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    [ENTREVUE] Emilie Kahn – Le travail derrière le succès

    En octobre dernier, on assistait au premier spectacle d’Emilie Kahn à Québec en tant que tête d’affiche. Depuis, elle a fait des tournées aux États-Unis, au Royaume-Uni (en première partie de Half Moon Run) et a été de passage au Iceland Airwaves Music Festival en Islande. La carrière de cette jeune artiste de Montréal semble avoir pris son envol d’un coup, mais derrière cette vague se cachent en fait beaucoup de travail et de préparation. Emilie a pu nous en parler, entre autres choses, à l’occasion de son dernier passage à Québec.

    En premier lieu, Emilie a dû trouver Ogden, son instrument de prédilection (que seraient Emilie & Ogden sans Ogden, en effet). «Je pense que j’ai longtemps cherché mon instrument. Je voulais chanter et j’ai gossé un peu sur quelques instruments (piano, guitare, etc.). Il n’y avait rien qui me tentait vraiment. Quand j’ai découvert cet instrument-là, c’était comme une révélation et je suis devenue comme obsédée,» explique-t-elle. Elle a ensuite suivi des cours particuliers, même si une bonne partie de son apprentissage s’est fait de façon autodidacte : « J’ai trouvé une prof sur Craigslist, je suis allée à un cours et j’ai juste eu un coup de cœur tout de suite. J’ai commencé à jouer et finalement j’ai étudié avec cette prof-là pendant trois ans.»

    Après avoir appris à maîtriser cet instrument massif et onirique qu’est la harpe, Kahn a commencé à être plus active dans la communauté musicale. « Je jouais un peu dans d’autres groupes avant, avec mes amis à Montréal. […] Rien de connu, mettons !» raconte-t-elle. C’est de cette façon qu’elle a fait la rencontre de Jesse Mac Cormack, qui réalisera son album 10 000, paru dernièrement. « Ça doit faire 4-5 ans […] je l’avais rencontré quand il avait fait une première partie avec un autre band. Il avait aussi enregistré des trucs avec mon ancien band avant, pis là j’ai fait ‘hey, veux-tu enregistrer mon nouveau projet ?’» explique Emilie en parlant de Jesse.

    C’est à la suite de cette rencontre que le projet d’Emilie & Ogden a pu commencer à prendre forme. «On a fait un EP ensemble il y a comme trois ans. Avant de commencer à faire des shows je voulais avoir quelque chose comme référence, pour que les gens aient quelque chose à aller écouter. Il y avait trois chansons dessus et il y en a deux qui sont maintenant sur l’album qui vient de sortir. Après ça [Jesse] a joué dans le band pendant quelques années pis on a enregistré l’album ensemble.» Lorsqu’on lui a demandé si Jesse Mac Cormack avait apporté quelque chose de spécial à son disque, elle a tout de suite répondu : «Ouais, je pense que Jesse c’est un génie.» C’est d’ailleurs une chose qui se répète dans ses nombreuses biographies. Mais encore ? «Il a beaucoup influencé le son du projet. Quand j’ai commencé, j’ai amené les tunes pour le EP et on a enregistré ensemble. Ensuite, il a fait les arrangements et il l’a réalisé, donc ça a comme formé le son qu’on allait avoir, qu’on a repris aussi pour le spectacle, » explique Kahn. «Je pense qu’au début je voulais faire quelque chose d’un peu plus folk, épuré, et là c’est devenu un peu plus contemporain, a little bit of electro touches ! »

    Avec le travail en studio et un album prêt à sortir, Emilie & Ogden semblaient partis pour la gloire. Cependant, c’est un peu plus difficile que ça de devenir connu. Kahn nous a raconté, entre autres, comment elle avait décroché sa place au Iceland Airwaves. Et ça n’a pas été de tout repos. «On essayait avec le label de le booker depuis un bout. Il y a comme un gars qui booke le festival et il se promène pas mal dans le monde dans des festivals. Je pense qu’il était intéressé, mais ça traînait», explique la jeune artiste. Finalement, l’affaire s’est résolue dans un des nombreux showcases auxquels le groupe a participé : «Des showcases c’est comme des festivals pour l’industrie, pour te faire voir. C’est les gens de l’industrie qui vont là et souvent il n’y a juste pas de cachet. J’en ai fait plusieurs à Toronto. Et là c’est comme ça que tu fais de la route pis que tu dépenses du cash et des fois ça ne sert à rien. Des fois il n’y a juste personne. À [ce showcase-là], je me disais: ‘Je suis tannée de faire ces showcases-là, ça ne donne rien. Je ne pense pas qu’on va le faire cette fois-ci.’ Finalement, ma gérante m’a convaincue d’y aller et par chance le gars de Iceland Airwaves était au show. Après le spectacle, il m’a dit : ‘ouais, j’pense que tu vas le faire cette année le festival’.» Le 3 octobre dernier, jour de l’entrevue, elle semblait d’ailleurs contente d’avoir eu cette chance : « Il est vraiment cool ce festival-là, et normalement ils bookent les gens juste une fois pis après tu n’y retournes plus. »

    Ça fait donc maintenant trois ans que le projet d’Emilie & Ogden est sur les rails avec, on l’espère, encore plusieurs années en vue. Dernièrement, plusieurs autres belles opportunités ont souri à la jeune auteure-compositrice-interprète, donnant peut-être l’impression à certains que sa carrière avait démarré en trombes. C’est pourquoi on a voulu retracer le processus derrière sa popularité naissante. «Les gens ont peut-être l’impression que ça arrive vite, mais pour moi ça fait longtemps que je travaille là-dessus», nous avait-elle dit en entrevue. «Mais c’est vrai que c’est lefun que tout arrive comme ça quand l’album sort. C’est ça qu’on veut !» a-t-elle cependant ajouté, enthousiaste.

    Emilie sera en tournée avec Ogden au Québec encore pour quelque temps. Elle se produira notamment à Shawinigan (Le Trou du Diable) le 2 décembre prochain, à Trois-Rivières au Temps d’une Pinte le 3 décembre prochain, à la Maison des Arts de Laval le lendemain ainsi qu’au Vieux Bureau de Poste de Lévis le 5 décembre. Consultez son site officiel ou sa page Facebook pour plus d’info. Profitez-en pour découvrir le talent d’une artiste québécoise qui a autant de motivation que de talent à revendre. Pour bien terminer l’entrevue, nous lui avons aussi posé quelques questions en rafale.

     

    Comment vis-tu le monde de la musique en tant que femme ? Vois-tu des différences parce que tu es une fille ?

