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  • Critique : Janelle Monáe – « The Electric Lady »

    Janelle Monae - Electric LadyDire que Janelle Monae est une artiste talentueuse relève du cliché grossier. Cette jeune femme, qui fait tout pour qu’on se concentre sur son oeuvre, est tout simplement unique, ne serait-ce que par l’étendue de ses influences et de la grande versatilité de son R&B, qu’on classe dans la soul psychédélique (drôle d’étiquette…).

    Son album précédent, The ArchAndroid, avait connu un grand succès critique et commercial. Il était donc normal que sa suite, The Electric Lady, soit plutôt attendu.

    Les attentes sont plus que satisfaites et les rares sceptiques sont confondus. Pendant plus d’une heure, Monae nous fait danser, tripper, sourire, tout en poursuivant là où The ArchAndroid nous avait laissés. Voyez-vous, madame Monae ne pouvait pas se contenter de remodeler la pop, il fallait qu’elle fasse ça dans une série d’albums-concept où The Electric Lady constitue les quatrième et cinquième mouvements. Elle fait une fois de plus appel à des collaborateurs de talent (Prince, Solange, Erykah Badu, Miguel) qui viennent apporter leur touche personnelle.

    C’est bon? Oh, oui! Dès les premières mesures de l’ouverture du mouvement (Suite IV Electric Overture), on est transportés dans un genre d’hybride R&B où le western-spaghetti semble croisé avec de la soul. Elle se paie ensuite le luxe d’une chanson sensuelle remplie de guitares et de… Prince dans Givin’ Em What They Love. Oui, message. Le premier simple, Q.U.E.E.N., avec Erykah Badu, est un bijou d’une grande beauté, et on ne parlera pas de la richesse de l’interprétation!

    La pièce-titre, Electric Lady, interprétée en collaboration avec Solange, qui partage d’ailleurs un grand nombre de qualités avec Monae (dont une grande authenticité), est une autre bombe hybride qui sera un immense succès sur les pistes de danse.

    Parlant d’immense succès sur les pistes de danse, des pièces beaucoup plus lentes comme Primetime (avec Miguel), sensuelles à souhait, mettent le gros plain cochon au goût du jour.

    J’aurais envie de vous parler de toutes les chansons comme je l’ai fait pour d’autres albums, mais il y en a 19, elles sont pas mal toutes excellentes et franchement, je préfère les danser plutôt que les décrire.

    Ce qui importe vraiment, c’est l’interprétation sans faille de Monae et de ses incroyables choristes. Et les guitares électriques. Man, le solo sur We Were Rock n’ Roll! Avec les choristes qui chantent limite gospel…

    Bon, vous comprenez, c’est comme ça jusqu’à la fin. On veut arrêter d’en parler, mais il ressort toujours un petit détail ultra cool. Le ukelele sur Dance Apocalyptic. L’ambiance James Bond sur Look Into My Eyes. Et ainsi de suite. Pendant plus d’une heure.

    Dans un univers pop où tout semble faux et fabriqué, et où les défauts sont corrigés, un long album riche comme The Electric Lady est une petite révolution en soi. Un album que vous allez encore écouter à pareille date l’an prochain.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=tEddixS-UoU&w=480]

    Ma note : offset_9

    Jacques Boivin

    10 septembre 2013
    Albums
    9/10, Critique, Janelle Monae, septembre 2013, The Electric Lady
  • Critique : Volcano Choir – « Repave »

    Volcano Choir - RepaveJustin Vernon a mis Bon Iver sur la glace, le temps de savoir composer avec l’immense succès qu’il a connu. Ça n’a pas empêché ce boulimique créatif de se lancer dans toutes sortes de projets (allant même jusqu’à se partir un petit band de soul-rock – les Shouting Matches – ou à mettre sa main un peu partout sur le dernier Kanye).

