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    [ALBUM] Harfang – Flood
    Harfang EP Avril
    Harfang Flood

    Une voix vaporeuse, une atmosphère musicale onirique qui rappelle un peu celle de Bears of legend, Harfang est l’une des perles de la scène de Québec de cet hiver. Ainsi, il assure une continuité dans leur style, sans prendre de gros risque au niveau musical. C’est tellement harmonieux qu’on a l’impression d’écouter une seule pièce. La voix de Samuel Wagner y est mise plus en avant contrairement à Harfang EP  qui avait plus de guitares, de batterie et de rythme.

    On s’embarque facilement dans une rêverie brumeuse avec l’introduction minimaliste de Canopée construite avec une simple amplification de guitare. Les premiers accords de Lesson Learned (qui n’a rien à voir avec Matt and Kim ) avec de légères amplifications, nous font monter les larmes aux yeux et pincer le cœur. La batterie et les voix volatiles nous perdent par la suite dans notre mélancolie. On se revivifie un peu avec un changement de rythme sur Set Sail, la pièce suivante. Toute une ballade au fil de l’eau en somme.

    Le bémol c’est qu’on casse notre rêverie en plein milieu, à la fin du titre UFO, avec un «ça va bien là, les gars tout de suite», à camoufler s’il vous plaît?

    Vous pouvez écouter l’EP sur le Bandcamp du groupe et venir assister à leur lancement vendredi prochain, le 24 avril au Cercle avec les Men I Trust en première partie.

    [bandcamp width=100% height=120 album=1897321448 size=large bgcol=ffffff linkcol=e99708 tracklist=false artwork=small]

    Alice Beaubien

    20 avril 2015
    Albums
    Critique, Ep, Harfang, Indie folk, Le Cercle, quebec, scène locale
  • [SPECTACLE, ENTREVUES] Charlie Foxtrot, Mauves, les Trimpes, Whisky Gallery et Doloréanne à la salle Multi du complexe Méduse

    [SPECTACLE, ENTREVUES]  Charlie Foxtrot, Mauves, les Trimpes, Whisky Gallery et Doloréanne à la salle Multi du complexe Méduse

    C’est après un bon repas à la Cuisine, sympathique resto-bar non loin, que je me suis dirigée jeudi soir dernier vers la salle Multi du complexe Méduse pour assister à une soirée plutôt bigarrée à tendance rock.

    J’oublie rapidement la porte encore barrée à 19h15 pour pénétrer dans la grande salle. Je rejoins des amis, je serre des mains et je jase. L’ambiance est bonne, bien que les gens arrivent au compte-gouttes. Dans le courant de la soirée, j’ai le plaisir de m’entretenir avec Alexandre et Émile, de Doloréanne, ainsi qu’avec Paul, de Whisky Gallery. Voici mon humble compte rendu de mes rencontres et des prestations.

    DOLORÉANNE

    La foule du Multi accueille d’abord la jeune formation de Québec venue briser la glace vers 20 h 30. Les cinq brillants et talentueux êtres humains – pour la forme : les frères à la fougueuse crinière Éloi et Émile (piano et clavier; chant/guitare), Frédérique (violon), Jean-Christophe (batterie) et Alex (basse) – nous interprètent les chansons de leur album éponyme, ainsi que leur petite dernière, Émilie – il paraîtrait que le vidéoclip s’en vient d’ici deux semaines, on a hâte! – pour une prestation sans anicroche.

    On aime la simplicité de leur poésie franco, leur attitude ingénue sur scène et, bien entendu, le caractère distinct qu’apporte le violon à leur pop rock rafraîchissante. Les musiciens nous offrent un spectacle bien rodé, et ça sonne bien, quoiqu’on aurait peut-être poussé un peu plus le son du micro.

    Après la prestation, je retiens Alex par la manche pour lui poser quelques petites questions. « J’peux-tu amener Émile? » Bien sûr, chose!

    En parlant avec les gars, on devine leur passion pour la musique, pour leur projet, et que cette passion sert de trame à leur amitié. On sent que l’un ne va pas sans l’autre. Doloréanne m’apparaît comme une belle histoire de collaboration et d’entraide. Les gars sont sincères et lucides – on peut suivre sporadiquement leurs aventures dans la section Blogue de leur site Internet – et on comprend que leur succès est assuré par le travail de chacun. « On fait tout, tout seuls, pas mal. » Plutôt inspirant.

    Récemment, ils ont engagé quelqu’un pour faire la promotion de leur nouveau single, Émilie, dans les stations de radio. Cette démarche semble porter fruits, puisqu’on peut désormais les entendre à CKOI et peut-être sur les ondes d’une autre station populaire bientôt.