    «Non. J’entends des choses, mais en même temps moi je me sens quand même bien. Je travaille pas mal avec des gars. Je suis entourée de gars dans mon band, partout, et je me sens respectée. J’aime ça, je me sens un peu comme one of the boys…et ça c’est cool. J’aime aussi ça quand un gars me dit après un show : ‘hey nice set man’, et qu’il m’appelle ‘man’. Dans ce temps-là, je me dis : ‘Ok, tu me respectes et c’est pas juste parce que tu me trouves cute’. Je sais pas. T’as juste à t’entourer de monde qui sont cools.» Anecdote à ce sujet, Emilie donne un exemple de la complicité qu’elle a avec les membres de son groupe : «Les deux gars dans mon band sont aussi des soundmen et moi je ne connais rien là-dedans. Mais là je viens d’avoir des pédales pour la première fois pour ma harpe, des genres pédales de reverb, et je suis tellement nulle que des fois je dois leur demander : ‘peux-tu me montrer comment plugger ça ?’ Et ils répondent ‘ok Émilie’. Ils sont vraiment patients avec moi. Ils pourraient facilement me niaiser parce qu’eux ils ont tellement de connaissances par rapport à ça.»

    Après réflexion, cependant, la harpiste ajoute :

    «Ah oui ! Peut-être qu’en tant que femme en musique je trouve ça drôle le fait qu’on s’attende à ce que tu ailles te faire maquiller, par exemple. Il y a comme une attente sur l’image et sur le fait de faire des trucs reliés à la mode. Mais bon, en même temps, j’aime ça porter du beau linge. J’aime ça être une femme et j’aime ça me maquiller. Mais il y a une partie de moi qui se dit des fois : ‘ah peut-être qu’il y a des jours où je n’ai pas envie d’être cute’. Et j’ai comme de la pression pour l’être peut-être. Par contre, comme je le disais avant, dans mon vrai monde à moi en tant que musicienne, avec les gens avec qui je travaille, je me sens respectée. Ouais. C’est plus du côté branding ces attentes-là.» Elle nous raconte d’ailleurs une autre anecdote à ce sujet : « Il y avait une des équipes de PR qui m’avait déjà dit : ‘ah tu pourrais faire un Pinterest pis poster des outfits que t’aimerais pour la tournée’, et ils donnaient d’autres idées comme ça, par exemple qu’on pourrait faire des partenariats avec des marques pour des vêtements. À ce moment-là, dans ma tête, je me disais que c’était cool, mais en même temps je pense qu’on ne demanderait pas ça à un gars.»

     

    Quelle question rêverais-tu de te faire poser en entrevue ?

    «Ah non ! Je ne pense jamais à ça ! Des fois je chiale parce que souvent le monde posent les mêmes questions et je me dis qu’ils sont plates. Mais en même temps, je ne sais pas ce que je me demanderais moi-même… J’aime les questions qui sont peut-être moins en rapport avec ce que je fais, mais qui font que je raconte une anecdote ou quelque chose qui n’a pas rapport. Ou le genre de question comme ‘c’était quoi ton CD préféré quand t’étais jeune’ ou des trucs comme comme ça. Je trouve ça lefun de découvrir ce genre de choses sur des artistes quand je lis un article.»


    Quel était ton CD préféré quand tu étais petite, alors ?

    «Quand j’étais adolescente, j’étais obsédée par un groupe qui s’appelle Brand New. Je pense que ça m’a quand même influencé beaucoup. On dirait que je vois un peu la vibe de ce groupe-là dans mes paroles et dans mon style.»

    D’autres anecdotes avec ça ?

    «Hier [le 2 octobre] j’avais mon lancement, pis pour la première fois je faisais un loop avec ma harpe et je restais debout pour chanter. Mais j’ai comme fucké le loop, il était en retard ! J’ai regardé les gars, comme pour leur demander si je devais repartir le loop, puis finalement ils ont juste continué à jouer. On l’a fait et ils se sont ajustés.»

    «Sinon, l’an passé j’ai eu un photoshoot pour une parution dans Aritzia. Une grosse affaire. Ils m’ont maquillée, et puis j’ai fait une réaction allergique au fond de teint : j’avais des énormes plaques rouges dans la face. Ils avaient fait venir un photographe de genre Londres, et comme tout le monde venait de Londres, Paris, New York pour ce shoot-là. Et moi j’étais une fille pas rapport, pas connue, juste là en me disant ‘ok cool’. En tout cas, il est arrivé ça et il fallait me démaquiller au complet puis attendre quelque chose comme une heure pour que ça s’en aille. Tout le monde était en retard et en plus ils avaient des avions à catcher 1h après. C’était vraiment stressant et bizarre ! Ouais… J’aime ça raconter cette histoire-là ! Maintenant, je sais quelle marque de maquillage je ne dois pas prendre !»

     

    Crédit Photo: Llamaryon

    Marie-Ève Fortier

    1 décembre 2015
    Entrevues
    Emilie & Ogden, Jesse Mac Cormack
  • [SPECTACLE] BEAT SEXÜ, 26/11/2015, Le Cercle

    [SPECTACLE] BEAT SEXÜ, 26/11/2015, Le Cercle

     

    C’est après des mois de travail que la gang du Pantoum et leurs invités nous présentaient, hier soir, le disque OPEN HOUSE QC. Cet album se veut un projet permettant de valoriser la scène émergente foisonnante de la ville de Québec. Il regroupe 11 titres d’auteurs-compositeurs locaux réarrangés par BEAT SEXÜ et interprétés par eux ainsi que différents artistes collaborateurs de la ville. Même la pochette, faite main, a été imprimée et assemblée à Québec par Le Coin. Le résultat ? Beaucoup de bonne musique à se mettre dans ses oreilles, certainement quelques découvertes ainsi qu’un gros party pour célébrer tout le travail accompli et la talent de la communauté musicale de Québec. Et un party, c’en a été tout un hier !

    Les portes ouvrant à 21h, on a pu tout d’abord prendre une bière et admirer le décor scintillant mis en place par Carol-Anne Charette et Pier-Anne St-Jean. Il faut savoir que BEAT SEXÜ ne fait rien à moitié : boules (avec un S !) disco, paillettes, machine à bulles et autres fantaisies étaient au rendez-vous, sans compter tous les costumes et habits qu’on nous dévoila plus tard. Plusieurs membres du public, eux aussi, s’étaient gâtés sur les paillettes et les guirlandes. Vers 23h, le groupe monte sur scène devant une salle bien remplie, où l’on pouvait retrouver, rassemblée, une bonne partie des collaborateurs du projet et des musiciens de la communauté de Québec. Étaient aussi présents les trippeux de shows, les habitués dont je fais partie, ainsi que quelques nouveaux visages.

