Y’a pas à dire, c’est une belle année pour le folk d’ici, toutes langues confondues. Pourquoi cette remarque? Parce que mes oreilles ne se lassent pas de Shenanigans, du duo montréalais Fire/Works. Le duo composé de David Lagacé et Jonathan Peters propose un album qui embrasse tout en douceur l’automne et ses couleurs flamboyantes. Un brin mélancolique sans tomber dans le mélo, Shenanigans est parfait pour se laisser traîner les pieds dans les tas de feuilles mortes du voisinage.
Même s’ils ont eu de l’aide de plusieurs amis, Lagacé et Peters ont touché à à peu près tout sur cet album réalisé avec l’aide de Jean-Bruno Pinard (qui s’est également occupé de la prise de son). Ils ne peuvent donc pas le renier. Tant mieux, parce que malgré ses tendances très référentielles (on entend du Patrick Watson par ici, du Groenland par là, y’a du Plants & Animals dans certains racoins, on a même un petit arrière-goût de Coldplay à ses débuts à certains endroits), Shenanigans est un album qui risque de passer un petit bout de temps dans votre lecteur CD. Lagacé et Peters n’ont pas voulu réinventer la roue ou faire dans le chic sophistiqué, ils se sont contentés d’écrire les meilleures chansons qu’ils étaient capables d’écrire. Et ils sont capables d’en écrire des maudites bonnes.
Des pièces qui se démarquent? J’aime beaucoup Elephants, parfait amalgame de tout ce qui marche sur Shenanigans. Une chanson aussi riche, texturée, colorée que le reste de l’album.
Voilà un album dont vous devriez encore entendre parler à la fin de l’année. Je vous laisse avec une autre excellente chanson, Underneath Your Skin, qui ouvre l’album. (Coyote Records)
On avait déjà une bonne idée de la sensibilité pop de Fanny Bloom après l’avoir entendue au sein de La patère rose et écouté son premier album solo, Apprentie-guerrière.
Sur Pan, Bloom se jette dans le vide, mais elle n’a pas oublié son parachute. Il s’agit là d’un album pop bien de son temps, où les airs rythmés côtoient les jolies balades. Pour une irrésistible Piscine (l’hymne de l’été de plusieurs), on retrouve une magnifique Mélodie. Si Danse nous plonge dans la dance pop des années 1980, sur Il faudra, les synthés sont résolument de notre époque.
C’est un peu comme si Bloom avait décidé de jouer avec tous les sens de Pan, faire appel à tous ses… pans (OK, j’arrête!).
Du côté des textes, Fanny Bloom a une jolie plume pour le genre, oui, ça parle d’amour, de relations interpersonnelles, de l’essoufflement de sentiments, de narcissisme, des sujets simples du quotidien. Cependant, mais les textes se tiennent très bien, Bloom ne cherche pas la rime facile et sa jolie voix récite si bien ces mots qu’on écoute attentivement. Tant mieux si les images nous viennent immédiatement à l’esprit. La poésie, c’est pas toujours l’art de l’incompréhensible.
Sur le plan musical, comme je le disais plus tôt, on passe par pas mal toutes les couleurs de la palette pop, mais sur Pan, mademoiselle a un faible pour les années 1980. Le quadragénaire en moi, qui a vécu les années 80 en même temps que ses premières poussées d’acné, ne lui en tiendra pas trop rigueur, car elle est allée chercher les meilleurs éléments (la flûte de pan, sérieux!) tout en évitant les pièges grotesques du genre. De plus, on peut compter sur la présence des Misteur Valaire (dont certains membres ont également été membres de La patère rose… je ne sais pas pourquoi je vous dis ça, vous le savez sûrement) sur deux chansons (Deadbird et Il faudra). Et Étienne Dupuis-Cloutier, qui était derrière la console sur Apprentie guerrière, est de retour comme coréalisateur et complice. En passant, la réalisation est impeccable.