    Doloréanne

    Côté spectacles, la bande consacre ses énergies à la préparation d’un futur album. Je leur souhaite du courage dans cette belle entreprise et tout le succès qu’ils méritent.

    Vous pouvez vous procurer gratuitement leur musique via leur superbe site Internet, conçu par nul autre qu’Alex. Vous pouvez les retrouver également sur Bandcamp, YouTube, Twitter et Facebook.

    www.doloreanne.com
    http://doloreanne.bandcamp.com/

     

    WHISKY GALLERY

    La soirée prend un virage punk rock avec la prestation d’une autre jeune formation de Québec formée de trois bons chums : Paul (batterie), Hugo (guitare et voix) et Maxime (basse).

    En jasant avec Paul, j’apprends que leur histoire a débuté dans un party de Noël au cours duquel ils ont joué côte à côte. Comme ça a cliqué, ils ont continué à pratiquer ensemble régulièrement pour le plaisir. Quelques années plus tard, ils se sont décidés à former un groupe et ont adopté le nom de Whisky Gallery (à l’issue d’un mardi soir bien arrosé sur une terrasse du Petit-Champlain. On aurait aimé y être.)

    « On a pris notre temps, on a rodé nos trucs, puis là, on s’est lancé. Ça va super bien à date. »

    Effectivement, les choses ont déboulé plutôt vite pour le groupe au cours des derniers mois. On a notamment pu voir la bande de joyeux lurons se produire à différents endroits (la Source de la Martinière, le sous-sol du Cercle et le bar L’Autre Zone). On les attend d’ailleurs à nouveau à la Source au mois de mai, et ils seront de passage au Bal du Lézard en avril.

    Les gars ont des fans fidèles et semblent d’ailleurs avoir attiré le tiers du public présent à la salle Multi. On comprend leur succès grandissant en constatant leur assurance et leur prestance sur scène. C’est du solide. Les refrains s’ancrent dans la tête. Le public chante et bouge dès les premières notes, lesquelles ne mentent pas : on a affaire à du travail musical de qualité. Qui écrit et compose? « C’est Hugo à 97,7 % (…) ça dormait dans lui depuis longtemps. » Compte tenu des influences punk des années 90 du groupe (No Use for a Name, NOFX, Lagwagon, Pennywise, pour ne nommer que ceux-là) et du fait qu’ils veulent ratisser large côté public, Hugo compose en anglais. Ils envisagent écrire en français lorsqu’ils seront plus établis. Parlant franco, Louis-Jean Cormier et Jean Leloup tournent en boucle dans les oreilles de monsieur Parisé depuis quelques semaines. J’approuve!

    Whisky Gallery

    On peut encourager le band en se procurant CD et articles promotionnels (comme leurs superbes T-Shirts) et en suivant leur parcours sur leur page Facebook et Reverbnation.

    https://www.facebook.com/whiskygallery69
    http://www.reverbnation.com/whiskygallery

     

    LES TRIMPES

    La préparation de la scène prend une bonne vingtaine de minutes. La foule, réchauffée, en profite pour aller s’hydrater. Beaucoup d’équipement derrière les Trimpes, qui fêtent leur première année d’existence. Les connoisseurs autour de moi devinent ce qui s’en vient rien qu’à voir les guitares et les amplis s’aligner. On a hâte d’entendre ce qu’ils nous préparent (c’est la première fois que je les vois).

    Eh, bien! Toute qu’une claque su’a yeule, si je puis m’exprimer ainsi. S’il y a quelque chose qui va me hanter toute ma vie par rapport à cette soirée-là, c’est sans contredit le chanteur, dont l’abdomen proéminent orne le chandail promotionnel du groupe (sur lequel on peut lire Rock ‘n’ Big). Impossible de détacher mes yeux du ventre dodelinant qui jette de l’ombre sur le reste de la formation. Je ne suis pas convaincue par le concept, mais j’essaie tout de même de me concentrer sur la musique.

    Trimpes

    En gros, on a affaire à du bon vieux rock, trash à souhait et chanté en français. Les gars semblent aimer se prendre pour des rock stars. Ça boit, ça pose les jambes dans les airs, ça crache, ça fait semblant d’éjaculer sur la foule, ça envoie du mousseux partout pis ça garoche des cannettes sur la foule, laquelle a d’ailleurs reculé pour éviter de recevoir les matières et sécrétions projetées. Petit malaise, mais j’en ai vu d’autres.

    Autre malaise : la choriste – dotée d’une belle voix, juste et puissante – n’est sorti des coulisses que pour une seule chanson et elle a passé celle-ci à se déhancher et à se frotter sur le chanteur. Je trouve que ce n’est rien pour briser les bons vieux stéréotypes associés au genre.