    Volcano Choir est un de ces à-côtés de Vernon, un mariage entre le collectif post-rock Collections of Colonies of Bees et le troubadour d’Eau Claire, Wisconsin. Le premier album, Unmap, avait connu un certain succès d’estime et se distinguait quand même pas mal de For Emma, Forever Ago, le premier album de Bon Iver.

    De son côté, le nouvel album, intitulé Repave, semble la suite logique de Bon Iver, tant dans l’atmosphère que dans les instrumentations et la voix de Vernon. Tout y est : la voix de fausset, le plus que parfait mélange d’instruments acoustiques et de synthés, l’atmosphère froide, mais intense. Mais en mieux. Comme si Collections of Colonies of Bees avait donné à Vernon le peu qui lui manquait pour dépasser ses propres limites.

    Ça commence dès les premières secondes de Tiderays. Les premières secondes laissent toute la place à un orgue, qui est rejoint rapidement par une guitare acoustique au son pur et à la voix en plusieurs couches de Vernon. Évidemment, on n’en reste pas là. L’intensité grimpe lentement et on a des frissons quand la chanson se termine. Acetate bouge un peu plus, et il fait bon d’entendre d’autres voix que celle de Vernon dans les choeurs.

    Comrade est du pur Vernon. Couplets ultra-atmosphériques, mais relativement calmes, ce qui ne nous empêche pas de savoir que le refrain va nous en mettre plein la gueule. Les attentes sont plus que satisfaites, on voit nos poils se hérisser instantanément. Émotion pure qui se poursuit sur Byegone, une des pièces les plus solides de l’album, qui se laisse dévoiler lentement pendant que Vernon chante avec un rythme presque Rn’B (écoutez comme il faut et fermez les yeux, vous allez voir le flow, je vous jure!).

    Alaskans est belle comme une soirée d’hiver sur le bord du foyer. Vernon sort sa voix grave (qui ressemble donc à celle de Chris Martin, de Coldplay – peut-être pour ça qu’il préfère chanter en falsetto). Dancepack est une des rares chansons de l’albums qui donne au moins le goût de taper dans les mains pendant que Vernon nous invite à prendre note qu’il y a toujours un trou dans notre coeur. Keel, un autre de ces crescendos dont Vernon a le secret, nous porte à croire qu’un doublé Justin Vernon-Patrick Watson constituerait une soirée parfaite que rien ne pourrait jamais battre musicalement. Rien à redire sur Almanac, une clôture géniale qui résumé très bien l’album.

    Comme le reste de l’oeuvre de Vernon, Repave est un album qui se déguste les yeux fermés, l’attention totalement portée sur la musique douce, mais intense de Volcano Choir. Quand Almanac se termine (beaucoup trop tôt), on a l’impression de sortir d’un rêve teinté de blanc, de froid, de neige. Vernon et ses acolytes poussent encore plus loin la douce mélancolie et ils réussissent à se surpasser, ce qui est une tâche difficile quand on a déjà quelques-uns des plus beaux albums des 10 dernières années derrière la cravate.

    Si Vernon a de la misère à composer avec le succès, il n’a aucun mal à composer de la bonne musique.

    À écouter l’esprit et le coeur ouverts.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=f4dZbJHT7_4&w=480]

    Ma note : offset_9

    Jacques Boivin

    1 septembre 2013
    Albums
    9/10, Critique, Justin Vernon, Repave, septembre 2013, Volcano Choir
  • Critique : Portugal. The Man – « Evil Friends »

    PTMEvilFriends

    Si vous vous rendez au début de ce blogue, vous allez y trouver ma toute première critique, qui est de l’album In the Mountain, in the Cloud du groupe américain Portugal. The Man. On peut dire, tout en demeurant conservateur, que ma critique a été plutôt positive.

