité, sont finement taillés. La voix un brin rauque de Roussel plaisait bien à ce parterre principalement constitué… d’enfants qui dansaient joyeusement pendant que les parents regardaient la scène derrière, un grand sourire aux lèvres.

Loïc April
Loïc April

Après une pause de près d’une heure (c’est un peu long, les amis, va falloir travailler là-dessus pour l’an prochain), Loïc April apparaît sur la grande scène avec ses musiciens. L’indie rock teinté de shoegaze rappelle parfois Bernhari (sans la surdose de reverb qui caractérise parfois le genre) et il est livré avec une énergie qui a tôt fait de ramener les tout petits sur la « piste de danse ». Prime de 20 points pour avoir sorti Pedro the Lion (que je n’avais pas entendu depuis des années) des boules à mites.

La Bronze
La Bronze

Après une brève interruption (qui nous a fait manquer nos chevelus Mauves) afin d’animer notre émission de radio, nous retournons à la grande scène, cette fois sous la pluie. Nadia Essadiqi, que les mélomanes connaissent mieux sous le nom La Bronze, termine son soundcheck. Votre pas très humble serviteur est un brin nerveux : est-ce qu’il sera seul pour cette prestation? Eh ben non! Dès les premières notes, alors que Nadia tapoche joyeusement sur ses tambours, les gens répondent à l’appel! Bien sûr, il n’y a pas foule, mais dans les circonstances, une cinquantaine de sourires (tous visibles), ça remplace mille personnes indifférentes qui attendent la tête d’affiche, n’est-ce pas?

Comme toujours, La Bronze respire la joie de vivre (avec son chandail Montreal Beach) et même lorsque ses chansons sont un peu plus tristes, son interprétation demeure lumineuse comme un gros câlin. En fait, Nadia, c’est ça. Du rythme, des mélodies uniques, et une attitude « gros câlin » qui détonne.

Marie-Thérèse Traversy – Aliocha et Yann Perreau

Aliocha

Ayant véritablement apprécié le EP de ce nouveau venu dans l’industrie musicale, j’étais curieuse d’entendre les versions live de ses compositions. Verdict : Aliocha a offert une courte prestation fort convaincante, sa première à Québec, devant un public plutôt réceptif à sa proposition artistique.

Aliocha
Aliocha

C’est avec la pièce Into the Wild qu’il nous a fait entrer dans son univers aux mélodies folk-rock-vintage résolument accrocheuses, où l’influence de Dylan est indéniable. Il y a, dans la voix d’Aliocha, de légers chevrotements qui rendent son timbre tout à fait charmant et distinctif. Accompagné de ses trois musiciens (dont son frère Volodia à la batterie), l’artiste a également interprété la pièce-titre, Sorry Eyes, qui délie instantanément les corps, avant de dédier la nostalgique Sarah à un de ses amis, présent dans la salle, pour souligner son anniversaire.

En fin de parcours, le multi-instrumentiste s’est installé aux claviers puis, s’est présenté pour la première fois de la soirée. «Je m’appelle Aliocha. J’ai pris pour acquis que vous le saviez. C’est certain que personne ne le sait, c’est mon premier EP!», a-t-il lancé avec modestie avant de pianoter sur Let Me Laugh, en solitaire sur scène. C’est en interprétant cette brève composition que le talent d’acteur d’Aliocha refait particulièrement surface, alors qu’il vit pleinement l’émotion rattachée à chacune des lignes.

Bref, je n’ai pas entendu un acteur wannabe chanteur. Le potentiel est réel et j’ai bien hâte de voir comment l’expérience fera évoluer ce jeune talent prometteur.

Si vous voulez en apprendre plus sur Aliocha, je me suis entretenue avec lui dans les studios de CKRL 89.1, tout juste avant son concert. L’entrevue est disponible ici (sur notre balado!) vers 1 : 07 : 00.

Yann Perreau

Plutôt que de poursuivre la soirée au sec dans le confortable District, j’ai décidé de braver la pluie pour me diriger vers la scène extérieure, rue St-Joseph. Parce que Perreau ne déçoit jamais et que chacun de ses concerts apporte son lot de folie et de moments imprévisibles.

Yann Perreau
Yann Perreau

De quelques courageux éparpillés, nous sommes vite passés à un rassemblement assez dense. Sous les gouttes d’eau fuyant du ciel, la bête de scène s’est promenée allègrement parmi son répertoire tantôt dansant, tantôt touchant, en visitant notamment les albums Un serpent sous les fleurs et Le Fantastique des astres.

Voici quelques trucs que vous avez manqués si vous n’y étiez pas :

  • «Mary Poppins» Perreau (pour reprendre la comparaison de Jacques)
  • Yann, agenouillé, qui hurle tel un animal sur Mon amour est un loup.
  • Une spectatrice, complètement investie, qui lui répond en hurlant de plus belle.
  • Un moment de tendresse entre Yann et le gars de la sécurité, alors que le chanteur lui susurrait les «c’est si bon» de Faut pas se fier aux apparences à l’oreille, tout en lui caressant la poitrine.
  • La détresse dans le regard du gars de la sécurité.
  • Des gens complètement trempés, mais clairement heureux.

