La deuxième moitié de saison des Apéros FEQ débutait jeudi dernier au District St-Joseph. Alexandra Lost, projet électro-pop de Jane Ehrhardt et Simon Paradis, a plongé l’auditoire dans une mer synthétisée. Accompagnée par Hugo Le Malt, la formation a offert son premier single Stranger Game en début de prestation. Une heure de musique planante qui nous a fait voyager dans le passé, quelque part entre les années 80 et 90.
La beauté d’Alexandra Lost prend son essence dans les ambiances new wave et se peaufine par le vocal grave mais ô combien paisible de Jane. D’ailleurs, pour les pièces Towers et Fleeting Dance, elle récite des intros quasi subliminales qui collent drôlement bien à leurs musiques. Chaque chanson est une sorte d’épopée parfois disco, tantôt ambient. On ressent une certaine répétition aux claviers qui donne un fil conducteur à leurs variations. Quelques morceaux avaient des cadences ralenties qui rappelaient le downtempo anglais. Sans manquer d’originalité, ils explorent aussi le blues et Le Malt se paie même un solo de guitare dans le processus.
«I’ve been trying to wake up
from this dream I had»
Extrait que j’ai noté de Trying to grow où la voix d’Ehrhardt est particulièrement envoutante et ce, même sur une trame accélérée. Au final, un apéritif concocté avec brio pour la formation qui en était à son quatrième spectacle depuis sa création.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le trio entame bien 2018!
Prochain apéro FEQ : jeudi 18 janvier avec Lou-Adriane Cassidy
Gaspard Eden nous a entraînés au confluent des arts jeudi dernier : à l’occasion de son vernissage, l’artiste aux multiples visages offrait une performance musicale pour le moins psychédélique.
Accompagné par Alexandre Martel au synthé et vêtu d’habits dignes des prophètes du désert, Eden a rapidement installé une ambiance envoûtante à coup de sitar, d’encens, de cierges et de lumières tamisées. Le spectacle était certes bien captivant, mais la musique faisait surtout la part belle à l’art en se mettant à son service. Comme de fait, l’atmosphère lourde et voluptueuse qui se dégageait du duo semblait donner vie aux œuvres accrochées sur les murs.
Visuellement, l’expérience Gaspard Eden a quelque chose de sucré et de tordu à la fois, de profondément psychédélique en soi. La répétition incessante de motifs et les thèmes qui se communiquent d’un tableau à l’autre nous plongent dans cet univers qui, aidé par l’ambiance, faisait l’effet d’une expérience altérée de la réalité. Un univers fait de chairs qui fondent – trop organiques – de formes géométriques déformant ou stéréotypant l’usuel, de couleurs saturées et répétées, de symboles et de leitmotivs. Difficile, à travers cet ensemble, d’identifier les influences artistiques, qui doivent sans doute passer de l’héraldique médiévale aux figures anonymes de Keith Haring en passant par les profondeurs torturées des préraphaélites.
S’il y a une conclusion à tirer de l’événement qui, pour le moins qu’on puisse dire, a attiré une foule de curieux, c’est bien que Gaspard Eden, tout en décloisonnant les possibilités, se présente comme un tout cohérent à la recherche de sa logique interne.
C’est en train de devenir une tradition. Orloge Simard et ses musiciens nous ont conviés à un party de fin d’année, cette fois à l’Impérial Bell, et nous ne pouvions refuser cette invitation. Après tout, ce n’est pas tous les jours qu’on peut assister à une telle grande messe avec quelques centaines de fidèles!
Faut dire que les fans d’Orloge sont motivés et ça, on a pu le remarquer assez rapidement : il a fallu traverser un nuage de boucane encore criminelle pour quelques mois avant d’entrer dans un Impérial où quelques fans motivés chantaient déjà les chansons du groupe plus d’une demi-heure avant… la première partie!
Parlant de première partie, c’est Pass qui a ouvert le bal en nous promettant de jouer « jouer du rock and roll ». Yes! Good. Une foule déjà bien réchauffée va se faire chauffer à bloc. Ça commence bien entendu avec du rock, teinté de blues, axé sur les guitares, qui ne manque pas d’entrain. Y’a même un petit accent du Sud! Tant qu’à se réchauffer, pourquoi ne pas ajouter quelques teintes de reggae? Et un brin de ska? Le mélange se fait très bien, les jeunes en bas skankent joyeusement, Pass a réussi à faire monter l’enthousiasme de quelques coches, ce qui n’était pas évident dans les circonstances (un public vraiment là pour Orloge, qui a continué à le montrer pendant l’entracte).