    On peut donc dire que j’attendais ce huitième album des ex-concitoyens de Sarah Palin avec impatience. On peut affirmer sans se tromper que John Gourley et ses complices ont visé juste pour ce huitième album en demandant à l’omniprésent Danger Mouse de tenir le rôle du producteur, qui fait sentir sa touche magique un peu partout, et ce, dès les premières notes de Plastic Soldiers, en ouverture.

    Tout d’abord, on y trouve cette mélancolie, cette atmosphère sombre, comme un 15 octobre pluvieux, qu’on a pu entendre dans plusieurs autres projets du célèbre producteur. Quand on connaît le goût de P.TM pour les chansons qui parlent d’ouverture, de soleil, on doit admettre qu’il s’agit d’un contraste à tout le moins intéressant.

    Deuxième changement important apporté par Danger Mouse : Evil Friends est un album tight. Portugal. The Man a souvent eu le réflexe d’enregistrer des pièces riches et complexes à un point tel qu’on se perdait dans le glaçage au lieu de se concentrer sur le gâteau qui se trouve en dessous. Pas cette fois-ci. Les orchestrations superflues sont disparues et on se concentre sur l’essentiel. Ceux qui ont entendu Creep in a T-Shirt peuvent en témoigner.

    En fait, on peut prendre à peu près toutes les chansons de l’album, chacune a sa particularité et ne demande qu’à se faire aimer. La pièce-titre, Evil Friends a un petit côté garage malpropre pas désagréable du tout et Modern Jesus est exactement son contraire, chanson pop aux couplets sages et au refrain chanté en choeur.

    En fait, je pourrais parler de toutes les chansons, dont la sublime Smile, qui ferme en beauté cet album avec le piano et les cordes, mais je ne saurais pas leur rendre justice dans le sens du monde.

    Il s’agit d’une belle évolution pour P.TM. Ils avaient beau avoir tout le talent du monde et avoir enregistré sept albums, il leur manquait encore quelque chose pour percer. Eh ben voilà. Il leur manquait juste un peu de cohésion. Danger Mouse les a aidés à la trouver.

    Si vous aimez votre rock un peu psychédélique, complexe, intelligent et coloré, vous adorerez Evil Friends.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=q5x_YoweEg8&w=480]

    Ma note : offset_9

    Jacques Boivin

    4 juin 2013
    Albums
    9/10, Albums, Evil Friends, juin 2013, Portugal. The Man
  • Critique : Laura Marling – « Once I Was an Eagle »

    LauraMarlingOIWA
    Laura Marling
    Once I Was an Eagle
    (Virgin)
    27 mai 2013

    Difficile de croire que Laura Marling n’a que 23 ans. Once I Was an Eagle est déjà son quatrième album et à l’écoute, on dirait l’album d’une femme qui a beaucoup plus de vécu.

    Celle qu’on compare allègrement aux PJ Harvey et Joni Mitchell de ce monde nous présente un album tout en finesse, tout en folk dans ce qu’il y a de plus pur, et elle nous chante ses amours déçus et sa naïveté brisée avec sa voix toute douce et sa guitare omniprésente, mais souvent bien accompagnée (cordes, percussions) de manière subtile.

    Les seize chansons de l’album de dégustent d’une traite, du début à la fin, comme il se doit quand on a affaire à une personne qui traite ses albums autrement que comme une vulgaire collection de chansons. Pour ceux qui voudraient goûter à Laura sans s’abandonner pendant plus d’une heure, nous vous conseillons Little Love Caster, petit bijou qui résume parfaitement bien l’album et son état d’esprit.