    Tout de même, je constate qu’une partie du public est conquise. Il y a des têtes qui hochent. Le son est un peu brouillon et on ne distingue pas très nettement les paroles, mais on devine bien les thématiques de par les fréquents mouvements de bassin de Germ (le chanteur). À chacun ses goûts.

    Pour découvrir : https://www.facebook.com/lestrimpes

     

    MAUVES

    Oui, j’ai un parti pris pour Mauves. Ils sont bons, beaux, puis aussi – t’sais – talentueux à souhait. Qui plus est, ils sont issus de mon quartier chouchou, Limoilou. (Je vous invite tout de suite à consulter leur page Web pour découvrir leur parcours intéressant.)

    http://www.mauves.ca/

    Abstraction faite des difficultés lors de l’ajustement des micros, des problèmes de basse et des lunettes qui tombent (cute pareil), c’est une solide demi-heure de prestation.

    Inutile de mentionner que le style tranche solidement avec le précédent. Les gars sont en feu, à leur manière. Il s’agit d’un rock introspectif, sensuel. La foule se calme un peu le pompon et écoute avec attention; la magie opère.

    La voix pénétrante d’Alexandre Martel nous hante. ET ON COMPREND ENFIN LES PAROLES!

    On s’immisce avec intérêt dans l’univers planant du groupe et on suit avec curiosité leur prestation ponctuée des savoureux déhanchements qui les caractérisent si bien.

    Mauves

    Est-ce que je peux toucher?

     https://www.facebook.com/lesMauves?fref=ts

    CHARLIE FOXTROT

    Avant que leur prestation ne commence, je me dis : « Ah, j’vais aller me coucher après une toune ou deux, je suis fatiguée pis je travaille demain. »

    Je suis restée jusqu’à la fin.
    J’ai même dansé.
    J’ai également participé à un mosh pit (fosse, devrait-on dire) de huit personnes et quart devant la scène.

    Force est d’admettre que la fatigue n’a pas eu raison du plaisir fou que j’ai eu à les entendre. Leur énergie est contagieuse, leur thématiques, crues et pertinentes, et leur interprétation, tout simplement impeccable. Que vouloir de plus?

    Je me procure cette semaine leur dernier disque, La mèche courte.

    Charlie a offert une prestation sentie et colorée aux quelques irréductibles spectateurs. J’ose affirmer que l’excellent groupe de rock garage franco, qui roule sa bosse depuis 2009, méritait cependant mieux en terme de nombre de spectateurs présents. Toutefois, les quelques chanceux qui sont restés ont su faire honneur au plancher de danse.

    La pose suivante m’a permis d’immortaliser leurs jolis minois :

    Charlie Foxtrot
    Merci, Charlie, de nous avoir fait suer ;)! Revenez vite, je vous en prie.

    plectreCF

     https://www.facebook.com/charliefoxtrotqc/
    https://charliefoxtrot.bandcamp.com/

    Tatiana Picard

    28 mars 2015
    Entrevues, Spectacles
    Charlie Foxtrot, complexe Méduse, Critique, Doloréanne, Les Trimpes, Mauves, Salle Multi, Spectacle, Whisky Gallery
  • Critique : Elbow – « The Take Off and Landing of Everything »

    Critique : Elbow – « The Take Off and Landing of Everything »

    Le groupe britannique Elbow est considéré chez lui comme un des plus grands groupes des dernières décennies. Les fans adulent Guy Garvey et sa bande et les professionnels reconnaissent la contribution extraordinaire du groupe à la musique pop britannique.

    Elbow

    Il faut dire qu’il n’y a rien de vraiment choquant ou d’inaccessible dans la pop teintée de folk d’Elbow, même si les membres du groupe refusent de faire de nombreux compromis qui leur permettraient de faire des tonnes de fric. Un genre de Coldplay avec de l’intégrité et un respect de ses racines tout en n’ayant pas peur de sortir des sentiers battus.

    The Take Off and Landing of Everything est le sixième album d’Elbow et ceux qui suivent le groupe depuis ses débuts sauront apprécier le léger virage entrepris tout en affichant plus que jamais sa filiation avec Genesis, époque Peter Gabriel (est-ce l’influence du Real World Studios, où l’album a été enregistré?), que Garvey apprécie énormément.

    Cet album parle des petites fins, des grands débuts, des arrivées, des départs (Garvey a mis fin à une longue relation amoureuse), de la quarantaine, quoi. Dit de même, ça a l’air triste, mais non, au contraire, les chansons de cet album sont généralement remplies d’une belle sérénité. On reconnaît la situation, on se retrousse les manches, pis on travaille à l’améliorer.