Somme toute, comme deuxième effort solo, Pan est un album solide qui devrait permettre à Fanny Bloom de mieux se faire connaître dans le merveilleux monde de la pop. Il y a sûrement une place pour de la pop intelligente, mais contagieuse, sur nos radios et dans nos médias électroniques. Et Fanny Bloom est la personne parfaite pour occuper cette place.
Bon, enfin, une semaine après tout le monde, j’ai quelques minutes pour vous parler du nouvel opus d’Hôtel Morphée, Rêve américain.
Avec leur premier album complet, Des histoires de fantômes, les membres d’Hôtel Morphée avaient montré leur capacité de créer des ambiances, des moods, un peu à la manière d’autres groupes de multi-instrumentistes talentueux qu’on a vu poindre depuis le début de la décennie. Paru au début de l’été, le premier extrait de Rêve américain, l’excellente Dernierjour, montrait que la bande menée par Laurence Nerbonne était capable d’évoluer, de dépasser ses propres limites et de créer de maudites bonnes chansons qui ne se contentent plus d’installer des ambiances.
Tout ce qu’on pouvait espérer, c’était que le reste de l’album soit taillé dans le même roc. Dès les premiers instants de Rêve américain (la pièce-titre), on respire : on a affaire à du solide. Laurence Nerbonne est particulièrement en verve et en voix. Les paroles sont sombres, mordantes, à l’image de cette Amérique peinte en rouge et en noir. Les musiques sont clairement moins orchestrales qu’auparavant, mais elles ne manquent pas de punch.
Les violons sont toujours très présents, mais ils laissent une plus grande place aux claviers (Blaise Borboën-Léonard, qui violonne et touche à tout), aux guitares (André Pelletier), bien senties, et à la batterie (Stéphan Lemieux), plus rythmée que jamais. La réalisation de Philippe Brault est soignée, et on évite les pièges de la sur- (et de la sous-) production.
Je dois avouer que la première écoute m’a laissé un peu sur mon appétit. Puis après deux ou trois autres lectures de l’album, j’ai fait joué à répétition des pièces comme Psycholove (une histoire d’amour entre psychopathes) et Des milliers de gens (une vraie bombe). Au fil des écoutes, j’en suis venu à une drôle de conclusion : et si Rêve américain était l’album qu’on attendait en vain depuis des années de la part d’un groupe de pop indé comme Metric? Ce n’est pas comme si le groupe n’assumait pas son désir de traverser les frontières avec sa musique!
Même Je reviendrai et son usage de l’autotune (qui m’horripile quand je m’en rends compte) se glisse sous ma peau et titille mes neurones comme peu de chansons du genre l’ont fait ces dernières années. Et cette Petite mort, qu’on souhaite remixée pour l’entendre pendant des heures, elle fait mal? Pas grave, on en veut encore!
En quelques mots, Rêve américain aura dévoilé un Hôtel Morphée plus mordant, plus caustique, plus sale, mais vachement plus sexy. L’attente en a valu la peine. Rêve américain ne se contente pas de frapper la cible, il la défonce.
Le duo Alfa Rococo n’a jamais fait les choses à la hâte. On n’a donc pas été surpris qu’il s’écoule quatre ans entre le dernier album du duo composé de Justine Laberge et David Bussières (Chasser le malheur) et Nos coeurs ensemble, une nouvelle proposition qui devrait connaître beaucoup de succès, tant au champ gauche qu’au sein du grand public.
Si Chasser le malheur était un peu sombre dans son propos et dans sa musique, Nos coeurs ensemble est tout le contraire : ça démarre sur les chapeaux de roues avec la grosse pop vitaminée de Lumière, qui n’est pas sans rappeler Passion Pit par son énergie et sa bonne humeur. Comme pour montrer que le couple avait évolué pendant ces quatre ans, voilà Bussières qui prend le devant de la scène (alors que la paire avait presque toujours chanté ensemble) sur Coeur qui explose, une de ces chansons qui nous replonge tout droit dans ce que les années 1980 avaient de meilleur.