    À ajouter absolument à sa liste de lecture d’été.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=iWQLCOwiLmo&w=480]

    Jacques Boivin

    28 mai 2013
    Albums
    9/10, Albums, Laura Marling, Mai 2013, Once I Was an Eagle
  • Critique : Daft Punk – « Random Access Memories »

    DaftPunkRAM
    Daft Punk
    Random Access Memories
    (Columbia)
    17 mai 2013

    Bon, je suis un peu en retard sur les autres, mais ça s’explique, je ne sais pas du tout comment aborder ce disque. D’entrée de jeu, soyons honnêtes, il s’agit d’un maudit bon disque qu’on va écouter longtemps, ne serait-ce que parce qu’il contient le tube de l’été (la très dansante Get Lucky). Et non, il n’est pas parfait, il traîne même en longueur à certains endroits, mais ce léger désagrément n’entache aucunement le plaisir d’écouter cette excellente proposition qui mérite plus qu’un « j’aime » sur Facebook comme critique.

    Car il s’agit ici d’une oeuvre artistique véritable et complète, un cheminement qui ne se contente pas de suivre une recette bien établie et qui comporte une certaine démarche. Les deux compères français, qui ont déjà révolutionné la musique électronique et donné le ton aux spectacles de DJ à grand déploiement, étonnent de nouveau avec ce surprenant retour aux sources, à la musique funk et disco des années 1970, rempli de vrais instruments tout en étant riche en synthés de toutes sortes, et affichant une belle brochette de collaborateurs.

    Que le fan de musique dansante ne s’inquiète pas, Daft Punk propose toujours d’excellentes pièces pour vous laisser aller le popotin comme la pièce d’ouverture Give Life Back to Music, comme l’indique son intro remplie d’énergie qui explose sur un rythme disco-house qui fait taper du pied et les voix vocodées des deux artistes. Il faut toutefois y ajouter la guitare de Nile Rogers, qui change complètement la donne. Voilà, cet album ne sera pas un ramassis d’échantillonnages (on n’en retrouve que sur Contact), il sera vrai, avec de vrais musiciens.

    Ce vrai, avec de vrais musiciens, on le ressent partout, parfois même au centuple, puisque le duo n’a pas hésité à expérimenter, à ajouter de vraies orchestrations, à faire appel à des ensembles de cordes, à des chorales, dans de nombreuses chansons, dont la sublume Giorgio by Moroder, un bijou de chanson narrée par Giorgio Moroder, un des pionniers du disco et de l’électro. La chanson commence avec un Moroder qui, du bout de ses 75 ans, nous parle de ses premiers pas. Puis une musique aux accents disco se fait ententre alors que Moroder poursuit son entrevue. Puis le séquenceur, dans une espèce de musique hypnotisante qui ne donne d’autre choix que de se laisser aller. Le génie vient plus tard alors qu’une pièce disco se transforme en une puissante envolée musicale qui donne toute la place aux orchestrations et à la rythmique, complètement déchaînée. Cette tempête musicale est un moment marquant de l’album, un point fort de la musique en 2013 qui devrait être examiné plus attentivement par ceux qui dénigraient les gars de Daft Punk parce qu’ils ne faisaient que bidouiller sur des Macs.

    Après un moment plus difficile comprenant la collaboration de Gonzales (jolie, mais qui ne lève pas) et celle de Julian Casablancas (le seul moment « fast forward de l’album »), on entend la voix de Pharell Williams pour la première fois dans Lose Yourself to Dance, un morceau heureux qui ne fait que montrer ce qu’on savait depuis toujours : pas besoin de plus qu’une guitare, une basse, un drum et un gars qui chante en falsetton pour avoir une envie irrésistible de danser. Mais cette danse, elle est organique, elle est naturelle, elle pardonne aux gauches comme moi. 😉

    On a eu le point fort, voilà maintenant le sommet émotif de l’album : la pièce Touch, une collaboration avec l’auteur-compositeur Paul Williams, va dans toutes les directions tout en gardant un fil conducteur. La chanson s’écoute comme on lit un livre, elle se savoure lentement avec tous ses mouvements, sa partie rock, sa partie chorale, sa partie frissons. Il m’a semblé que des gars comme les membres d’Harmonium n’auraient pas renié ce genre de pièces, qui s’intègrent parfaitement à la fin des années 1970 qu’elles tentent d’émuler.