    Musicalement parlant, The Take Off and Landing of Everything touche droit au coeur. Même si les paroles sont sereines, la musique, elle, demeure un brin mélancolique. Les influences de Gabriel sont indéniables. Dans certaines chansons, on sent que Garvey et sa bande ont écouté du Justin Vernon récemment. Les pièces sont longues (elles dépassent toutes les 5 minutes, sauf trois – et sur ces trois, il y a une chanson de 4 min 56). Les textures sont enveloppantes, les arrangements sont riches et complexes.

    The Take Off and Landing of Everything est un album parfait pour une fin d’hiver qui s’allonge. On accepte sereinement sa situation, ce qui ne veut pas dire qu’il ne reste pas un brin de mélancolie.

    Pour ceux qui aiment les choses qui font mouche tout en douceur.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=cqnIbueM5fE&w=480]

    Elbow – The Take Off and Landing of Everything (Polydor)
    8/10

    Jacques Boivin

    12 mars 2014
    Albums
    8/10, Critique, Elbow, mars 2014, The Take Off and Landing of Everything
  • Critique : Patrice Michaud – « Le feu de chaque jour »

    Critique : Patrice Michaud – « Le feu de chaque jour »

    Le Gaspésien Patrice Michaud nous présente un solide deuxième album qui ne surprendra peut-être personne, mais qui a le mérite d’être bien fait.

    Alliant pop, folk, rock, country et j’en passe, Michaud a concocté un disque des plus accessibles, qui s’écoute très bien et qui devrait aller lui chercher un très grand nombre de fans, surtout que les radios vont probablement l’adorer.

    le-feu-de-chaque-jour-patrice-michaud-cover

    C’est un peu normal. Tout d’abord, la réalisation est sans tache. André Papanicolaou, guitariste et réalisateur, a fait un excellent boulot, tant du côté des riffs qui égratignent juste assez que du côté de la direction d’orchestre. Excellent idée que de le recruter, celui-là, de même que l’omniprésent François Lafontaine (Karkwa), Simon Blouin, Mark Hébert et Audrey-Michèle Simard (qu’on a vue, entre autres, dans Galaxie).

    Le Gaspésien d’origine habite maintenant Lotbinière, où se terre une Salomé Leclerc qui aura prêté sa voix unique à deux des meilleures pièces de l’album (la pièce-titre, Le feu de chaque jour, qui a un petitgros côté Springsteen dans sa richesse, et M’espères-tu?, chanson remplie de doutes et de paroles savoureuses (« faire jouer jusqu’au bout le best-of de nous »), où les deux voix, qui se complètent déjà à merveille, s’allient parfaitement aux guitares de Nicolaou et au piano de Lafontaine.

    Justement, tant qu’à parler de voix… Celle de Michaud n’est pas spectaculaire, mais elle est belle, juste assez grave, rauque et virile.

    Comme il l’avait fait sur son premier album (Cap-Chat/Montréal sur Le triangle des Bermudes), Michaud laisse aller le conteur en lui sur La faille de San Andreas. Trois minutes de poésie pure. D’ailleurs, les textes de la grande majorité des chansons sont du bonbon, même si ça sent parfois la petite rime trouvée sans trop se forcer.

    Non, Michaud n’a pas réinventé le bouton à quatre trous. Mais Le feu de chaque jour n’a jamais eu cette ambition. Cet album, c’est l’album d’un gars qui a de belles histoires à raconter sur le désir et qui a tout le talent nécessaire pour les mettre en musique, que ce soit en rockant ou en jouant les chansonniers sur le bord du feu.

    Un « grower » qui s’apprécie au fil des écoutes.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=9VCpDQaz9m0&w=480]

    Patrice Michaud – « Le feu de chaque jour » (Spectra Musique)
    7/10

    Jacques Boivin

    5 février 2014
    Albums
    7/10, Critique, février 2014, Le feu de chaque jour, Patrice Michaud
  • Critique : Filter – « The Sun Comes Out Tonight »

    Filter-The-Sun-Comes-Out-TonightNostalgique des années 90? De l’alternatif-industriel? Des années phares de Nine Inch Nails, Marilyn Manson et Stabbing Westward, pour ne nommer qu’eux? Eh bien, si vous l’avez manqué à sa sortie en juin dernier, il est grand temps de vous procurer le dernier album de Filter!

    Si, de son côté, Trent Reznor a musicalement grandement changé depuis Broken et The Downward Spiral, Richard Patrick offre avec The Sun Comes Out Tonight la suite logique à Short Bus et Title of Record. Après avoir erré pendant quelques albums s’échelonnant sur une décennie (le décevant The Amalgamut, le plutôt moyen Anthems for the Damned et le pas tout à fait The Trouble with Angels), Filter revient en force avec ce nouvel opus. On y retrouve toute la rage et l’énergie d’antan, avec une plus grande maîtrise des thèmes et une plus grande unité au sein de l’album. Le groupe a certainement gagné en maturité, mais il ne semble avoir rien sacrifié de sa formule initiale. Un vrai délice pour les fans et les nostalgiques du genre!