Quand le groupe baieriverain est monté sur scène, j’ai cru que le plafond de l’Impérial Bell allait exploser (ce qui n’aurait pas été une très bonne idée, compte tenu du froid glacial qui sévissait dehors). Le dispositif scénique est fort simple, mais efficace : le drapeau du Royaume hissé bien haut, quelques guirlandes de lumières, deux beaux sapins de Noël et beaucoup de cadeaux. Les membres du groupe portaient tous un beau pyjama de Noël et un maquillage à la Kiss tandis qu’Orloge avait un costume coordonné. D’ailleurs, de nombreux fans (dont notre photographe) avaient décidé de faire de même (maquillage inclus), ce qui ajoutait bien entendu du piquant à une soirée qui allait être assez… sale (d’ailleurs, on avait renforcé la sécurité).
Dès les premières notes de Cabane à pêche, un joyeux moshpit se forme. Faut dire que ça commence fort avec un ver d’oreille juste assez grivois pour être chanté en choeur. On se croirait dans une version trash d’un show des Cowboys Fringants! Ça chante aussi fort et avec autant de passion. Même côté « grande célébration »!
Organic Music suscite une réaction semblable. Le blues-rock psychédélique à l’accent du Saguenay fait danser la foule qui scande le refrain avec le band. Le claviériste bondit déjà sans cesse en se faisant aller les dreads. On a à peine quelques tounes derrière la cravate, tout le monde communie déjà!
Évidemment, La rue Bagot, qui mélange habilement l’esthétique folk sale et le ska endiablé, connaît un succès explosif! Du haut de mon nuage de boucane (celle du monde en bas, pas la mienne), je regarde les pyjamas se rentrer dedans joyeusement en créant de grosses éclaboussures de bière (le plancher doit être glissant).
Pendant ce temps, le claviériste fait des jumping jacks et le reste du band s’amuse ensemble. Orloge harangue la foule (comme si elle en avait besoin!). Tout à coup, les musiciens se mettent à lancer des cadeaux, certains parfois très loin!
Le spectacle se poursuit dans la même bonne humeur (on euphémise) jusqu’à la toute fin, où le claviériste déballe son cadeau de Noël préféré : un orgue! Qu’il s’empresse de… détruire, bien entendu! Les mélomanes crieront au sacrilège, mais le public, lui, est juste trop heureux de s’être bien défoulé lui aussi!
C’est un peu ça, un show d’Orloge Simard : tout le monde sur le party, de bonne humeur, qui s’amuse (très) ferme en dépensant au moins autant de calories qu’il en consomme (c’est-à-dire beaucoup). Qu’on aime ou non le côté vulgaire de l’aucuncadrisme préconisé par ces êtres d’outre-Parc, il est évident que sur une scène, ces gars-là savent y faire. À voir l’air satisfait des spectateurs à la sortie de la salle, il est évident que je ne suis pas seul à le croire…
On vient tout juste d’annoncer les participants à la 8e édition du Cabaret Festif! de la relève qui se déroulera à Baie Saint-Paul les 27 janvier, 17 février, 10 mars (Cabaret de la Maison Otis) et 31 mars (Salle multi de l’Hôtel Germain) prochains. Et on va se le dire tout de suite, cette huitième édition est des plus relevées!
Rappelons que les participants courent la chance de remporter des prix et des bourses dont la valeur totale est de 15 000 $. En plus des grands prix du jury et du public, divers acteurs (diffuseurs, festivals, médias – dont ecoutedonc.ca) offriront aux finalistes des prestations rémunérées un peu partout dans la province.
Les douze participants ont été sélectionnés parmi plus de 120 candidatures par un jury composé d’une douzaine de professionnels de tous les racoins de l’industrie. On nous a dit que les choix n’étaient pas toujours faciles étant donné la grande qualité des projets soumis.
Regardons un peu ces artistes et ces groupes qui donneront leur 110 % pour se mériter une place en finale :
27 janvier
De la Reine : Menée par la douce voix d’Odile Marmet-Rochefort, la formation De la Reine propose une pop intelligente et sensuelle, un brin groovy, mais toujours divertissante. Si vous ne connaissez pas le groupe, vous pouvez consulter les nombreux articles que nous avons écrit sur le sujet ou tout simplement écouter leur (excellent) album.
Les Monsieurs : La formation joliettaine a lancé l’automne dernier un album réalisé par un certain Placard. Le groupe propose un rock très funky et fuzzé, des paroles engagées et un petit je-ne-sais-quoi qui nous rappelle le bon vieux temps des Colocs… sur l’acide.