    Beat Sexü - Open House

    Jouant les pièces de l’album les unes après les autres (mais pas dans l’ordre), les musiciens sur scène trouvaient toujours un moyen de renouveler l’énergie et l’enthousiasme ambiant. Dans l’ensemble, on a eu droit à une prestation très réussie sur le plan technique et qui faisait sentir la belle complicité présente entre les artistes. En effet, sans que ce soit nécessairement les mêmes que sur l’album, le groupe a invité sur scène des artistes différents pour chaque chanson ou presque, de sorte qu’un bon roulement se faisait et apportait toujours quelque chose de nouveau. La musique en tant que telle, imprégnée du caractère suave, festif, disco-pop de BEAT SEXÜ, variait pour adopter des styles et des ambiances différentes selon les interprètes et auteurs-compositeurs des pièces. Peu importe ce qu’on peut penser de la musique populaire, il faut savoir que celle qu’on nous a présentée hier soir se démarquait tout d’abord par sa créativité et par le talent qu’elle mettait de l’avant.

    Beat Sexü - Open HouseNommer tous les collaborateurs et tous les bons coups de la soirée serait interminable. Il faut cependant souligner quelques moments forts. On a aimé les performances de nos showmen locaux que sont Brun Citron et le fameux alter ego d’Alexandre Martel : Anatole. Ce dernier s’est d’ailleurs promené dans la foule en chantant Le reste du temps, aussi déstabilisant qu’à son habitude, puis a été à l’origine d’une des (nombreuses) crises cardiaques potentielles de l’agent de sécurité, puisqu’en s’allumant une cigarette il a été suivi par un certain nombre de musiciens et de spectateurs. Côté performance musicale des interprètes invités, on peut souligner le solo de guitare de Hugo LeMalt sur Trasher le dancefloor, l’interaction du rappeur Webster avec le public sur X-Girlfriend, l’intensité et le style de Jane Ehrhardt quand elle a interprété sa propre pièce ainsi que la finale ornementée d’Odile Marmet-Rochefort sur celle de son homonyme Odile DuPont. Tout ça sans compter le house band du Pantoum, BEAT SEXÜ, qui s’est donné toute la soirée.

    Beat Sexü - Open HouseIl ne faut pas non plus passer à côté du clou du spectacle, lorsque Gab Paquet a fait son apparition, accompagné d’applaudissements tonitruants. Le public, fêtard, gonflé à bloc, avait gardé le plus gros de son énergie pour cette finale. Amorcée tout en douceur (sur un fond peut être trop bruyant, mais qui s’est vite calmé à coup de chut), Papa, maman, bébé, amour a explosé ensuite tout d’un coup avec l’énergie que seul BEAT SEXÜ sait dégager. Gab Paquet s’est en outre laissé porté par une confiance aveugle envers le public lors de sa prestation et a fait un bodysurfing aussi inattendu qu’inspirant. Après lui, notre collègue Simon Provencher s’est lui aussi gâté en la matière, au grand déplaisir du gardien de sécurité, qui en était déjà à sa crise cardiaque no.2. La troisième suivit de près, puisqu’après cette performance intense (on nous a même lancé des paillettes !), c’est BEAT SEXÜ qui est revenu en force au rappel pour présenter deux de ses titres originaux. La force des choses étant ce qu’elle était à cet apogée du fun, les danseurs de la foule se sont retrouvés par dizaines sur scène, dans une apothéose de musique festive.

    En somme, ce fût une excellente soirée, qui entre facilement dans la catégorie des meilleurs spectacles que j’ai vus à vie. Et c’est arrivé grâce à l’énergie et au talent d’artistes d’ici, ce qui est encore plus beau. Afin d’en savoir plus sur ce projet et ses nombreux collaborateurs, je vous invite à consulter leur bandcamp et à écouter, à partager leur musique. Comme l’ont dit dans un discours émouvant Jean-Étienne Collin Marcoux et Jean-Michel Letendre-Veilleux, principaux organisateurs du projet, il faut célébrer et partager la richesse de la Ville de Québec, parce qu’on a la chance d’avoir une scène locale éblouissante, et qu’on l’oublie trop souvent.

    [bandcamp width=100% height=120 album=2783708076 size=large bgcol=ffffff linkcol=e99708 tracklist=false artwork=small track=3816682615]

    Crédit photo: Marion Desjardins/ Llamaryon

    Gab Paquet et BEAT SEXÜ – Photo : Marion Desjardins
    Beat Sexü – Photo : Marion Desjardins
    Beat Sexü – Photo : Marion Desjardins
    Beat Sexü – Photo : Marion Desjardins
    Beat Sexü – Photo : Marion Desjardins

    Marie-Ève Fortier

    28 novembre 2015
    Région : Québec, Spectacles
    Anatole, BEAT SEXÜ, Brun Citron, Gab Paquet, Headache24, Jane Ehrhardt, Jérôme Charette-Pépin, Le Cercle, Les Indiens, LOS, Mauves, Odile DuPont, Pantoum Records, Pierre-Hervé Goulet, Ponctuation, Webster
  • [SPECTACLE] Lancement de «Garder la tension», 5 for Trio (+Nicolas Grynzspan)

    [SPECTACLE] Lancement de «Garder la tension», 5 for Trio (+Nicolas Grynzspan)

    S’il y avait un spectacle de jazz parfait autant pour initier des gens au genre que pour surprendre les plus habitués, c’était bien celui qui a eu lieu samedi dernier au Cercle. Ce soir-là, c’était le lancement du troisième album de 5 for Trio : Garder la tension. Mais dans les faits, c’était bien plus que ça.

     

    La première partie, assurée par le quartette de Nicolas Grynszpan (aussi membre du groupe vocal The Rainbows), en a tout d’abord mis plein la vue. Composé de Kenton Mail à la batterie, d’Alexandre Le Blanc à la contrebasse, de Guillaume Martel-Simard à la guitare et de Grynzspan lui-même au chant, le groupe a fait preuve non seulement de prouesses techniques, mais aussi de son lot de créativité. La première pièce, plus traditionnelle, préparait le terrain tout en douceur. On pouvait déjà y noter le scat tout à fait particulier de Grynzspan, qui semblait chanter comme on joue de la guitare ou du violon, ce qu’il nous a fait sentir en adoptant les poses de ces musiciens pendant sa prestation. Après une brève introduction et une reprise tout en jazz d’Englishman in New York de Sting, le groupe a joué une composition du guitariste intitulée Alex Dreams Dreams. C’est à partir de cette pièce que le public put savoir à quoi s’en tenir avec le quartette du jeune parisien. Sur un accompagnement humble et langoureux de ses musiciens, Grynzspan a entamé un solo vocal imitant la trompette. Mais ici, lorsqu’on dit «imiter», le mot n’est pas assez fort. C’est en tout cas ce que vous dirait sans doute le public alors visiblement impressionné par cette prestation, pendant laquelle le trompettiste improvisé passa à travers la gamme de styles de jeu de trompettes imaginables. Ce fut une performance d’autant plus notable qu’elle eut lieu un peu plus de 24h après les évènements tragiques arrivés la veille à Paris.
    A suivi une composition du chanteur lui-même, pendant laquelle sa voix contrefit, à l’aide de quelques effets sans doute, la guitare électrique, voire le synthétiseur. Puis, en guise de pièce finale, on eut droit à une reprise de (croyez-le ou non) Toxic (oui oui !) de Britney Spears aussi entraînante que les autres pièces étaient captivantes. Cela va sans dire que le public applaudit chaleureusement le quartette qui a su réchauffer solidement les planches pour la prestation de 5 for Trio. Il faut mentionner, d’ailleurs, que malgré le talent et l’inventivité notables du chanteur, ce dernier ne faisait pas d’ombre à ses excellents musiciens, dont le guitariste semble être celui qui a le plus impressionné le public. Pour ma part, je crois qu’il ne manquait au tout qu’un solo de batterie pour compléter le tout.