    Pour ceux qui trouveront exactement ce qu’ils cherchaient dans cet album, celui-ci s’ouvre ironiquement sur « We Hate It When You Get What You Wanted ». Le ton est instantanément donné : alternatif, électro, industriel, la voix parfois mélodieuse de Patrick, et ses cris parfaitement contrôlés, sans oublier une touche d’obscénité avec un « Motherfucker » bien placé. « What Do You Say » lui succède et rappelle la sonorité générale des premiers albums, sans oublier le classique « Hey Man Nice Shot ». Après ces deux coups puissants, Filter enchaîne en douceur avec « Surprise », l’une des balades de l’album. Une fois de plus, de vieux incontournables comme « Take a Picture » reviennent en tête, mais la nouvelle chanson est toute aussi efficace que les succès souvenirs. Et le rythme de l’album ne semble aucunement brisé : l’enchaînement des balades et des morceaux plus endiablés se fait à merveille.

    Quelques autres point forts : « Self Inflicted » et « Take That Knife Out of My Back », qui brillent par leur violence, et « It’s My Time », une balade incroyablement touchante sur la peur de la maladie ou d’un autre mal. Le « Please, not me… » de Patrick résonne telle une prière, avec force et émotion, et bouleverse à chaque fois. Heureusement, « It’s Just You », une chanson lumineuse remplie d’espoir, lui succède et termine l’album.

    En somme, ce dernier opus de Filter est un nouvel incontournable de leur discographie. Moi qui préfère Title of Record, je place The Sun Comes Out Tonight en solide deuxième place. Et peut-être même en première place, selon l’humeur, puisque ce nouvel album triomphe là où peu d’albums de ce genre excellaient dans les années 90 : thématiquement, il n’est pas composé que de rage et de déprime, mais offre plutôt, par moment, quelques moments positifs. Et cela fait toute la différence.

    [youtube http://www.youtube.com/watch?v=vS6PTb0A9vU&w=480]

    Ma note : offset_9

    Stéphane Desjardins

    30 septembre 2013
    Albums
    9/10, Critique, Filter, septembre 2013, The Sun Comes Out Tonight
  • Critique : Jay Jay Johanson – « Cockroach »

    Jay Jay Johanson CockroachLe crooner suédois à la mélancolie éternelle est de retour! Et il poursuit sur la lancée qu’il avait entreprise il y a deux ans avec Spellbound (qui avait fait partie de mon top 50 annuel). Si Spellbound marquait un retour aux sources relatif en revenant à un son très épuré, mais en étant essentiellement un album acoustique, Cockroach se rapproche des Tattoo, Whiskey et Poison qui ont marqué la fin du dernier millénaire en contrastant la voix unique de Johanson avec un son trip-hop qui n’était pas sans rappeler le Bristol Sound adopté par Portishead, Tricky et Massive Attack.

    Évidemment, Johanson a beaucoup évolué depuis cette période (il a même eu une période dance plutôt difficile à supporter) et sa palette de tons de gris s’est grandement étendue. Il existe bien des chansons comme Mr Fredrikson, qui aurait pu se tailler une place sur les premiers albums, mais il va parfois plus loin, comme sur Orient Express, où on distingue bien chacun des instruments (plutôt que des boucles froides et impersonnelles).

    Malgré la présence de quelques excellentes pièces (les deux pièces susmentionnées, Hawkeye, toute en finesse, Dry Bones, une de ces petites fantaisies a capella que se permet parfois Johanson, Laura, tendre pièce guitare-voix constituant un joli point final), on s’ennuie un peu à l’écoute de cet album. Bon, Johanson n’a jamais été du type jovial et sa mélancolie est un peu sa marque de commerce, mais alors que Spellbound avait assez de qualités pour nous garder attentifs du début à la fin, Cockroach semble surtout un excellent album à mettre en musique de fond lors d’un souper paléo (vous voyez bien que je suis cool et branché!).

    C’est loin d’être un mauvais album, c’est juste un album qui s’écoute bien en faisant autre chose. Et je sais Johanson capable de beaucoup mieux. Petite déception.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=dDbZz5QA2m0&w=480]

    Ma note : offset_6

    Jacques Boivin

    24 septembre 2013
    Albums
    6/10, Cockroach, Critique, Jay-Jay Johanson, septembre 2013
  • Critique : Janelle Monáe – « The Electric Lady »

    Janelle Monae - Electric LadyDire que Janelle Monae est une artiste talentueuse relève du cliché grossier. Cette jeune femme, qui fait tout pour qu’on se concentre sur son oeuvre, est tout simplement unique, ne serait-ce que par l’étendue de ses influences et de la grande versatilité de son R&B, qu’on classe dans la soul psychédélique (drôle d’étiquette…).