Olivier Provencher Saint-Pierre – Blind Guardian

Blind Guardian
Blind Guardian

Ça faisait depuis 2010 que Blind Guardian n’avait pas joué dans la Vieille Capitale. Le groupe allemand, contrairement à quelques autres groupes de chasseurs de dragons (tousse, tousse, Sonata Arctica, tousse, tousse), ont clairement su créer la rareté auprès des fans de Québec, en témoignait le théâtre Impérial plein à son maximum (voire plus !). Avec un répertoire majoritairement tiré de l’album Imaginations from the other side, le groupe a sans doute ravi les fans les plus aguerris. Hansi Kürsh, tout en voix, a livré une performance absolument impeccable qui n’avait rien à envier à ses plus jeunes années. Un spectacle plus que généreux de la part de Blind Guardian, offert à un public conquis d’avance. Si vous étiez parmi les rares absents, vous avez sans doute raté l’événement – ou devrais-je dire « l’expérience » ? – métal de l’année à Québec.

Simon Belley – Mark Clennon et ABAKOS

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Mark Clennon

La voix de Yann Perreau en écho, je m’engouffre dans un Anti tristement vide (on pouvais compter les gens présent sur nos deux mains, hormis le staff) pour le spectacle d’Abakos, projet de Pierre Kwenders et Ngabonziza Kiroko, de Dear Denizen. Mark Clennon, chanteur torontois (selon son SoundCloud, mais ajoutons qu’il a grandi en Jamaïque) assurait la première partie du duo en ce samedi 17 septembre pluvieux qui se prêtait à l’ambiance musicale offerte par les artistes pour la dernière soirée de St-Roch Expérience.

En effet, Mark Clennon flirte avec le R&B mélancolique et des rythmes électroniques très rythmées et dansants, par moment. D’emblée, les premières notes poussées m’ont rapidement fait penser à The Weeknd, circa House of Balloons. Une voix qui se module sans efforts aux divers rythmes réalisés par Joey Sherrett du trio rap montréalais The Posterz (quelque chose que j’ai appris au fil de mes recherches) et qui est toujours en émotion. J’ai senti tout au long de sa prestation que, vocalement, nous n’avons touché que la pointe de l’iceberg. Une belle découverte qui cadre parfaitement avec l’ambiance générale (déjà suggérée par la présence d’Abakos) de cette soirée. Malgré une minuscule foule, Mark Clennon n’as pas semblé trop affecté et restait énergique, prenant le tout avec légèreté et sourire. Une vibe qui sera présente au cours de toute la soirée, rendant le tout agréable malgré tout.

Abakos - Photo : Jacques Boivin
Abakos

La pièce de résistance : Abakos. Le duo, vêtu d’habit de pilote (militaire là, pas pilote commercial), nous offre un crescendo qui culmine avec « New Constellation ». Empruntant les mêmes influences que Clennon et en y ajoutant une pincé de SBTRKT, on obtient un cocktail efficace qui allie le visuel et l’auditif. Le duo en est à son quatrième concert (ou cinquième, même pour eux cela ne semblais pas clair!) et il précise lentement les paramètres de leur performance. D’ailleurs, mention spéciale à leur musicien, dont le nom ne me semblait pas très clair mais qui, en l’espace de quelques secondes, passait de son drum machine à son looper, tout en scratchant au besoin. Il jouait aussi de la guitare, ainsi que du clavier. Bref, un homme aux multiples talents. Une des forces d’Abakos (et de Kwenders, par le fait même) est que le duo flirte facilement avec les genres, sans pour autant perdre l’essence véritable du projet, c’est pour ça que les catégoriser devient un peu futile puisqu’ils jouent sur plusieurs plateaux : parfois planants, parfois dansants, quelque fois mélancoliques, souvent optimistes. Kiroko et Kwenders, comme leur prédécesseur, semblaient apprécier leur soirée malgré la foule, se permettant quelques blagues au passage afin de conserver la légèreté ambiante.

Bref, une soirée qui était sous le signe de la découverte, personnellement. En effet, j’avais omis toute recherche sur les artistes avant de me pointer, histoire d’être déstabilisé. Un état d’esprit adéquat pour ce genre de soirée intimiste par la force des choses. Triste pour les artistes qui, par contre, ne peuvent que ressortir grandis de cette expérience (j’ose espérer).

Mot de la fin

Voilà, notre couverture de la première édition de Saint-Roch Expérience se termine ainsi. On a pu voir une vingtaine d’artistes, pour la plupart émergents, dans de nombreux styles musicaux. Si la participation n’a pas toujours été parfaite (effet de nouveauté? proximité avec Envol et Macadam?), la qualité des spectacles, elle, était très haute.

Louis Bellavance a affirmé aux médias qu’il envisageait d’ajouter des scènes extérieures (payantes) dès l’an prochain et de devenir un mini FEQ. Il faudra toutefois faire attention. Il a beau faire beaucoup plus chaud en septembre que dans mon jeune temps, les soirées sont de plus en plus fraîches et la pluie est beaucoup plus désagréable qu’en juillet. On n’a qu’à penser aux Francofolies qui ont lieu en juin, alors que l’été ne s’est pas encore tout à fait installé : lorsque le temps est maussade, les assistances sont catastrophiques.

Néanmoins, on a adoré notre première expérience. Ce festival est taillé sur mesure pour des mélomanes affamés comme nous et nous a fait courir d’une salle à l’autre toute la fin de semaine. Parions que vous ferez de même dès l’an prochain.