The Johans : Deux filles de Québec qui font du folk avec une guitare et un banjo. Plus près du folk du Sud américain que du folk introspectif qui a dominé la scène musicale ces dernières années, voilà un projet rempli de promesses.
Laura Babin : La jeune auteure-compositrice-interprète montréalaise avait déjà attiré notre attention avec son EP Water Buffalo (y’a que le titre qui est en anglais). Babin nous fait voyager dans son univers avec ses mélodies originales et ses arrangements aériens.
17 février
Artifice Palace : Le quatuor montréalais se promène entre ballades atmosphériques et guitares distordues à fond. Un des projets les plus « champ gauche » avec ses sonorités uniques. On est ben curieux de voir ça live. En attendant, on peut écouter l’album Rusty Flowers pour avoir une meilleure idée de ce qui nous attend.
Jessy Benjamin : Le jeune auteur-compositeur-interprète nous présentera ses chansons indie-folk sympathiques et très organiques. On devrait avoir quelques chaudières d’authenticité dans la face.
Natation : Ah ben voilà le groupe qui se chargera de faire danser le public en cette soirée de février! Natation, c’est du rock dansant bilingue, qui sonne parfois comme du Franz Ferdinand à qui on aurait ajouté quelques sonorités eighties. C’est simplifié à l’extrême, mais ça ne change rien : vos fesses vont se décoller de vos chaises! Faudrait peut-être plonger dans Divepour avoir une meilleure idée!
Joey Robin Haché : Depuis le temps que j’entends parler de ce jeune (les Acadiens aiment ben ça nous ploguer leurs comparses quand on jase avec eux), il est temps que je le voie. Haché, c’est un heureux mélange de folk-rock tantôt doux, tantôt entraînant, avec des textes fort intéressants. À surveiller.
10 mars
Caterino : Des chansons aériennes aux textes contemplatifs, voilà ce qu’offre l’auteure-compositrice-interprète Caterino (Catherine-Audrey Lachapelle). Avec quelques accents western.
É-T-É : Avec É-T-É, on va se replonger dans la musique un peu plus traditionnelle, axée sur les cordes. Il s’agit de la formation la plus enracinée dans notre terroir parmi les participants. C’est fort bien fait, mais est-ce que le groupe réussira à séduire le public?
Perdrix : Un brin de sarcasme dans les paroles, un peu (beaucoup) de garage dans la musique, des mélodies accrocheuses, gageons que vous ne serez pas capables de vous empêcher de crier HASHTAG avec le groupe!
Pour en savoir plus sur le Cabaret (horaire, comment se rendre, billets), consultez le site Web!
Le groupe local Caravane organisait cette année encore un événement spécial pour rendre gloire à notre sauveur : le rock. Comme toute bonne messe de minuit, le spectacle de jeudi dernier eut lieu dans une église et c’est ainsi que le décor à saveur baroque de la Nef ajouta au charme décadent de ce moment fort en intensité.
Mort Rose
La grande célébration commença avec le pop rock grivois de Mort Rose. Revisitant le répertoire rock, blues et même calypso, les quatre musiciens présentaient des pièces entraînantes et colorées par le discours équivoque – et parfois bien direct – du chanteur.
Les spectateurs massés devant la scène ne résistèrent pas longtemps au charme langoureux de cette musique qui fit la gloire d’Elvis. Et plus la prestation avançait, plus le groupe nous faisait découvrir la variété de ses inspirations musicales et l’enthousiasme de ses membres sur scène. Une belle façon de nous faire oublier la température subsibérienne!
Harfang
Après cette joyeuse entrée en matière, ce fut au tour de Harfang de réchauffer les cœurs. Étant donné le nombre de spectateurs qui ne semblaient pas les connaître, le groupe a dû passer en mode séduction. Qu’à cela ne tienne, ils ont relevé ce défi avec brio.
En guise de préliminaires, ils se sont lancés dans leurs pièces les plus lumineuses. Fly away et Wandering ont servi de premier contact, mais c’est vraiment avec Stockholm que le groupe a pris son envol. Il était fascinant de voir avec quelle énergie et quelle intensité les musiciens s’impliquaient dans chacune de leurs pièces, qu’elle soit plus rock, plus folk ou plus introspective.
Caravane
L’heure avançant, on se rapprochait de plus en plus du minuit fatidique de la messe. Caravane, les rockeurs de la Vieille Capitale, se sont chargés de nous livrer la pièce de résistance… et quelle performance ! Il faut le dire, ils ne font pas le bon vieux rock à moitié. Alors qu’on attendait que les musiciens montent sur scène, l’organiste se lança dans un préambule endiablé, après quoi le groupe a balancé pièce sur pièce un rock teinté de blues aux mélodies accrocheuses et aux textes que scandait fréquemment le public.