    Son album précédent, The ArchAndroid, avait connu un grand succès critique et commercial. Il était donc normal que sa suite, The Electric Lady, soit plutôt attendu.

    Les attentes sont plus que satisfaites et les rares sceptiques sont confondus. Pendant plus d’une heure, Monae nous fait danser, tripper, sourire, tout en poursuivant là où The ArchAndroid nous avait laissés. Voyez-vous, madame Monae ne pouvait pas se contenter de remodeler la pop, il fallait qu’elle fasse ça dans une série d’albums-concept où The Electric Lady constitue les quatrième et cinquième mouvements. Elle fait une fois de plus appel à des collaborateurs de talent (Prince, Solange, Erykah Badu, Miguel) qui viennent apporter leur touche personnelle.

    C’est bon? Oh, oui! Dès les premières mesures de l’ouverture du mouvement (Suite IV Electric Overture), on est transportés dans un genre d’hybride R&B où le western-spaghetti semble croisé avec de la soul. Elle se paie ensuite le luxe d’une chanson sensuelle remplie de guitares et de… Prince dans Givin’ Em What They Love. Oui, message. Le premier simple, Q.U.E.E.N., avec Erykah Badu, est un bijou d’une grande beauté, et on ne parlera pas de la richesse de l’interprétation!

    La pièce-titre, Electric Lady, interprétée en collaboration avec Solange, qui partage d’ailleurs un grand nombre de qualités avec Monae (dont une grande authenticité), est une autre bombe hybride qui sera un immense succès sur les pistes de danse.

    Parlant d’immense succès sur les pistes de danse, des pièces beaucoup plus lentes comme Primetime (avec Miguel), sensuelles à souhait, mettent le gros plain cochon au goût du jour.

    J’aurais envie de vous parler de toutes les chansons comme je l’ai fait pour d’autres albums, mais il y en a 19, elles sont pas mal toutes excellentes et franchement, je préfère les danser plutôt que les décrire.

    Ce qui importe vraiment, c’est l’interprétation sans faille de Monae et de ses incroyables choristes. Et les guitares électriques. Man, le solo sur We Were Rock n’ Roll! Avec les choristes qui chantent limite gospel…

    Bon, vous comprenez, c’est comme ça jusqu’à la fin. On veut arrêter d’en parler, mais il ressort toujours un petit détail ultra cool. Le ukelele sur Dance Apocalyptic. L’ambiance James Bond sur Look Into My Eyes. Et ainsi de suite. Pendant plus d’une heure.

    Dans un univers pop où tout semble faux et fabriqué, et où les défauts sont corrigés, un long album riche comme The Electric Lady est une petite révolution en soi. Un album que vous allez encore écouter à pareille date l’an prochain.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=tEddixS-UoU&w=480]

    Ma note : offset_9

    Jacques Boivin

    10 septembre 2013
    Albums
    9/10, Critique, Janelle Monae, septembre 2013, The Electric Lady
  • Critique : Grouplove – « Spreading Rumours »

    Grouplove - Spreading RumoursSi on voulait décrire le groupe californien Grouplove à un néophyte, on pourrait tout simplement dire : « Tu connais Bon Iver? Ben c’est exactement le contraire! »

    Même s’ils sont parfois brouillons et font un peu n’importe quoi, les cinq membres de la formation (et amis inséparables) ont une énergie qui ferait pâlir d’envie un Alex Ebert sur le speed et une joie de vivre absolument contagieuse.

    Leur premier album, Never Trust A Happy Song, était une suite jouissive de pièces vitaminées parfaites pour faire la fête. Et c’est encore plus vrai sur scène, où ils entrent en communion parfaite avec leurs fans, tout aussi déjantés qu’eux. J’ai rarement eu autant de plaisir que lorsque j’ai vu Grouplove à Bonnaroo en 2012.

    On comprendra donc que j’étais un peu fébrile lorsque j’ai appris que le groupe enregistrait un deuxième album. Le premier échantillon, la pièce Ways to Go, aura fait décupler les attentes des fans. Une vraie bombe pop, beaucoup plus riche en synthés que ce que le groupe nous avait habitués. Est-ce que le groupe allait entreprendre un virage étonnant?

    Aucune inquiétude, dès la première écoute de Spreading Rumours, malgré une présence plus marquée des claviers, on a affaire au même groupe, qui fait un peu n’importe quoi, mais qui le fait avec un bonheur contagieux!