    Le parfait bonheur continue ainsi jusqu’à la fin de l’album et se promène entre les collaborations avec Panda Bear et Todd Edwards (Fragments of Time, sortie tout droit d’un album de Hall and Oates) tout en demeurant un tout cohésif. La dernière pièce, Contact, se trouve elle aussi parmi les bons moments musicaux et devrait être absolument sublime en spectacle.

    On regrette un peu la relative faiblesse de la première partie de l’album, où Giorgio by Moroder trône un peu trop seul parmi les bons moments. Cependant, dans l’ensemble, il s’agit d’un pari tout à fait réussi pour Daft Punk, qui réussit à se démarquer de ses compères Justice et Phoenix tout en se rapprochant, dans l’esthétique et dans les émotions, d’un autre duo français diablement influent : Air.

    Un jour, on remerciera Daft Punk d’être sorti aussi loin de sa zone de confort.

    Jacques Boivin

    24 mai 2013
    Albums
    9/10, Critique, Daft Punk, Mai 2013, Random Access Memories
  • Critique : Patrick Watson « Adventures in Your Own Backyard »

    Patrick Watson
    Adventures in Your Own Backyard
    (Secret City)
    17 avril 2012

    Dans la vie, on croise deux genres de groupes : ceux qui passent leur temps à se renouveler (et à se perdre) et ceux qui peaufinent leur art jusqu’à ce qu’ils le maîtrisent parfaitement. Dans cette deuxième catégorie, on a trop souvent des groupes qui tombent trop facilement dans la redite, puis on a Patrick Watson.

    Dès les premiers accords (de piano) de Lighthouse, on sait très bien à qui on a affaire. Les membres du groupe ne nous réservent pas vraiment de surprises (sauf cette petite saveur sud-américaine qui apparaît çà et là), se contentant plutôt de nous offrir des chansons incroyablement belles, qui s’écoutent un brin d’herbe au bec.

    Ces chansons, Watson les chante joliment avec sa voix de fausset et les membres du groupe les jouent avec un plaisir contagieux. On devient accro très rapidement à des bijoux comme Quiet Crowd ou Words in the Fire.

    Adventures in Your Own Backyard sera sans aucun doute un des albums les plus écoutés cet été chez les fans de pop indé. Il est parfait comme musique d’ambiance et en écoute active, c’est exactement le genre d’album qui fait rêver.

    Ne reste qu’à souhaiter leur passage au Festival d’été!

    [youtube=http://www.youtube.com/watch?v=IgyLgbGEi_k&w=320]

    Jacques Boivin

    15 avril 2012
    Albums
    2012, 9/10, adventures in your own backyard, avril, indie pop, patrick watson
  • Critique : Ariane Moffatt « MA »

    Ariane Moffatt
    MA
    (Mo’Fat/Audiogram)
    27 février 2012

    MA, quatrième album de nouvelles compositions de l’auteure-compositrice-interprète-bidouilleuse electro-pop la plus connue au Québec, était attendu, c’est le moins qu’on puisse dire.

    Est-ce que dame Ariane satisfait à ces attentes? Ça dépend… si ce qui vous plaît chez elle, c’est son côté Poussières d’ange, désolé, eh ben vous allez être déçus. Si, pour vous, Ariane Moffatt c’est Jeudi 17 mai ou Farine Five Roses, procurez-vous ce disque à tout prix.

    Album bilingue, fignolé presque à 100 % par Ariane Moffatt en solo (par là, je veux dire qu’elle a écrit les paroles, composé les musiques, joué les instruments, joué aux réalisatrices et aux productrices presque toute seule – soyons francs, on peut difficilement avoir plus indé que ce disque), MA est un des meilleurs albums que j’ai entendus ces derniers mois. Et vous savez que de bons albums, il en est passé entre mes deux oreilles.