Plusieurs moments forts se sont démarqués des méandres musicaux dans lesquels les musiciens nous ont plongés. On a particulièrement pu apprécier les soli endiablés de Guillaume Méthot, qu’il nous livrait à genoux comme une offrande. L’intensité du chanteur – qui hésitait ni à se barbouiller le visage ni à se mêler aux foules pour le rock – avait de quoi capter l’attention. Finalement, le groupe a offert en cadeau une superbe reprise de I Want You des Beatles qui n’a laissé personne indifférent, pas même les apôtres ni les évangélistes qui nous regardaient du haut du plafond de la Nef.
Le pari était énorme pour Gabrielle Shonk et Lou-Adriane Cassidy : Faire le Grand Théâtre de Québec, avec un album ou un single à son actif. Il a été payant pour les deux artistes, car la salle était presque pleine. Voici un résumé d’une soirée haute en émotions.
Lou-Adriane Cassidy est une de mes découvertes de 2017. Son single Ça va, ça va, m’a profondément touchée et j’avais hâte de la voir sur scène. Qu’est-ce qui la distingue de toutes les voix que l’on peut entendre à la radio? À mon avis, c’est la sensibilité à fleur de peau que l’on retrouve dans ses paroles. C’est aussi cette voix chaude et soul qui la caractérisent. Elle en a même profité pour nous faire une nouvelle chanson.
J’ai eu un coup de coeur pour la chanson que les Soeurs Boulay lui ont composé, qui est inspirée de sa vie. Elle était aussi accompagnée du talentueux Simon Pedneault. Le musicien, qui n’a pas besoin de présentation, n’a pas hésité à ajouter sa couleur aux compositions de Lou-Adriane. C’est la pièce Ça va, ça va qui a clôt le spectacle.
Accueillie d’une salve d’applaudissements, Gabrielle Shonk est entrée sur scène en territoire conquis. L’auteure-compositeur-interprète était aussi à la maison. Jessy Caron (basse et guitare), Simon Pedneault (guitare acoustique et électrique), Gabriel Desjardins (claviers) et Pierre-Emmanuel Beaudoin (batterie) l’accompagnent. Une réelle chimie opère entre les musiciens et Gabrielle Shonk. L’auteure-compositrice-interprète, qui est aussi une de mes découvertes de 2017, m’a fait vivre plusieurs émotions.
Gabrielle Shonk a agrémenté son spectacle de plusieurs reprises en plus de jouer son album en totalité. Autour d’un micro, la reprise de Joni Mitchell de Both Sides Now et la réédition de la chanson Pars plus sans moi m’ont donné des frissons. Peter Shonk a aussi partagé la scène avec sa fille pour jouer de l’harmonica sur la pièce The Cliff. La reprise que Gabrielle Shonk a faite de la pièce Fast Car a gagné en profondeur depuis la dernière fois que je l’ai vue sur scène. Gabrielle Shonk et Lou-Adriane Cassidy se sont partagé un micro pour reprendre avec brio Je suis venu te dire (que je m’en vais) de Serge Gainsbourg. Pour finir son spectacle avec brio, Gabrielle Shonk et son groupe ont fait Sidewalks, qui m’a émue profondément.
Les talents de tous ceux et celles sur scène m’ont réchauffé le coeur. Autant Lou-Adriane Cassidy que Gabrielle Shonk et ses musiciens ont gagné le pari de remplir le Grand Théâtre. Si jamais Gabrielle Shonk ou Lou-Adriane passe par chez vous, c’est vraiment à voir. Ces deux femmes ont du talent brut combiné.
EXTRA :
On a pris de belles photos du lancement de Gabrielle cet automne, mais on n’avait pas eu l’occasion de les publier. Comme on n’avait pas de photographe au Grand Théâtre le 14 décembre dernier, on s’est dit que ça serait le bon moment pour les sortir!
Hé oui! C’était bel et bien le dernier chapitre de la saga Love Suprême, tournée du charismatique MC Koriass. Pour cette clôture en sol limoilois, Korey était précédé par KNLO, ce fameux post-rigodoneux. Clin d’oeil à Watts et son rap/rock, chargé de mettre la table avant l’arrivée des principaux intéressés.
Remerciements spéciaux à Jacques Boivin d’avoir prêté son talent de photographe pour le «rap jeu» et à Sabrina Martin pour ses notes dans mon calepin de gribouillis.