     

    Même avec une performance aussi solide de la part du quartette, 5 for Trio n’ont rien eu à envier à leur première partie. Tous deux des spécialistes dans leur style, ces groupes abordent le jazz d’une façon très différente. En effet, si Nicolas Grynzspan fait du jazz avec autre chose (comme avec des pièces pop ou rock), 5 for Trio font autre chose avec du jazz. En effet, malgré leurs standards et leur instrumentation purement jazz, la musique du trio se rapproche bien plus souvent du progressif ou même du rock. Webster, invité à monter sur scène pour rapper sur As de trèfle, explique très bien le sentiment que j’avais notamment à l’égard du rythme de leur musique : alors qu’on est souvent habitué à de la musique en quatre temps, 5 for Trio nous sort de notre zone de confort avec de la musique «en cinq en trois en sept, en on ne sait plus quel temps». Et c’est toujours appelé à changer, même au sein d’une de leurs pièces, qui sont aussi changeantes sur plusieurs autres niveaux.

    5 for Trio ont joué leur album d’un bout à l’autre, dans l’ordre, avec la participation de Webster, comme on l’a mentionné, ainsi que celle d’une violoniste et d’une violoncelliste pour la première pièce. On peut relever l’aisance du trio (Sylvain Saint-Onge, Guitare ; Mathieu Rancourt, Contrebasse ; Jean-François Gingras, Batterie) à s’adresser à son public, qui était, avouons-le, très nombreux pour une soirée jazz et très attentif pour un spectacle au Cercle, en plus d’être enthousiaste. Les chansons, variées et intenses, ont été rendues avec un sens du timing im
    pressionnant et avec une belle énergie. J’ai particulièrement apprécié Captations clandestines avec ses teintes orientales et psychédéliques. Pour ceux qui étaient au festival OFF, ça m’a rappelé quelques instants la performance monstre de Yonatan Gat. Pour bien terminer la soirée après leurs quelques remerciements et des applaudissements à n’en plus finir, le groupe a fini avec Prevision suivie de Inner Revision, des pièces-suite de leur album précédent, Witness & reactions, personnellement mes préférées de ce disque.

     

    Crédit photo: Ludvig Germain-Auclair

    Marie-Ève Fortier

    16 novembre 2015
    Région : Québec, Spectacles
    5 for Trio, Le Cercle, Nicolas Grynzspan
  • [SPECTACLE] Le Couleur + Anatole, Le Bistro Plus, 5 novembre 2015

    [SPECTACLE] Le Couleur + Anatole, Le Bistro Plus, 5 novembre 2015

    06112015-011202-53-Le couleurPhotos : Jacques Boivin

    J’entrai vers 10h dans ce bar légendaire qu’est le Bistro Plus. Qu’a-t-il de si particulier ? C’est que le temps a oublié d’y faire son œuvre. Quand on y entre, on se retrouve directement catapultés dans les années 1980. En attendant la première partie, quelques personnes discutaient près du bar et d’autres dansaient sur du ABBA devant la scène. Scène, il faut le souligner, plus qu’appropriée pour la musique de ce soir-là : murs de miroirs, boules disco et autres surprises étaient au rendez-vous.

    05112015-234730-22-AnatoleC’est alors que les musiciens d’Anatole, semblables à des astronautes dans leurs habits blancs, ont fait leur entrée sur scène. Comme à son habitude, le squelette dandy s’est laissé désirer avant d’arriver dans son accoutrement typique. Il a déclamé un speech prophétique bien senti pour ensuite commencer en force avec une des chansons les plus rock de son répertoire sinon assez psycho-synthé-disco-pop. Pour ceux qui ne connaîtraient pas Anatole, c’est un groupe mythique de Québec qui cherche à exploiter une des facettes de la scène souvent négligée par les artistes aujourd’hui : l’aspect théâtral d’un spectacle. Vous n’y reconnaîtrez point l’Alexandre Martel de Mauves, puisque le squelette qui chante devant vous a une tout autre identité. Au Bistro Plus, accompagné par des musiciens de talent (et qui plus est visiblement contents de jouer), ce dernier se déhanchait comme à son habitude, toujours plus déroutant que la veille. Les habitués du bar y ont même goûté, lorsqu’en commençant La Cassette le chanteur est monté (encore) sur une des tables pour les fixer du regard et chanter a capella entre deux gros silences déstabilisants pour les novices. Les admirateurs du groupe ont aussi eu droit à une nouvelle chanson surprise, qui tire du côté de la ballade.

    06112015-003247-41-Le couleurLe Couleur a ensuite fait son entrée. Les quatre musiciens (dont deux percussionnistes) ont commencé d’emblée avec leur électro-disco tout droit sorti des années 1980 et avec la ferme intention faire lever le party. Un peu lent à suivre (les tables devant la scène n’ont pas aidé), le public s’est pourtant donné à la fin du spectacle avec ses meilleurs moves de danse. Les quelques personnes qui ne dansaient pas écoutaient du moins avec intérêt. Alternant pièces rapides et pièces plus down tempo, le groupe a su exploiter toutes les possibilités des synthétiseurs et des percussions (congas, cloches à vache, maracas, tambourine, batterie, drumpads, etc.). Ils tempéraient bien leurs pièces très rythmiques avec des sections plus planantes, une touche psychédélique bien appréciée pour compenser la répétitivité des années 80. La chanteuse, qu’on entendait peu, chantait dans un style qui peut s’apparenter à celui d’Indochine. Le groupe de Montréal a terminé avec ses chansons plus connues telles que Femmes et Club italien, pièce pour laquelle ils ont réalisé un vidéoclip. Ensuite, c’est avec une finale haute en couleurs, en bulles (parce que oui, tout ce temps il y avait une machine à bulles !) et devant les applaudissements enthousiastes du public que Le Couleur a terminé son spectacle, qui lui-même bouclait leur dernière tournée avant d’entrer en studio.

    Ces deux groupes ont fait revivre la flamme disco du Bistro Plus le temps d’une soirée. J’aurais presque cru au voyage dans le temps. Et pourtant quelques chanceux seulement ont vécu cette soirée, qui aurait mérité foule.