Le sexe des anges. On la met en boucle et on danse.
Tiens, sur la pièce-titre, un bijou pop qui devrait tourner à la planche dans les radios, c’est Justine Laberge qui prend les commandes des voix, qu’elle conservera pour plusieurs des pièces qui suivront. Good move, diraient les Anglais, qui permet au duo d’ouvrir ses horizons mélodiques, qui étaient plutôt limités sur les premiers albums.
Pipeline. On finit notre drink à toute vitesse, on la met en boucle et on danse. Exactement le genre de chanson qui fait qu’après « deux ou trois écoutes de l’album, on se surprend à chanter du Alfa Rococo dans la douche (avec un solo de «airdrum» bien senti en plus de ça) » (citation tirée de la critique de Sébastien Moffet, du blogue Le canal auditif, que je suis assidûment, ne serait-ce que pour avoir un autre point de vue). Des chansons construites comme Pipeline, il y en a beaucoup, faut alors qu’elles soient solides en titi pour qu’on les apprécie. Défi relevé ici.
L’album se poursuit avec d’autres beaux morceaux pop intelligente, bien ficelée, qu’on entend trop peu au Québec. Dans un français plus que convenable et exportable, en plus. Et la réalisation de David Bussières est impeccable.
Le trio Volatil, Marcher et Deux montre parfaitement de quoi Alfa Rococo est capable tant sur le plan des paroles que de la musique. Des chansons riches, qui ont l’air toutes simples et qui peuvent être jouées guitare-voix, mais qu’on a décorées avec le plus grand soin.
Nous. On la met en boucle et on danse jusqu’à épuisement.
Si on pouvait résumer Nos coeurs ensemble, on pourrait dire que le troisième album d’Alfa Rococo est une bouffée d’air frais, gracieuseté d’une formation qui n’a pas eu peur de prendre quelques risques tout en proposant un album qui pourrait difficilement être plus accessible.
Ce groupe a attiré mon attention à la sortie de son premier album (l’excellent O’ Be Joyful) en 2012. D’ailleurs, il a fait partie de mon palmarès de fin d’année et je vous avoue qu’aujourd’hui, je l’aurais beaucoup mieux placé qu’à la 32e position et j’ai encore beaucoup de plaisir à l’écouter.
C’est donc avec une grande joie que nous avions appris, ce printemps, que le deuxième album du couple américain (Cary Ann Hearst et Michael Trent) allait paraître à la fin de l’été. C’est avec une plus grande joie encore que j’ai eu la chance d’en entendre une ou deux nouvelles à Bonnaroo.
Les attentes étaient donc très élevées. Hearst et Trent allaient-ils être en mesure de les surmonter?
Swimmin’ Time est un album rempli de catastrophes. Des incendies, des inondations, des tempêtes, des ruptures… Les temps sont durs pour les héros des histoires de Hearst et Trent. Pourtant, dans chacune des chansons, il y a cette lueur d’espoir. Le bonheur n’est jamais loin. Et il se chante, comme en font foi les perles qui peuplent cet album.
La première pièce de Swimmin’ Time, The Devil is All Around, est du pur Shovels & Rope, une chanson aux airs country-folk assez simple pour être jouée à deux qui mettra les fans de la première heure à l’aise tout en donnant aux nouveaux fans l’idée de remonter quelques années en arrières pour mieux connaitre le duo. À la deuxième pièce, l’entraînante Bridge on Fire, Shovels & Rope a repoussé ses limites. Cette chanson, une histoire de rupture qui sonne autant comme une claque au visage qu’un coup de pied au derrière, où règnent la rythmique du piano, les distorsions de la guitare et la parfaite harmonie des deux voix, se déguste à répétition, comme la suivante, la langoureuse Evil.