KNLO
Que ce soit en solo ou collectivement avec Alaclair Ensemble, on doit s’attendre à un moment groovy quand KNLO est dans les parages. Pour l’occasion, M. Craquenuques s’est entouré de la famille. En compagnie de Caro Dupont et Sev Dee (K6A), Ogden alias Robert Nelson est monté sur scène pour compléter B.B.I.T.C. «On représente Hochelaga, Ste-Foy, Limoilou, le Bas-Canada» s’écria Akena avant l’excellente justecayinque. L’auditoire se dégourdissant les jambes tranquillement, on a eu droit à une panoplie de belles chorégraphies des artistes. Principalement sur Tabac Indien dont l’exécution était digne d’un cours de zumba. Par la bande, il a poursuivi avec un bel hommage à la métropole et à son pote Lou Phelps sur Ville-Marie. Personnellement, mon petit velours de la prestation fut clairement Merci alors que mademoiselle Dupont l’accompagna à la flûte traversière. Non, Eman n’y était pas pour sa partie, mais on ne peut pas toujours beurrer notre pain avec du caramel à l’érable. Une perfo déconstruite parsemée de freestyles sortant drôlement de l’ambiance créée sur sa galette Long jeu.Un honnête prélude pour l’arrivée du deuxième «K» de la soirée.
Koriass
Après presque deux ans à répandre le love suprême aux quatre coins de la province et même en France, Emmanuel Dubois a choisi son quartier de résidence pour clore cette belle tournée. Pour ma part, il s’agissait de ma troisième séance de «cœurs avec mes deux mains» et la plus intime sans aucun doute. Malgré la proximité, on ressentait une réticence du public sur quelques chansons et Korey ne s’est pas caché pour le mentionner. Malgré tout, la marchandise a été livrée d’une main de maître par Koriass et ses musiciens. D’entrée de jeu, on a été frappé au visage par l’incisive Pardon. Ensuite, la foule a été particulièrement captivée par Zombies, cette hymne ou critique sociale aux milles et une références. Se sont succédé par la suite Nulle part, Sorry, Endurance et Légendaire. Constat après cet enchainement, «Korey Hart» n’a pas oublié son flow à la maison. Par la suite, on a fait notre «baby shower dans un after hour» sur la version modifiée de Blacklights. Nous sommes allés dépenser nos «comptes épargnes sur des onces de Jack» sur la puissante Devenir Fou issue de Rue des saules.
Le MC s’est permis quelques courtes pauses pour des anecdotes de famille, ainsi que sur son entourage dans le quartier. À la quête d’une serviette par cette chaleur accablante, il continua avec «ouvre ta fenêtre» et son gag d’en ouvrir une au même instant. Toujours près de son public, il a l’habitude d’amener un fan sur scène pour rapper avec lui. Cette prestation à la frontière de Limoilou et Vanier ne faisait pas exception à la règle. Belle récompense et expérience pour cet amateur particulièrement attentif comparativement à certains de ses homologues.«Est-ce qu’il y a des enfants de l’asphalte dans la salle ici ce soir?». Difficile d’imaginer une meilleure fin que celle-ci, avec ce titre phare de son répertoire. Simulant un rappel, il cracha une deuxième fois pardon, cette fois, sans instruments et sur un rythme effréné.
Soulignons la perfomance de Gabriel «Gabou» Lajoie à la basse, de DJ Nerve aux platines et le travail de son, pas toujours simple, de Gregory Carrier Bonneau.Somme toute, La Source de La Martinière aura été théâtre d’une représentation finale non sans embuches, mais plus que satisfaisante.
Sur ce, attendons son prochain matériel de pied ferme et d’oreilles impatientes!
On le sait déjà, toutes les fêtes deviennent magiques lorsque Gab Paquet et sa bande en prennent le contrôle. Cette année, c’est une véritable messe de minuit qui a eu lieu au Cercle le 14 décembre dernier. Le groupe présentait son spectacle pour une dernière fois en 2017 dans le cadre d’une mini-tournée de trois jours organisée par Le Pantoum. Et du monde, il y en avait à la messe !
Miss Sassoeur & les Sassys
C’est devant un Cercle bien plein que le lauréat du prix ecoutedonc.ca du Cabaret Festif – et, accessoirement, du prix du jury! – venait défendre son Gospel de Ruelles. Jacques Boivin, qui présentait le groupe, a sommé gentiment (Jacques : Ouin…) les admirateurs de Gab, certains plus incontrôlables que d’autres, de prêter l’oreille.