    Anatole. Crédit photo: Jacques Boivin
    Le Couleur – Photo : Jacques Boivin

     

    Marie-Ève Fortier

    7 novembre 2015
    Région : Québec, Spectacles
    Anatole, Le Bistro Plus, Le Couleur
  • Session Cambium avec Harfang – «Exposure»

    Session Cambium avec Harfang – «Exposure»

    30 septembre- 8h a.m. C’était un jour gris, venteux. Sur Grande-Allée, on entendait les échos d’une manifestation qui semblait proche et lointaine à la fois. L’atmosphère, étrange mais attrayante, reflétait bien ce qui nous attendait à l’intérieur de la vieille Église tout près du Concorde.

    Le collectif LIM∅NADE avait déjà organisé le décor, selon ce qu’ils appellent le concept de Nouvel Ordre – ou de Nouveau Désordre, dépendamment de si l’on parle à Maxime Laurin ou à Gabriel Lapointe, les deux réalisateurs. Pour compléter le trio du collectif, Étienne Turmel portait (et portera) le chapeau du producteur. Leur idée pour cette première session : différents éléments éclectiques organisés de façon à créer un univers surréel. Étienne Bureau, fondateur de Cambium Lab Sonore, studio qui prête son nom aux présentes sessions, est arrivé peu après pour préparer minutieusement son matériel.

    L’Église était un lieu bien choisi pour le groupe Harfang qui, pour les lecteurs quotidiens de notre blogue, n’a plus besoin d’introduction. Leur musique, un indie-folk mélodique qui sait parfois être introverti et d’autres fois être intense, cadrait bien avec ce lieu plein d’histoire, avec son odeur de vieux livres. La pièce qu’ils nous présentent, Exposure, fait partie de leur dernier maxi (Flood) sorti en avril dernier.

    Comme on l’a dit dans notre prépapier à propos des sessions Cambium, ce sont des tournages à mi-chemin entre la performance live et le vidéoclip. Ainsi, elles comprennent mise en scène, décors, figurants accompagnant le groupe, qui doit pour sa part jouer sa pièce d’un bout à l’autre en une prise. Gros défi, auquel tous les collaborateurs sont parvenus seulement avec plusieurs heures de tournage. En effet, 14 prises ont été nécessaires pour obtenir le résultat escompté : c’est que les acteurs des sessions Cambium cherchent à créer du matériel professionnel. D’une part, Étienne Bureau (Cambium Lab Sonore) a travaillé avec l’écho naturel de l’endroit pour faire ressortir un son plus intéressant, plus proche de la réalité. D’autre part, le collectif LIM∅NADE a bien pensé son concept, en plus d’y ajouter de nombreuses techniques de tournage pour assurer une vidéo de qualité. Le groupe, quant à lui, a persévéré malgré les répétitions après répétitions. Sans mentionner la participation des figurants.

    Malgré tout ce travail, on pouvait remarquer le plaisir avec lequel tous ces gens collaboraient, ainsi que la complicité qui les animait. C’est ce que me rappelle aussi Samuel Wagner, l’initiateur de ce projet, dans la courte entrevue que j’ai fait avec lui par la suite.

    Entrevue avec Samuel Wagner

    Comment t’est venue l’idée du projet ?

    À la base je travaillais avec Étienne Bureau chez Cambium, puis j’ai eu l’idée de profiter du fait qu’on avait un contact qui faisait de la vidéo[, LIM∅NADE]. Ils étaient équipés, et nous autres on était équipés en son (Étienne venait de s’acheter un enregistreur portatif) alors je me suis dit qu’on pourrait faire quelque chose qui était à mon avis inaccessible ou presque pour les bands émergents.

    Nous autres avec Harfang, par exemple, combien de fois a-t-on essayé d’avoir des sessions live ? Pour le premier EP, on était censé en faire deux ou trois, c’était dans nos plans, mais les opportunités ne se présentaient pas… C’est aussi compliqué d’avoir de la qualité et tout… Alors je me suis dit que pour les bands, c’était un besoin en ce moment : c’est-à-dire que les sessions live sont une bonne façon de promouvoir un album avant qu’il sorte ou quelques mois après. Et on a tellement cherché à en faire avec Harfang que quand j’ai eu les contacts je me suis dit : ‘hein cool on va pouvoir faire une session ! Pis en plus, tant qu’à avoir le tout, pourquoi ne pas le faire pour les autres ? Ce sont des bands qui ont les mêmes besoins que nous’. Donc c’est de là qu’est venue mon idée. Je me suis dit que c’était une belle façon de stimuler la scène émergente.

    Pour les sessions Cambium, personne n’est payé (pas même moi). Qu’est-ce qui motive les différents acteurs selon toi ?

    C’est un domaine qui est stimulant. Autant les gars de LIM∅NADE que moi, que Étienne, on veut tous baigner là-dedans. Nous autres, LIM∅NADE et Cambium [Lab Sonore], on est deux compagnies qui démarrent, alors c’est une belle façon de faire ce qu’on aime. Et puis ça paye autant pour tout le monde : autant le nom du band circule, autant ça fait du contenu pour les blogues, pis autant que le nom du studio, le nom de la compagnie de production vidéo circulent.

    J’voulais que ça soit rassembleur au lieu que ça soit compétitif. C’est pour ça qu’on ne s’est pas fait notre plateforme, ce qui serait beaucoup plus payant à long terme pour nous. Il y a des bands qui sont bons et vous[, à ecoutedonc.ca,] n’avez pas les moyens techniques en ce moment pour faire ça. Nous autres, on les a : faisons-le. Tout le monde vit pour ça, on est juste content de le faire.

    Une prochaine session Cambium est déjà prévue. Restez à l’affût pour plus de détails sur la performance et sur le projet lui-même.

    Crédit Photo (sauf photo de Samuel Wagner): collectif LIM∅NADE

    Marie-Ève Fortier

    5 novembre 2015
    Nouvelles
    Cambium Lab Sonore, Harfang, LIM∅NADE, Sessions Cambium
  • [SPECTACLE] jazz – Lancement de «Égoportrait», La Troupe des Flâneurs Romantiques

    [SPECTACLE] jazz – Lancement de «Égoportrait», La Troupe des Flâneurs Romantiques

    Hier soir, le Cercle s’est vêti de son ambiance la plus feutrée pour accueillir La Troupe des Flâneurs Romantiques et leur tout nouveau maxi. Tables et chandelles étaient au rendez-vous, tout comme un public assez nombreux et éclectique.

    Vers 20h20, la formation – composée d’une guitare, un saxophone, une batterie, une contrebasse et d’un plutôt rare trombone à pistons – est montée sur scène. Gabriel Côté, le guitariste et compositeur de la Troupe, a introduit leur performance en expliquant, sans doute avec une pointe d’ironie, l’origine du titre de leur maxi : Égoportrait. Pour ceux qui ne le sauraient pas, «Égoportrait» est le terme français utilisé pour Selfie. Inspiré, disait-il, de Kim Kardashian, le guitariste a voulu faire le parallèle entre l’égoportrait et le jazz enregistré, qui lui aussi tente de capturer en une prise les multiples facettes d’une chose… et y échoue !