    En ouverture, I’m With You a de quoi étonner avec ses claviers omniprésents et ses rythmes électroniques. Même Christian Zucconi commence en chantant plutôt qu’en criant! Mais à mesure que la chanson avance, qu’Hannah Hooper fait ses Ah Ah Ah et ses Oh Oh Oh si reconnaissables, que la batterie s’excite, on se rassure. Borderlines And Aliens suit immédiatement (littéralement, sans aucune espèce de pause). Et cette chanson, c’est du pur Grouplove. Des riffs accrocheurs, une basse super funky, et Zucconi et Hooper qui se laissent complètement aller. Ça y est, on saute partout dans le salon, la power pop du quintette californien nous envahit et notre copine demande de baisser le son parce que franchement, Zucconi, elle est pas capable.

    Schoolboy est aussi rock que sa précédente, mais je dois avouer qu’elle me plaît un peu moins. Peut-être parce qu’on a tendance à oublier son existence dès les premières mesures de Ways To Go, une chanson construite presque parfaitement, avec ses couplets tranquilles suivis d’un refrain qui se chante en bondissant!

    Shark Attack est chaleureuse et s’écouterait bien sur le bord de la plage avec un petit drink rafraîchissant. C’est un peu comme si de la vitamine D sortait de vos haut-parleurs. C’est ensoleillé de même! La voix de Hooper se marie encore aussi bien aux cris de Zucconi, comme le démontre la très edwardsharpesque Sit Still, une autre de ces relatives pauses qui permettent de donner un break aux pieds tout en nous obligeant presque à taper des mains.

    Hippy Hill est une de ces pièces plus lentes que j’aime moins de ce groupe, mais je dois avouer que les sonorités d’inspiration dubstep ont un petit quelque chose de spécial. Le refrain de What I Know, une chanson plus power que pop, rappelle vaguement un croisement entre Weezer et les Campesinos. Après quelques écoutes, on ne peut que conclure que cet album est truffé de références et de clins d’oeil de toutes sortes. Mais ces références n’enlèvent rien, heureusement.

    Didn’t Have to Go est la girlie song de l’album, où Hannah Hooper prend totalement les devants et fait une Katy Perry d’elle-même. Bitin’ The Bullet a un petit côté psychédélique… OK, un GROS côté psychédélique où les membres du groupe ont l’air d’en avoir fumé de l’excellent.

    News to Me est une autre chanson où on reconnaît facilement la signature du groupe, à une nuance près : comme il arrive souvent sur Spreading Rumours, Zucconi et Hooper s’échangent les couplets d’une même chanson, ce qu’ils n’avaient pas vraiment fait sur Never Trust… Raspberry a un petit côté Pixies et un refrain absolument accrocheur. À mon avis, ça va tourner sur les radios friandes d’indie.

    Save the Party for Me termine Spreading Rumours en beauté, en finesse et avec une sobriété surprenante pour un groupe qui ne fait pas dans la dentelle. Encore un heureux mariage entre Hooper et Zucconi… et une guitare.

    Comme Never Trust A Happy Song, Spreading Rumours aura certainement ses détracteurs. Si vous aimez juste les chanteurs à la voix d’or, oubliez Grouplove. Zucconi crie plus qu’il ne chante et parfois, ça peut être fatiguant. Mais cette façon de faire cadre parfaitement avec l’énergie du groupe, une énergie décuplée pendant les spectacles. En fait, même si on a beaucoup de plaisir à les écouter à la maison, les pièces de Spreading Rumours semblent, pour la plupart, avoir été écrites pour être jouées live et faire danser encore plus les fans déchaînés dont je fais partie.

    Non, l’album n’est pas parfait, loin de là. La girly song de Hooper, bien que plus dynamique que ce qu’on avait sur l’album précédent, me laisse plutôt froid. Et puis faut se l’admettre, on aurait pu se passer d’une ou deux chansons (News to Me, par exemple) sans que l’album n’en souffre trop.

    En résumé, sans être l’équivalent indie pop d’un OK Computer, Spreading Rumours permettra à Grouplove de faire le plein de nouveaux fans sans s’aliéner ceux de la première heure. En plus, il s’agit d’un album idéal pour éloigner les premières neiges et réchauffer le dehors cet automne… un automne dansant, on dirait bien!

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=VGvHnDeS12o&w=480]

    Ma note : offset_7

    Jacques Boivin

    9 septembre 2013
    Albums
    7/10, Critique, Grouplove, septembre 2013, Spreading Rumours
  • Critique : Volcano Choir – « Repave »

    Volcano Choir - RepaveJustin Vernon a mis Bon Iver sur la glace, le temps de savoir composer avec l’immense succès qu’il a connu. Ça n’a pas empêché ce boulimique créatif de se lancer dans toutes sortes de projets (allant même jusqu’à se partir un petit band de soul-rock – les Shouting Matches – ou à mettre sa main un peu partout sur le dernier Kanye).