Une fois sur scène, la chanteuse et ses trois choristes se sont lancés dans leur introduction énergique, déballant leurs chansons à l’esthétique Motown avec beaucoup d’attitude et de dance moves. Leur musique, toujours aussi rafraîchissante, mélange la culture afro-américaine à notre propre bagage historique, avec des textes où se confrontent et s’entremêlent anglais, français et québécois.
On était heureux de réentendre leurs titres qui, pour moi, sont devenus de vrais vers d’oreille (Rythmitou, la Rengaine), mais aussi de découvrir leur nouvelle formule améliorée : lors des deux dernières pièces, un DJ les a accompagnés sur scène pour ajouter des beats à ce spectacle principalement centré autour des harmonies vocales. Une direction intéressante à prendre pour Miss Sassoeur & les Sassys, bien que quelques ajustements soient encore à faire.
Bien sûr, Gab Paquet n’allait pas faire les choses comme tout le monde. Bien sûr, il sait faire lever les foules. Bien sûr, ça allait être flamboyant. Mais on ne s’attendait pas à la vague d’énergie qui allait se déployer sur nous dès les premières pièces !
Pour comprendre cela, il faut d’abord savoir une chose. Avec les années, le public du chanteur de charme a évolué : je l’ai vu jouer autant sous le signe de la confidence devant des initiés en liesse que sur des scènes qui le livraient à un public encore à conquérir. Depuis, la Paquetmania s’est répandue hors des Cercles intimes de la star pour contaminer un public qui ne sait pas trop encore ce qui se passe. Le résultat se mesure lors de soirées comme celle de jeudi dernier, alors que la foule faisait littéralement pleuvoir ses acclamations sur le chanteur.
Dès Ton appel à frais virés, les spectateurs se sont donc déchaînés, certains arborant paillettes, pads ou autres signes de frivolité. Tout s’est ensuite enchaîné très rapidement, sans temps morts. Un vrai feu d’artifice avec ses moments flamboyants : Gab faisant du bodysurfing ou ne pouvant retenir sa joie, les récits nous menant de fil en fil aux chansons comme Soucoupes Volantes, etc. Et comme dans tout feu d’artifice, le bouquet final en a mit plein la vue (et les oreilles): après le grand succès Consommations, les musiciens se sont lancés dans une version disco rock de Minuit, chrétiens pour terminer en beauté avec un pot-pourri juste assez kitsch. Pendant ce temps, on sautait, on dansait, ou bien on chantait en chœur des paroles maintenant élevées au rang d’hymnes.
Pour moi, qui n’ai pas eu une dose suffisante de Gab Paquet cette année, ce fut une révélation: un spectacle encore mieux rodé, toujours plus dynamique, qui équilibre bien ses frivolités et ses performances musicales solides. Le groupe a atteint un autre palier de sa carrière et ça se sent. On leur souhaite de continuer sur cette voie en 2018, et on sait qu’on prendra plaisir à les suivre encore longtemps. Parce que la force de Gab Paquet, c’est de se tailler une place dans notre tête avec ses chansons, mais aussi dans notre cœur avec ses manières de charmeur.
L’année 2017 tire à sa fin, mais il reste encore quelques beaux pestacles à nous mettre sous la dent! Nos diffuseurs vont d’ailleurs être fort occupés pendant le temps des Fêtes, aucune raison de vous ennuyer, donc, entre deux partys!
Voici notre sélection de spectacles à voir pendant cette période plus que festive :
Gab Paquet (+ Miss Sassoeur et les Sassys) – Le Cercle, 14 décembre
On vient de le nommer artiste de l’année à ecoutedonc.ca, c’est pas pour rien! Gab Paquet, c’est du bonbon pour les yeux et les oreilles. Le flamboyant chanteur de charme vous convaincra par sa fougue, ses déhanchements et son regard craquant. Préparez-vous à voir un shag divin sous les paillettes de Gab Paquet!
Quant à la première partie, Miss Sassoeur et les Sassys, vous serez séduits par le gospel de ruelle proposé par la formation qui a mérité le prix du jury (ainsi que le prix ecoutedonc.ca) du dernier Cabaret Festif! de la relève!
Gabrielle Shonk – Grand Théâtre de Québec, 14 décembre
L’auteure-compositrice-interprète Gabrielle Shonk a lancé cet automne un premier album qui a été très bien reçu par la critique. Ses chansons folk-pop bourrées de soul sauront en attendrir plus d’un. Pour sa rentrée québécoise, Shonk se paie le Grand Théâtre! Pari risqué? En fait, au moment d’écrire ces lignes, il ne restait plus que quelques billets qu’on vous invite à saisir sans tarder!