    Sans plus tarder, le groupe est passé à la pièce de résistance, soit la présentation des sept titres composant le disque. À leur écoute, on a pu tout d’abord remarquer la variété intéressante d’ambiances que la Troupe est allée chercher en présentant différents éléments du jazz, que ce soit la bossa-nova dans L’Odeur de l’encre, le style cool jazz dans La Paresse ou encore le groove dans Égoportrait, qui me rappelle personnellement Herbie Hancock. Dans chacune de ces pièces, les improvisations humbles, mais efficaces prenaient juste assez de place pour permettre aussi de se concentrer sur les compositions en elles-mêmes. Celles-ci évoquaient différents univers, que ce soit celui de l’amour selon Cioran sur La schizophrénie d’un parfum ou encore celui de Shakespeare, pour rester dans les livres, sur Conte d’hiver, personnellement ma pièce préférée de la soirée pour son expressivité et son solo de saxophone.

    Pour ceux qui ne seraient pas familiers avec le jazz, il faut savoir qu’une composition dans ce style se concentre surtout sur le thème musical qui devra être exposé par les musiciens. Ensuite, pendant les solos et certains autres morceaux de la pièce, les musiciens improvisent dans le cadre musical que leur donne cette composition. L’instrumentation, la façon d’amener le thème musical sont, elles, élaborées par celui qui décide des arrangements musicaux du groupe. Dans le cas présent, Gabriel Côté et Olivier Sirois (qui n’était pas sur scène) se sont partagé les arrangements.

    Le spectacle, ponctué des descriptions et des anecdotes toujours un peu déstabilisantes (mais drôles) de Gabriel Côté, s’est donc somme toute bien déroulé. Le public, très attentif et visiblement connaisseur (on en a entendu plusieurs applaudir après les solos), en a redemandé après la présentation des pièces. Ne sachant laquelle rejouer, la Troupe s’est lancée dans un jam sur Blue Monk, une classique du jazz. On pouvait y sentir le plaisir que les membres avaient à jouer et plus de liberté dans les solos, notamment dans celui de la contrebasse.

    Si vous êtes intéressés à entendre la Troupe des Flâneurs Romantiques et leur jazz, leur disque sera disponible à plusieurs endroits qui seront annoncés sur leur page Facebook. Ils jouent aussi les mardis au Jos Dion une semaine sur deux.

    Crédit Photo: Julien St-Pierre Fortin

     

     

    Marie-Ève Fortier

    26 octobre 2015
    Région : Québec, Spectacles
    La Troupe des Flâneurs Romantiques, Le Cercle
  • [SPECTACLE] : Jane Ehrhardt + Les Louanges + Elephants in Trouble, le Pantoum, 16 octobre 2015

    [SPECTACLE] : Jane Ehrhardt + Les Louanges + Elephants in Trouble, le Pantoum, 16 octobre 2015

     

    Le Pantoum semble discipliner de mieux en mieux son public, puisqu’à 9h20 le premier groupe, Elephants in trouble, commençait à jouer vendredi dernier. Originaires d’Halifax et programmés à la dernière minute, ils ont su faire bonne impression. Mélange intéressant de musique ambiante et groovy, leurs pièces avaient toujours ce côté catchy qui fait hocher de la tête, qu’on obtient avec des mélodies et des rythmes simples, répétés, mais bien choisis. Deux chanteurs s’alternaient, l’un rappant, ce qui ajoutait un côté hip-hop Oldschool. Les solos de guitare, eux, apportaient leur couleur rock au tout.

    Entre cette performance et celle du projet de Vincent Roberge, Les Louanges, quelques personnes se sont ajoutées. J’ai pu remarquer que la saison nouvelle avait aussi apporté de nouveaux visages dans ce lieu à l’adresse secrète pas si secrète que ça. Le Pantoum avait aussi son lot d’habitués, cependant. Une fois sur scène, après un duo de batterie et basse (drum and base), ou plutôt après un habile divertissement pendant que le chanteur accordait sa guitare, Les Louanges ont présenté leur musique. Bluesy, jazzy même parfois, celle-ci m’a étonnée avec ses changements de dynamiques et ses transitions intéressantes. Avec une voix très singulière, un genre de chanter-parler avec des pointes mélodiques, Vincent Roberge a présenté des pièces aux sonorités riches, en équilibre quelque part entre le son un peu rough de la guitare, la voix planante et le rythme entraînant. Du début à la fin, il a aussi dialogué avec le public et a su le mettre à l’aise.

    Vers 11h, le public était prêt à entendre Jane Ehrhardt. Quand je pensais à cette artiste, n’ayant écouté que Terminus, son dernier maxi, je me disais que sa musique réconfortante était parfaite à écouter en automne. Elle a cependant su me surprendre vendredi dernier par une variété intéressante. Chantant autant en anglais qu’en français, elle savait tantôt nous émouvoir avec son folk doux aux accents presque country, et pourtant nous ébranlait ensuite avec un rock ou un blues percutant et avec quelques dissonances bien placées. On a même eu droit à une valse, chose que je ne pensais jamais entendre dans cette salle-là. Une instrumentation complète, qui comportait guitares, basse, batterie, piano et violoncelle, supportait le tout. Le public, très attentif, semblait lui aussi avoir apprécié. Jane a terminé avec Parvis Céleste, une pièce de Terminus, puis avec une reprise imprévue de Lilac Wine en rappel.

     

     

    Marie-Ève Fortier

    19 octobre 2015
    Région : Québec, Spectacles
    Elephants in Trouble, Jane Ehrhardt, Le Pantoum, Les Louanges
  • [ENTREVUE + PRESTATION] Philippe Brach, Bonne journée, 16 septembre 2015

    [ENTREVUE + PRESTATION] Philippe Brach, Bonne journée, 16 septembre 2015

     

    Philippe Brach, c’est un artiste de talent qui a sa teinte particulière, son petit côté fucké et plein de passions bizarres. Pour le mettre à l’aise, on lui a concocté une entrevue et une performance à la bonne franquette, avec un petit brin de fantaisie. De son bord, il nous a souhaité une Bonne journée à sa façon.

     

    Pour ceux qui ne le connaissent pas, Philippe Brach en est depuis tout récemment à son deuxième album, intitulé Portraits de famine (dont on a fait la critique). Il s’est dit très content de la réception de celui-ci par le public et la critique, majoritairement positive à son égard : « J’suis content, très content. D’ailleurs hier il y a Claude Rajotte qui a donné un 9 sur 10 à l’album. J’tais très très très, très heureux». C’est un résultat auquel il fallait s’attendre, puisque l’artiste s’était déjà dit satisfait du travail mis sur son album au cours de notre dernière entrevue avec lui. Lorsqu’en plus on travaille avec Louis-Jean Cormier (qui réalisait l’album), pas le choix d’y aller à fond : «avec Louis-Jean tu sais ben que ça finit en fanfare pis toute,» explique-t-il en riant. «Scuse, c’est quand même assez difficile de faire une entrevue quand il y a un python royal», s’exclame déjà Philippe Brach, qui a tenu Mouton le serpent tout au long de notre entretien. Oui, vous avez bien lu: pour lui changer les idées, on a apporté un python royal à notre invité. Des fois, un brin de folie rajoute de beaux moments aux entrevues.