    Je me demande tout de même pourquoi elle a osé écrire la moitié des chansons de l’album en anglais. Surtout qu’elle arrive à faire groover notre langue comme personne d’autre n’est arrivé à le faire auparavant. Mon corps est un bijou sur le plan de la langue. Ça prend un talent fou pour arriver à avoir un débit aussi fluide avec une langue qui est faite pour être parlée et écrite, mais qui a tant de mal à être chantée. Le refrain de La pluie et le beau temps va s’incruster dans la tête d’à peu près tout le monde comme le pire des vers d’oreille… « On ne parle jamais trop de la température / La pluie et le beau temps, c’est pas banal ». Tout ça dans une ambiance urbaine, électronique, jeune qui ne se trouve généralement qu’en anglais.

    En même temps, il faut admettre que ces chansons en anglais sont des chansons fichtrement bien foutues qui n’ont ab-so-lu-ment rien à envier à qui que ce soit sur la scène indie. Oui, en anglais, on a l’impression que c’est moins original, surtout si on est, par exemple, fan de Goldfrapp, qui joue dans des registres semblables quoique plus éthérés. On reconnaît quand même la griffe d’Ariane sur ces chansons.

    Sur le plan musical, eh ben voilà. C’est de l’électro-pop au goût du jour, savamment arrangé et orchestré, pimenté de toutes sortes d’instruments et d’effets que je ne nommerai pas, parce que je n’ai pas que ça à faire. Hotel Amour, qui commence tout doucement avec ses synthés et finit avec beaucoup de rythme et des arrangements des plus complexes, constitue un excellent exemple.

    Le plus admirable, c’est qu’il n’y a, à vrai dire, aucune redondance d’une chanson à l’autre. Chacune a son rythme, son son, son histoire, ses mots, sa chaleur ou sa froideur. Et ça, c’est une grande qualité.

    Bon, voilà, il y a longtemps qu’un album ne m’a pas fait autant parler… vous aurez compris que j’ai beaucoup apprécié. Que j’y aille avec mon coeur ou avec ma tête, je dois concéder qu’Ariane Moffatt nous donne, avec MA, un grand album, probablement le plus grand album pop québécois de la présente génération. Conformément à ma politique, je ne lui donnerai pas une note de 10. Pas tout de suite. On va attendre un peu voir si, avec du recul, cet album est aussi génial qu’à ses 3-4 premières écoutes.

    Maintenant, ne reste plus qu’à souhaiter que cet album influence toute une nouvelle génération d’artistes qui, comme Ariane Moffatt, auront envie de repousser encore plus loin les limites de la pop au Québec.

    [vimeo=http://vimeo.com/37378034 w=320]

    Jacques Boivin

    27 février 2012
    Albums
    9/10, ariane moffatt, Critique, février 2012, ma
  • Critique : Marie-Pierre Arthur « Aux alentours »

    Marie-Pierre Arthur
    Aux alentours
    (Bonsound)
    7 février 2012

    Il y a des albums qui, comme Aux alentours, font du bien. Le deuxième album de Marie-Pierre Arthur, aux sonorités franchement indie folk, est tout simplement une réussite sur toute la ligne.

    Album fortement inspiré par les années 1970 (les premiers accords de Pour une fois semblent introduire… My Sweet Lord), Aux alentours est un album léger, lumineux, bien écrit à quatre mains (Gaële collabore encore une fois aux textes) et bien interprété.

    Il faut d’ailleurs souligner l’excellent travail des musiciens qui accompagnent l’auteure-compositrice-interprète et qui lui confèrent ce son à la fois si familier tout en étant particulier. François Lafontaine, son chum et aussi claviériste de Karkwa, l’a aidée à la composition. Les guitares d’Olivier Langevin et la batterie de Robbie Kuster apportent un petit côté trash à l’ensemble, et on retrouve aussi, parmi les collaborateurs, Louis-Jean Cormier, Julien Sagot et José Major.