Anthony Roussel – Librairie St-Jean-Baptiste, 14 décembre
Juste pour nous compliquer la tâche davantage, un autre beau petit show qu’on aimerait bien voir (et vous proposer), c’est celui que présentera Anthony Roussel dans l’intimité de la Librairie Saint-Jean-Baptiste. Son plus récent album, La gymnastique de l’amour, a fait tourner quelques têtes avec ses mélodies accrocheuses et pas mal atmosphériques. À surveiller!
Koriass X KNLO – La Source de La Martinière, 16 décembre
Pour conclure le cycle Love Suprême en beauté, Koriass présentera un concert à La Source de La Martinière. Dernière occasion de voir le rap théâtral du jeune homme avant un petit bout! De son côté, le Bas-Canadien KNLO devrait nous faire groover en masse! Si vous connaissez la petite salle limouloise, vous savez que le plafond risque de se retrouver dans le parc voisin!
Solids (+ Los et Mundy’s Bay) – L’Anti Bar et Spectacles, 26 décembre
Vous avez besoin de quelque chose qui rocke pour faire passer le ragoût de patte de votre grande-tante Louise (ou le cari au tofu de votre oncle Bastien-Olivier)? Le Boxing Day a été difficile? La solution à tous vos maux : la formation rock Solids qui investira L’Anti pour nous inviter à hocher joyeusement la tête!
La Caravane des fêtes IV : La messe de minuit – La Nef, 27 décembre
Y’avait des restants de ragoût de patte ou de cari au tofu dans le frigo? Vous avez encore besoin d’énergie? Eh ben les gars de Caravane vous ont monté un autre show juste pour célébrer le temps des Fêtes (ou Noël, pour ne pas déplaire à certains). Et pour qu’on se sente encore plus à la messe de minuit, ça va se passer à La Nef! On nous promet tout un party! Et les deux groupes invités, Harfang et Mort Rose, ne sont pas à dénigrer non plus, oh que non! D’un côté, une pop atmosphérique accrocheuse, de l’autre un petit rock and roll sympathique qui donne le goût de danser. Plus le temps passe, plus on a hâte!
Orloge Simard (+ Pass) – Impérial Bell, 29 décembre
Un autre truc qui commence à devenir une tradition, c’est la beuverie le show de fin d’année d’Orloge Simard. Ne me demandez pas pourquoi, le monde vire fou en la présence du philosophe baieriverain et de son band de musiciens déchaînés. Mais cette folie provoquée par l’aucuncadrisme (la philosophie d’Orloge) est contagieuse et il y a fort à parier que ça ne sera pas une soirée facile à l’Impérial pour les plus doux!
Mais c’est parfait pour se préparer à monter au Lac Saint-Jean fêter le Jour de l’An!
L’amour. Y’a pas beaucoup de mots de cinq lettres plus forts que celui-là. Et y’a pas grand chose qui représente mieux ce mot que le couple Chantal Archambault/Michel-Olivier Gasse, du duo Saratoga. Le duo, qui en est aux dernières dates de la tournée Fleur, était de retour à Québec (presque un an après son passage au Théâtre du Petit-Champlain).
Nous avons été gâtés. Saratoga a fait le voyage à Québec avec le quatuor à vents et le dispositif d’éclairage (sobre, mais diablement efficace) qui avaient accompagné le groupe à son spectacle de Coup de coeur francophone à Montréal. On allait donc entendre les chansons de Fleur comme on les entend dans le confort de son salon avec, en prime, la complicité palpable de nos deux tourtereaux.
J’aimerais vous dire que mes attentes étaient stratosphériques, mais ce n’est pas le cas. Quand on va voir Saratoga, c’est comme si on allait voir deux vieux amis qu’on est juste trop heureux de retrouver. Et Chantal et Gasse avaient de nombreux amis samedi soir! De nombreux amis venus entendre leurs histoires tirées du quotidien (le leur, celui de gens qu’ils ont croisé et d’autres, sortis tout droit de leur tête). Des histoires pas toujours drôles racontées avec tendresse.
Bien sûr, le couple a « brisé la glace » (c’est leur jeu de mot poche, pas le mien) avec Brise-glace, la chanson qui ouvre si bien Fleur. Dès les premières notes de guitare et de contrebasse, tout le monde se tait, ouvre grand les yeux et tend l’oreille bien fort. On sait qu’on va passer un doux moment. Nouveau record : j’ai les yeux humides seulement 30 secondes après le début de la prestation, dès que les vents se font entendre.