    Bref. Nous n’avons pas trop parlé de son travail avec Louis-Jean, question qu’il avoue s’être fait poser sans relâche depuis la parution de l’album. On lui a plutôt demandé comment s’était passée sa collaboration avec Klô Pelgag, qu’on peut entendre sur une des chansons de l’album et qui a fait une apparition dans un des spectacles de Brach : « Klô c’est une bonne amie ; elle est super ouverte, super cool…Elle est venue nous voir en studio, elle a fait les tracks qu’elle avait à faire pis après ça on est allés boire de la bière. J’étais content de travailler avec elle. Je l’ai connue au festival en chanson de Petite-Vallée, dans les rencontres qui chantent, il y a comme sept ans… Ouais, ça fait un boutte qu’on se connaît…» Et là, Mouton a fait son capricieux, ce qui a interrompu sa réponse, avant qu’il ajoute : «Bref ça faisait un boutte que je voulais travailler avec elle, pis c’était comme l’occasion parfaite finalement.» Le résultat est plus qu’intéressant, surtout du fait que leurs deux univers se recoupent parfois, tous les deux bizarres à leur façon. «Ouais, elle est capable d’être fuckée », réplique Brach en riant lorsque je le lui fais remarquer.

    Dans Portraits de famine, on touche à des sujets très variés, passant de l’avortement à la taxidermie. C’est que Brach a des sources d’inspiration aussi multiples pour ses textes que pour sa musique : «Des fois c’est très personnel, des fois c’est super fictif. Parfois, je m’inspire des gens qui m’entourent. Ça dépend vraiment tout le temps. » Né pour être sauvage, notamment, raconte l’histoire d’un animal… du point de vue de l’animal. Cependant, Brach nous avoue y mettre du sien dans toutes les histoires qu’il raconte, et même celle-là : « J’essaie souvent de faire un rapport à moi-même ou une espèce d’analogie à quelque chose d’autre dans mes chansons. Par exemple quand je parle de taxidermie.» Brouillant les cartes, on ne sait donc jamais quand Brach parle de faits purement fictifs ou quand il chante sa vie en sous-entendus. C’est peut-être ce qui rend ses chansons touchantes.

    Toujours est-il qu’il est convaincant même lorsque ses chansons parlent d’une situation qu’il n’a pas vécue, comme c’est le cas dans L’Amour aux temps du cancer. Cela nécessite un certain travail, explique-t-il : «C’est ça qui est tough aussi, de parler du cancer quand tu ne l’as jamais eu et d’essayer d’être le plus juste possible pour que ce soit vrai, senti… C’est tough en criss. Mais parler avec des gens qui ont vécu de près ou de loin le cancer ça aide.» Avec un bagage de 14 ans en improvisation théâtrale, il est normal que ce type de recherche, la construction de personnage, soit intéressant pour Brach. Il explore donc des horizons qui lui sont inconnus pour s’y immerger le temps d’une chanson: «En ce moment je suis en train d’écrire un texte sur la transsexualité, et il me manque de jus. Je n’aurai pas le choix d’aller voir des transsexuels ; va falloir que j’en parle avec eux pour bien les cerner parce que sinon je vais me mettre à dire n’importe quoi et ça ne sera pas très vrai.»

    En plus de ses talents d’improvisateur, Philippe Brach incorpore beaucoup d’éléments de ses autres passions dans sa musique. Notamment, on a pu constater qu’il aimait les animaux et les costumes grâce aux pochettes de ses deux albums. En outre, ayant une passion avouée pour le cinéma, il est normal que certaines de ses chansons soient «des histoires inventées vraiment de toutes parts, plus cinématographiques, comme des scènes de cinéma, littéralement». Ce goût de la mise en scène se retrouve aussi dans les spectacles de Brach, qui aime en mettre plein la vue. «Klô c’est pas la personne qui va le plus upstager, qui va être la plus show off», m’avait-il dit lorsqu’on parlait de sa collaboratrice. Elle a pourtant son genre sur scène, sa folie à elle, mais elle n’est pas le showman que Brach cherche à être.

    Ainsi, en plus du contenu, Philippe Brach soigne le contenant, le concept dans lequel il offre sa musique. C’est ce qui frappe lorsqu’il parle de son troisième album (l’autre est sorti il y a quelques semaines seulement !) : «Je suis déjà en train de penser au troisième album…J’y pense, mais j’ai juste quelques phrases de griffonnées. Je n’ai vraiment pas grand-chose au fond, mais je pense déjà au visuel de la pochette. Je commence déjà à ramasser des images que j’aime bien pour ça.» Il voit aussi cet opus éventuel comme étant le moyen d’explorer jusqu’au bout un autre de ses buzz, comme il les appelle : les chorales d’églises et les chants gospel. C’est un intérêt qu’il avait déjà manifesté dans sa première entrevue avec nous : «Ouin, je sais. J’veux pousser à bout cette idée-là, j’ai pas encore décroché de mon buzz. Donc j’ai l’impression que le troisième album ne sera vraiment pas pop ; plus soul, pas mal moins accessible, plus chorale, église… le genre de truc que j’me pète un buzz,» dit-il en ajoutant qu’il ne se soucie pas trop du fait que ça vende ou non avec cette formule.

    Brach aura bien le temps de changer d’idée ou d’approfondir son buzz, puisqu’il sera en tournée pour la prochaine année afin de présenter Portraits de famine. Avant qu’il prenne place pour la performance live, on lui a posé une dernière question. Comme, au fil des entrevues, Brach dévoile toujours de nouveaux passe-temps plus inusités les uns que les autres, on s’est demandé s’il n’avait pas une autre passion saugrenue à nous partager. En riant, mais quand même un peu sérieux, il nous avoue : «C’est un peu cave c’que je vais dire, mais je caresse le désir de tourner la roue à la Roue de fortune chez vous. J’achète pas de gratteux dans la vie… à part des Roues de fortune… Parce que mon rêve c’est d’être sélectionné pour tourner la roue,» dit-il avec un sourire en coin. «J’aimerais ça inviter tous mes amis, les costumer en gens un peu BS, pis jouer un personnage… Mais pour ça, il faut que j’en achète en crisse parce que si un jour j’deviens trop connu, ça va être moins possible. C’est ça. J’en achète en tournée, j’peux en acheter un shitload des p’tits gratteux de même.» On le croit, parce qu’il en avait même un avec lui pendant l’entrevue ! «Pis c’est vraiment juste pour le stunt. Le montant que je gagnerais, je pourrais le donner à une fondation. Quand je gagne de l’argent avec ces gratteux-là, je les crisse à la dompe pareil, j’vais même pas les échanger. C’est sûr que ma passion pour les animaux est pas mal plus forte que ma passion pour les Roues de fortune chez vous, mais ouais.»