    À souligner plus particulièrement, même si les dix pièces sont toutes excellentes : les 4-5 premières chansons sont absolument béton et forment une séquence qu’on ne peut tout simplement pas arrêter. All Right, avec son côté gospel, a une joie de vivre contagieuse. En fait, cet album est l’album d’une jeune mère heureuse, et ça paraît.

    Alors? Il n’y a qu’une chose à ajouter : procurez-vous cet album. Il sera encore près du lecteur à pareille date l’an prochain. Parce qu’autant de bonheur sur une galette de plastique, on peut difficilement s’en priver.

    [bandcamp width=100% height=120 album=1338568002 size=large bgcol=ffffff linkcol=e99708 tracklist=false artwork=small]

    Jacques Boivin

    26 février 2012
    Albums
    2012, 9/10, Albums, aux alentours, février, marie-pierre arthur
  • Critique : Feist « Metals »

    Vous avez ce rendez-vous avec une femme superbe, que vous avez déjà vue à quelques reprises. Les premiers rendez-vous étaient particulièrement réussis et vous avez trouvé un grand nombre d’atomes crochus avec la femme en question. Tout d’abord, elle était d’un naturel désarmant, ce qui est plutôt rare de nos jours. Vous avez apprécié sa douceur, qu’elle soit sérieuse ou qu’elle montre sa joie de vivre. Et quelle joie de vivre! Elle était fan des Bee Gees, aimait bien les marionnettes de Sesame Street et n’hésitait jamais à faire quelques pas de danse sur le tapis roulant de l’aéroport. Toutes les couleurs, les plus vives comme les plus neutres, lui allaient bien. On n’a même pas commencé à parler de sa passion!

    On comprendra donc que ce rendez-vous imminent, vous l’attendez depuis longtemps. Votre coeur commence à battre un peu plus vite, un peu plus fort. Votre souvenir des premiers rendez-vous est si positif, si intense, vous ne voulez pas être déçu. Surtout pas.

    Elle vous joue un tour. Elle arrive un petit peu plus tôt que prévu. Vous la voyez dans le judas de la porte. Elle est tout simplement magnifique. Elle s’est habillée d’une manière assez sobre, mais malgré tout, elle est d’un chic fou. Vous ouvrez et lui souriez timidement. Elle retourne votre sourire avec l’assurance de celle qui en a vu d’autres. Malgré tout, vous remarquez que quelque chose a changé chez la jeune femme. Un brin de mélancolie teinte son regard et ses propos, qui sont pourtant toujours lancés avec autant de passion et de vigueur. On sent chez elle une fragilité qu’elle cachait bien auparavant.

    Vous prenez vos affaires, et vous sortez. Vous marchez, main dans la main. Elle se dévoile, elle se raconte, elle se met à nu. Malgré cette mélancolie qui entoure ses paroles, impossible de faire semblant de ne pas voir sa chaleur. Elle est là, elle est tout près, vous pouvez sentir son souffle. Ce petit bout de perfection appuie sa tête sur votre épaule et vous êtes bouleversé.

    Malgré cette mise à nu, elle ne tombe pas dans l’indécence gratuite. Ce qu’elle veut, c’est votre coeur. Elle l’a depuis longtemps, mais là, elle va l’avoir pour un bon bout de temps.

    Vous la prenez dans vos bras et vous dansez, seuls, dans la pénombre, au milieu de nulle part. Bien que la nuit soit fraîche, vous ressentez cette flamme qui brille et réchauffe vos coeurs. Vous aimeriez que ce moment s’étire, qu’il ne se termine jamais. Heureusement, votre baladeur est muni d’une touche répétition. Vous allez en avoir besoin au cours des prochains jours.