Parce que oui, y’a ça : les mélodies de Saratoga font pleurer. De belles larmes de bonheur, du sel qui goûte bon. Ajoutez-y le timbre si riche et particulier des bois qui se mettent de la partie, et c’est avec un sourire béat que vous allez pleurer! Je me tourne vers ma copine. Zut, elle n’est pas là, je l’ai envoyée prendre les photos de la soirée!
Autre nouveau record : Gasse fait des commentaires sur la boucane après seulement une chanson! Les habitués le savent, c’est en train de devenir un running gag, la machine à boucane du Cercle est reconnue pour se faire envahissante (c’est beau, mais ça peut devenir un brin étouffant sur scène).
D’autres chansons profitent du traitement royal du quatuor à vents : Je t’attends dehors a l’air sortie tout droit de la bande sonore d’un film d’amour qui se passe l’hiver, en campagne. On n’est pas du monde, déjà si belle dans sa mélancolie, se voit donner des ailes, transportée par un vent venu des bois d’à côté. Pour vrai! La voix douce et tristounette de Chantal et celle d’un Gasse en parfaite symbiose s’allient parfaitement aux couleurs chaudes soufflées par ce quatuor à vent tout en subtilité. Ce sont encore les bois qui vont marquer la lenteur dans Danser lent. Même si cette pièce est fort sympa lorsque jouée uniquement par le duo, on va vous avouer bien candidement qu’avec les clarinettes et compagnie, elle est tout simplement parfaite. Si on hochait gentiment la tête pendant les couplets, celle-ci devenait langoureuse sous les invitations à danser lent.
Lent. Un autre mot qui définit bien Saratoga. Avec à peine un album et un EP, le duo réussit aisément à meubler près d’une heure et demie qui passe drôlement vite (et quelques gros morceaux ont été laissés de côté depuis leur dernier passage, notamment Madame Rosa et Noëla). Chantal et Gasse n’hésitent pas à prendre leur temps pour mettre leurs pièces en contexte. Les anecdotes parfois loufoques, souvent tendres, se dévorent même si certains, comme moi, les ont entendues pour la plupart un bon nombre de fois. C’est peut-être leur entrain dans leur récit, les regards aussi complices que la première fois qu’ils l’ont raconté, le ton posé de Gasse, qui parle lentement, mais avec autorité… c’est sûrement tout ça.
Après la « chanson de menstru SPM » (toujours aussi drôle Reste donc couchée, une chanson de Chantal que Gasse s’est appropriée) et cette reprise d’une chanson du répertoire hawaïen qui avait autrefois été adaptée et reprise par un certain Michel Louvain (Douce Leilani), ainsi que quelques autres chansons du répertoire saratoguesque, la soirée s’est terminée tout en douceur (pouvait-il en être autrement) avec Saratoga et Fleur.
Oui, on l’avoue, on est très fan de la simplicité de la formule duo de Saratoga. Seulement, il faut le reconnaître, les instruments à vent et le dispositif scénique (quelques lampes chinoises sur lesquelles on envoyait de jolies projections) ont ajouté une touche de magie à ce couple déjà capable de tirer un tas de lapins de son chapeau! Tout ça sans alourdir le spectacle, sans jamais sentir, ne serait-ce que l’espace d’une seconde, que c’était trop. C’est comme si on était dans SARATOGA : THE DIRECTOR’S CUT! On vivait un moment spécial. Un moment que Saratoga a eu la gentillesse de venir partager avec les gens de Québec.
C’est le fan qui parle : Merci Chantal. Merci Gasse.
Maude Audet
En première partie, Maude Audet a fait l’inverse : plutôt que d’être accompagnée de son groupe, Maude était toute seule. Nous avons donc eu droit à des versions toutes nues des magnifiques chansons de Comme une odeur de déclin paru cet automne. Vous savez ce qu’on dit, une bonne chanson, c’est une chanson qu’on aime autant toute habillée que dans son plus simple appareil, et les chansons de Maude tombent dans cette catégorie. Les mélodies peuvent très bien s’appuyer sur la guitare et la voix douce de l’auteure-compositrice-interprète, qui profite elle aussi de ses interventions pour bien présenter ses chansons à un public qui écoutait bien sagement.
Leo, une lettre adressée à Leonard Cohen, a semblé toucher une corde particulièrement sensible chez les spectateurs. C’était le genre de douce mélancolie qu’on était allé chercher, samedi.
C’est le cas de le dire : tout était parfait!
Photos : Marie-Laure Tremblay (sauf quelques-unes par Jacques Boivin)