La suivante, After the Storm, deviendra sans aucun doute un classique et occupera une place de choix dans toutes les prestations du duo. Chanson très triste, mais remplie d’espoir, After the Storm est chantée et jouée avec une belle intensité qui vient nous retrousser les poils à chaque écoute.
Quelques chansons plus loin, Pinned aurait facilement pu se trouver sur O’ Be Joyful. Ce qui n’est pas un gros défaut, car jusque là, on avait habilement évité la redite, ce piège qui attend toute formation spécialisée dans la pop de grange (ou l’Americana, si vous préférez).
Sur la pièce-titre, un autre petit défaut se remarque (et se démarque), malgré les mélodies géniales : sur Swimmin’ Time (la pièce comme l’album), Shovels & Rope chante presque tout le temps (disons 99 %) en harmonie. Presque jamais une voix seule. Presque toujours à deux. Avec la voix de Trent qui se fait souvent un peu enterrer par celle, beaucoup plus punchée, de Hearst.
Ces défauts sont vite oubliés quand on écoute les cuivres d’Ohio, qui nous amènent dans un monde que Tom Waits n’aurait certainement pas renié. Du pur bonheur, qui se poursuit sur le petit country-folk Mary-Ann & One-Eyed Dan.
Malgré les quelques défauts de Swimmin’ Time, quand on regarde les pas en avant accomplis par Shovels & Rope, on ne peut qu’être admiratifs. Il y a à peine deux ans, Hearst et Trent vivaient à l’arrière de leur fourgonnette. Aujourd’hui, ils nous offrent un des meilleurs albums de pure Americana depuis un petit bout de temps.
Si vous êtes à Montréal, allez les voir le 28 septembre prochain au Corona Virgin Mobile. C’est une joyeuse expérience en soi.
Willows, c’est le nouveau nom de scène de l’auteure-compositrice-interprète franco-manitobaine Geneviève Toupin. Willows, c’est aussi le titre de ce nouvel album (le troisième en carrière), folk et intimiste à souhait, qui constitue un retour aux sources métisses et métissées pleinement assumées de cette artiste talentueuse.
Sur ce disque, Toupin joue sur tous les tons : l’atomosphérique, l’introspectif et le ludique ont tous droit de cité. Les arrangements sont sobres, mais magnifiques. La réalisation (avec Émilie Proulx, une autre qui a du talent à revendre) est soignée. Les pièces ont été enregistrées live, comme elles devraient être jouées en spectacle.
Les chansons sont résolument folk, mais chacune a sa personnalité, évitant ainsi le piège de la redite et de la facilité. On apprécie le caractère entraînant d’Entends-tu, comme on est touché par la beauté des choeurs sur Au-delà des étoiles. On sourit à l’avalanche de mots de Bill Murray comme on craque pour les harmonies parfaites sur Je t’emmènerai.
En bref, un bel album, qu’on écoute autant tranquille dans son salon que sur la grande route, les fenêtres grandes ouvertes, quelque part entre Willows (CA) et Willows (SK).
Vous connaissez Angus et Julia Stone? Ce duo folk-pop frère-soeur originaire de l’Australie est peu connu sur le continent nord-américain, mais son premier album, l’excellent Down the Way, a été un grand succès en Australie et il s’est bien vendu en Europe. Le duo s’est ensuite séparé momentanément, Julia et Angus ont enregistré des albums solos chacun de leur côté, puis un bon matin, on apprend que les Stone sont à Malibu pour enregistrer un nouvel album avec le réalisateur Rick Rubin.
Puis voilà, le 1er août dernier, voilà Angus & Julia Stone sur les tablettes des disquaires de partout dans le monde!
Les amateurs du genre, comme moi, seront bien sûr comblés par cet album tout en finesse et en beauté, qui reprend à peu près où la paire nous avait laissés avec A Heartbreak, où Angus chante avec désinvolture et Julia sort sa voix d’ange. Le rythme est entraînant, les guitares sont omniprésentes, et la magie opère dès que les deux voix s’unissent pour chanter en harmonie. Rien qui ne réinvente la roue, mais on est installés sur des essieux solides!