    Alors, fans finis de Philippe Brach, vous saurez quoi lui pitcher à son prochain spectacle !

    Marie-Ève Fortier

    8 octobre 2015
    Entrevues
    bonne journée, Philippe Brach, video
  • [À VOIR] Les sessions Cambium

    [À VOIR] Les sessions Cambium

    Les sessions Cambium, c’est quoi ? C’est le résultat de la collaboration bénévole du collectif LIM∅NADE, de Cambium Lab Sonore et des artistes émergents d’ici. Cette initiative est née principalement du plaisir de créer, mais permet aussi de nous partager à nous, amateurs de musique, un produit original et de qualité.

    L’idée de base est de Samuel Wagner, le chanteur d’Harfang. Le concept, lui, est assez simple. À mi-chemin entre le vidéoclip et les sessions live, m’a-t-on expliqué, les sessions Cambium permettent de juxtaposer l’atmosphère d’une performance live à un concept esthétique et à une mise en scène travaillée. La qualité sonore et visuelle est aussi au rendez-vous. En ce sens, ce projet se différencie des nombreuses initiatives similaires qui émergent un peu partout ces temps-ci (on peut penser aux Tiny Desk Concerts, aux sessions de BRBR ou même à la perfo live filmée par nous-mêmes à ecoutedonc.ca).

    À raison d’une par mois, les sessions Cambium seront dévoilées progressivement à partir de la semaine prochaine. Celle qui s’en vient, la première, présentera une pièce de Harfang dans le décor surréel d’une vieille Église. Ecoutedonc.ca y était, et on vous réserve quelques informations supplémentaires pour la présentation de la première vidéo.

    Alors que les secteurs de la musique et de la création en général se révèlent être des milieux où il est difficile de faire sa place, cette initiative se démarque non seulement par son concept, mais aussi par l’esprit d’équipe qu’elle dégage. En travaillant tous les uns pour les autres, les différents acteurs des sessions Cambium savent sortir du lot et semblent montrer une nouvelle avenue possible pour les artistes.

    Crédit photo: LIM∅NADE

    Marie-Ève Fortier

    6 octobre 2015
    Nouvelles
    Cambium Lab Sonore, Harfang, limonade, LIM∅NADE
  • [SPECTACLE] Emilie & Ogden (+Tora), L’Anti, 3 octobre 2015

    [SPECTACLE] Emilie & Ogden (+Tora), L’Anti, 3 octobre 2015

    (Photos : Marion Desjardins)

    J’étais un peu étonnée en entrant à l’Anti à la vue des quelque 90 chaises posées là (ça ne faisait pas beaucoup de place pour marcher, ça). Pourtant, elles ont toutes été occupées hier soir à l’occasion du premier spectacle d’Emilie Kahn à Québec en tant que tête d’affiche. Accompagnée d’un batteur (Dominic Lalonde) et d’un bassiste (Francis Ledoux), elle s’arrêtait ici après quatre jours de tournée pour la promotion de son nouvel album, 10 000, paru le 2 octobre. Sans oublier la présence d’Ogden, sa harpe.

    C’est en duo avec elle qu’Emilie a commencé son spectacle, tout en douceur. Après quelques mesures, ses musiciens l’ont rejoint pour compléter le tout. La musique d’Emilie & Ogden, c’est une pop raffinée au rythme fluide, qui vient chercher, avec les potentialités de sa harpe, des avenues presque inexplorées. Même la voix d’Emilie Kahn, aux inflexions particulières et d’un aigu envoûtant, semble refléter les effets de son instrument. Les deux autres musiciens, quant à eux, viennent compléter et enrichir ce noyau. En effet, la basse vient contrebalancer les aigus et la batterie vient appuyer les moments forts pour contraster avec les moments doux. Lalonde et Ledoux, il faut le noter, ont fait preuve d’un talent notable pour mettre Emilie et sa musique en valeur. Même le son de l’Anti, une salle de spectacles habituellement axée vers le rock, m’a étonnée par sa qualité (il faut remercier un certain David pour cela).

    Alors que les salles assises en incommodent plus d’un, l’auteure-compositrice-interprète semblait à l’aise avec cette atmosphère. Après le spectacle, elle m’a confirmé que c’était en raison de la grande écoute que cela permettait. Et il est vrai que le public d’hier soir était plus qu’attentif à sa musique, qui demandait un certain silence pour en entendre les subtilités. En outre, cela a permis une atmosphère intime qui se prêtait bien à l’attitude plutôt réservée de l’artiste, semblant nous confier ses anecdotes plus que de nous les raconter. C’est ainsi qu’elle nous expliqua, par exemple, que sa chanson intitulée Dream avait été enregistrée en hiver, en pleine tempête de neige, ce qui contrastait avec l’ailleurs abordé dans le texte. Justement, on pourrait dire que l’atmosphère dégagée par ce groupe relève du rêve.

    Après quelques remerciements, ce dernier a terminé en douceur, en decrescendo et sans rappel. Son album est disponible sur Itunes et on en a même fait la critique.

     

    Première partie – Tora

    Avant Emilie & Ogden, c’était cependant le groupe australien Tora qui avait ouvert le bal. Avec une entrée en matière indie-folk aux accents électroniques, ils m’ont d’abord évoqué Alt-J ou Half Moon Run. Cependant, on peut noter quelque chose de très particulier chez ce groupe : il semblerait que les influences des différents membres ressortent quand ceux-ci sont mis en évidence. On fluctuait donc d’un style à l’autre tandis que les trois des cinq membres s’échangeaient le lead vocal tout en jouant de leur propre instrument. Ce qui était franchement indie-folk a donc glissé vers la vieille pop à la Justin Timberlake pour passer ensuite rapidement par le hip-hop, le tout enrobé d’un rendu très électro. Le résultat : des chansons progressives et un mariage réussi entre le pop et le folk. Il faut aussi reconnaître au groupe le mérite d’avoir joué tout ce qu’il était possible de jouer en live : hormis quelques effets enregistrés, tout était fait avec des instruments ou avec des effets de voix. Contents d’avoir joué à Québec, et ce devant une salle attentive et qui a visiblement aimé, les membres du groupe ont cependant été déstabilisés, eux, par l’immobilisme d’une salle assise. Toujours est-il que plusieurs personnes sont allées acheter leur disque après leur performance.

    Marie-Ève Fortier

    4 octobre 2015
    Région : Québec, Spectacles
    Emilie & Ogden, Emilie Kahn, L’Anti Bar & Spectacles, Tora
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