    Écouter How Come You Never Go There :
    [soundcloud url= »http://api.soundcloud.com/tracks/20887905″ params= »show_comments=false&auto_play=false&color=ff7700″ width= »100% » height= »81″ ]

    Feist – « Metals » (Arts and Crafts)
    (en vente le 4 octobre prochain – en spectacle le 3 décembre au Métropolis de Montréal, le 5 décembre au Centre national des arts d’Ottawa et le 6 décembre au Grand théâtre de Québec)

    On donne :

    (9/10)

    Remarque : J’aimerais demander pardon à tous mes lecteurs qui préfèrent une critique claire et nette. Mais bon, vous comprendrez que je perds un peu mon sens critique quand il s’agit de Feist. Fallait que je dise les choses autrement. 🙂

    Jacques Boivin

    27 septembre 2011
    Albums
    9/10, Critique, Feist, Metals, Septembre 2011
  • Critique : Wilco « The Whole Love »

    Exception faite des galettes de St. Vincent (déjà disponible) et Feist, peu de disques sont aussi attendus cet automne que le huitième disque de Wilco, The Whole Love, qui sera sur les tablettes de tous les bons (et moins bons) magasins dès le 27 septembre. J’ai profité du fait que le groupe l’a mis en diffusion sur son site Web pendant le week-end de la Fête du travail pour l’écouter en boucle.

    L’attente en vaut vraiment la peine. Ce n’est pas un Yankee Hotel Foxtrot (leur grande oeuvre, qui a failli ne jamais voir le jour), mais en s’éloignant de la pop adulte très conventionnelle des deux derniers albums, le groupe nous offre matière à de nombreuses écoutes et réflexions, tant sur le plan des paroles que de la musique.

    Ceux qui sont entrés dans le train avec Wilco (The Album) risquent d’être un brin déroutés par la première chanson de l’album, Art of Almost, qui marque le ton d’une manière très éloquente : oui, la chanson commence tout en douceur et s’écoute presque en fermant les yeux, mais au cours des sept minutes qui suivent, elle progresse pour se terminer par un solo de guitare endiablé qui montre que Nels Cline (qui n’était pas là à l’époque de YHF) a décidé qu’il avait autant envie de rocker que de jouer du country.

    La pièce titre, qui suit, est justement une chanson country-folk des plus typiques. Et on se promène, comme ça, d’un genre à l’autre, tout en ne perdant jamais son identité, tout en demeurant près de ses racines, mais en continuant d’explorer et d’innover. On a parfois l’impression d’entendre Pink Floyd avec des chapeaux de cow-boy! Ou Dylan en quadriphonie!

    Côté paroles, Jeff Tweedy est un auteur accompli, qui a parcouru énormément de chemin depuis Uncle Tupelo. L’americana au sens large demeure un genre qui donne énormément de place aux paroles. Tweedy n’est peut-être pas, à mon avis, un conteur aussi talentueux qu’un M. Ward, mais quand on écoute du Wilco, on a envie d’écouter les paroles, d’entendre la petite histoire qui nous est racontée. One Sunday Morning, qui dure 12 minutes (oui, j’ai bien écrit douze minutes, ce n’était pas une faute de frappe), est une superbe ballade (au sens poétique du terme), que la musique agrémente de façon majestueuse. À elle seule, cette pièce vaut le détour. Elle va faire école.

    Je pourrais parler de chacune des pièces de l’album et vous donner tout autant de raisons différentes de l’aimer. Il suffit pourtant de dire The Whole Love fait partie des excellents disques de l’année, avec les Let England Shake de PJ Harvey et In the Mountain, In the Could de Portugal. The Man. Est-ce un nouveau chef-d’oeuvre pour la troupe de Chicago? Seul le temps nous le dira, mais on peut déjà dire que quelques chansons, elles, nous marqueront encore longtemps.

    Dire qu’ils étaient à Montréal hier…

    Wilco – « The Whole Love » (dBpm Records) – en vente le 27 septembre

    On donne :

     (9/10)

    Jacques Boivin

    19 septembre 2011
    Albums
    2011, 9/10, Critique, septembre, the whole love, wilco
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