Se succèdent ensuite une série de pièces parfaites pour rouler sur l’autoroute les vitres grandes ouvertes, chanter les refrains en faussant un brin (My Word for It), faire des pa papa pa pa… pa (Grizzly Bear) ou se laisser aller au groove de la magnifique Hearts Beat Slow.
On distingue ensuite assez bien les chansons d’Angus (plus rythmées, d’une facture folk beaucoup plus classique) de celle de Julia (beaucoup plus lentes, mais aux paroles beaucoup plus dures, comme si elle voulait compenser pour sa voix angélique). Le mélange des deux styles évite la redite (qui était quelque peu présente sur les albums solo).
On ne peut pas parler de cet album sans parler de la sublime Death Defying Acts, qui semble sortie tout droit de l’esprit de Beth Gibbons, la chanteuse de Portishead. Julia Stone chante avec une gravité qu’on ne retrouve que dans une Glory Box ou une Half Day Closing : I’m everything that I’ll ever be / I’m everthing that I’ve ever seen / I’m everything that slowly falls / I’m everything but I am nothing at all.
On la savait capable d’être aussi bouleversante (elle a composé quelques bijoux en solo), mais ici, avec Angus, solide à la guitare, Julia nous arrache le coeur.
Côté réalisation, on peut dire que Rick Rubin a été assez discret. Généralement partisan d’une approche plutôt minimaliste, il n’avait pas trop de travail à faire avec les Stone, qui n’ont pas l’habitude d’ajouter du bruit pour le plaisir. Les arrangements sont donc simples, mais efficaces, et servent à mettre en valeur les principaux atouts du groupe : les voix et la guitare d’Angus.
Voilà un album livré avec coeur, qui nous prend par les sentiments.
On a hâte de voir le groupe en spectacle. Malheureusement, les billets pour la prestation du 22 octobre à Montréal se sont tous envolés. On trouvera bien un moyen d’aller les voir ailleurs.
La formation montréalaise Sunfields offre aujourd’hui son deuxième album, le sympathique Habitat, un album qui se marie très bien à la belle saison qui commence.
Avec Habitat, les membres de Sunfields ont misé sur la simplicité. On ne se perd pas dans les arrangements et les orchestrations ultra-complexes, on met en valeur les mélodies lumineuses et la voix douce et agréable de Jason Kent.
Pourtant, cette simplicité n’est en aucun temps synonyme de simplisme. On voit que Kent et ses acolytes ont travaillé très fort pour que toutes les pièces du puzzle s’imbriquent en douceur. Habitat est un savant mélange de pop, de rock canadien et de folk auquel on a ajouté une touche de soul et de country. On se promène un peu entre les genres, mais jamais on n’a l’impression de perdre le fil conducteur. La route est sinueuse, mais le paysage est fort joli.
L’auteur de ces lignes est tombé follement amoureux de Drunken Choir, au milieu de l’album, probablement le truc le plus « Canadian indie rock » que vous entendrez cette année. Et il y a cette Oh Dear Mother, qui n’était pas sans me rappeler quelques bons airs de Wilco.
En résumé, les gars de Sunfields ont réussi là où plusieurs se cassent les dents : un album simple sans être simpliste, varié sans être n’importe quoi, familier sans être archi-référentiel. Habitat est ce genre d’albums qui tient éveillé et de bonne humeur lors de ces longs voyages. En fait, on a envie de faire quelques détours pour faire durer le plaisir.
En mars dernier, Benoit Pinette (Tire le coyote) a donné un spectacle au Morrin Centre de Québec, dans une salle à l’acoustique fantastique faite sur mesure pour le folk western spaghetti de l’auteur-compositeur-interprète. Un spectacle qu’il allait enregistrer pour lancer un EP quelques mois plus tard. Un concert intime que nous avons eu le bonheur de voir (critique ici). Bon, ça n’était pas parfait, le coyote n’était pas en voix, et on nous a averti qu’il allait devoir reprendre l’enregistrement de sa voix plus tard.
Quelques mois plus tard, voici le produit fini, Tire le coyote au Morrin Center. Pour ceux qui étaient là, on se referme les yeux et on revoit le show… avec un coyote au sommet de sa forme.
Dès les premières notes de Tétard, on reconnaît le country-folk de Pinette. On reconnaît ses textes savoureux, sa belle poésie. On reconnaît la musique qui s’écoute attentivement. Surtout, on reconnaît la voix de Pinette. Aiguë. Un brin nasillarde. Vibrante. Accompagnée parfaitement par la voix de Sylvia Beaudry et par les instruments de ses complices, dont l’inséparable Shampoing à la guitare.
Si Pinette avait composé son programme en faisant appel à l’ensemble de son répertoire, sur ce disque, il fait la part belle à des compositions qui figuraient sur son premier album, dont la magnifique Confetti, qui en ressort grandie. Reste Calfeutrer les failles pour représenter Mitan.
Tire le coyote au Morrin Center rend tout à fait justice au talent de Benoit Pinette, qui nous donne encore la chair de poule juste en chantant comme un Neil Young qui veille tard. À écouter sans modération.
Éric Goulet est présent dans le paysage musical québécois depuis plus de 20 ans déjà. Vous vous souvenez probablement de lui comme le gars qui chantait Comme un cave, de Possession simple :
Peut-être que vous êtes plus jeunes et que ce sont Les Chiens qui vous ont fait connaître Goulet. Ce groupe a influencé un bon nombre d’artistes que vous écoutez aujourd’hui.
Si vous avez écoutez ces pièces dans l’ordre, vous ne serez pas surpris d’apprendre que Goulet a lancé un album country il y a quelques années. Un album plutôt bien accueilli, qui a permis à Goulet de se rapprocher d’un genre musical qu’il dit avoir toujours apprécié. C’est dans cette veine qu’il nous offre aujourd’hui la suite de sa quête country avec le bien nommé Vol. 2.
Qu’est-ce qui se dégage de cet album country sans complexe? Il s’en dégage un album simple, sans prétention, comme si Goulet et sa bande débarquaient dans votre cour pour pousser quelques pièces le temps d’enfiler quelques petites frettes sous un soleil de plomb. En fait, en écoutant les deux premières chansons, on se dit que Goulet serait tout à fait à l’aise dans un des nombreux festivals western qui tapissent la carte du Québec rural.
Bien que la plupart des pièces sur Vol. 2 sont des compositions originales, il faut souligner la reprise de Comme un cave. Cette chanson, pleine de hargne au tournant des années 1990, est devenue en quelques pirouettes une chanson country pleine de tristesse et de résignation, comme si c’était sa vraie nature.
La vraie nature. C’est ce qu’on remarque avec un grand plaisir en écoutant Goulet chanter ses peines. Notre homme y est comme un poisson dans l’eau. Me tiendras-tu la main pourrait faire sourciller ceux qui se sont mis au country pour être à la page, mais les vrais, eux, apprécieront la grande simplicité de la chanson, malgré la richesse de ses arrangements et la solidité des musiciens qui l’accompagnent (Ariane Ouellet, Carl Prévost, Rick Haworth, Mark Hébert et Vincent Carré).
Ma préférée? Qu’est-ce que ça donne?, une pièce enjouée qui donne le goût de danser!
Éric Goulet est plus un Kenny Rogers qu’un Johnny Cash : dans son country, la pop n’est jamais bien loin, la lumière ne se cache jamais complètement derrière l’ombre. Malgré les balades tristes et les remises en question (c’est du country, après tout), Vol. 2 est un baume pour les oreilles meurtries.