    Volcano Choir est un de ces à-côtés de Vernon, un mariage entre le collectif post-rock Collections of Colonies of Bees et le troubadour d’Eau Claire, Wisconsin. Le premier album, Unmap, avait connu un certain succès d’estime et se distinguait quand même pas mal de For Emma, Forever Ago, le premier album de Bon Iver.

    De son côté, le nouvel album, intitulé Repave, semble la suite logique de Bon Iver, tant dans l’atmosphère que dans les instrumentations et la voix de Vernon. Tout y est : la voix de fausset, le plus que parfait mélange d’instruments acoustiques et de synthés, l’atmosphère froide, mais intense. Mais en mieux. Comme si Collections of Colonies of Bees avait donné à Vernon le peu qui lui manquait pour dépasser ses propres limites.

    Ça commence dès les premières secondes de Tiderays. Les premières secondes laissent toute la place à un orgue, qui est rejoint rapidement par une guitare acoustique au son pur et à la voix en plusieurs couches de Vernon. Évidemment, on n’en reste pas là. L’intensité grimpe lentement et on a des frissons quand la chanson se termine. Acetate bouge un peu plus, et il fait bon d’entendre d’autres voix que celle de Vernon dans les choeurs.

    Comrade est du pur Vernon. Couplets ultra-atmosphériques, mais relativement calmes, ce qui ne nous empêche pas de savoir que le refrain va nous en mettre plein la gueule. Les attentes sont plus que satisfaites, on voit nos poils se hérisser instantanément. Émotion pure qui se poursuit sur Byegone, une des pièces les plus solides de l’album, qui se laisse dévoiler lentement pendant que Vernon chante avec un rythme presque Rn’B (écoutez comme il faut et fermez les yeux, vous allez voir le flow, je vous jure!).

    Alaskans est belle comme une soirée d’hiver sur le bord du foyer. Vernon sort sa voix grave (qui ressemble donc à celle de Chris Martin, de Coldplay – peut-être pour ça qu’il préfère chanter en falsetto). Dancepack est une des rares chansons de l’albums qui donne au moins le goût de taper dans les mains pendant que Vernon nous invite à prendre note qu’il y a toujours un trou dans notre coeur. Keel, un autre de ces crescendos dont Vernon a le secret, nous porte à croire qu’un doublé Justin Vernon-Patrick Watson constituerait une soirée parfaite que rien ne pourrait jamais battre musicalement. Rien à redire sur Almanac, une clôture géniale qui résumé très bien l’album.

    Comme le reste de l’oeuvre de Vernon, Repave est un album qui se déguste les yeux fermés, l’attention totalement portée sur la musique douce, mais intense de Volcano Choir. Quand Almanac se termine (beaucoup trop tôt), on a l’impression de sortir d’un rêve teinté de blanc, de froid, de neige. Vernon et ses acolytes poussent encore plus loin la douce mélancolie et ils réussissent à se surpasser, ce qui est une tâche difficile quand on a déjà quelques-uns des plus beaux albums des 10 dernières années derrière la cravate.

    Si Vernon a de la misère à composer avec le succès, il n’a aucun mal à composer de la bonne musique.

    À écouter l’esprit et le coeur ouverts.

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=f4dZbJHT7_4&w=480]

    Ma note : offset_9

    Jacques Boivin

    1 septembre 2013
    Albums
    9/10, Critique, Justin Vernon, Repave, septembre 2013, Volcano Choir
  • Critique : Daft Punk – « Random Access Memories »

    DaftPunkRAM
    Daft Punk
    Random Access Memories
    (Columbia)
    17 mai 2013

    Bon, je suis un peu en retard sur les autres, mais ça s’explique, je ne sais pas du tout comment aborder ce disque. D’entrée de jeu, soyons honnêtes, il s’agit d’un maudit bon disque qu’on va écouter longtemps, ne serait-ce que parce qu’il contient le tube de l’été (la très dansante Get Lucky). Et non, il n’est pas parfait, il traîne même en longueur à certains endroits, mais ce léger désagrément n’entache aucunement le plaisir d’écouter cette excellente proposition qui mérite plus qu’un « j’aime » sur Facebook comme critique.

    Car il s’agit ici d’une oeuvre artistique véritable et complète, un cheminement qui ne se contente pas de suivre une recette bien établie et qui comporte une certaine démarche. Les deux compères français, qui ont déjà révolutionné la musique électronique et donné le ton aux spectacles de DJ à grand déploiement, étonnent de nouveau avec ce surprenant retour aux sources, à la musique funk et disco des années 1970, rempli de vrais instruments tout en étant riche en synthés de toutes sortes, et affichant une belle brochette de collaborateurs.

    Que le fan de musique dansante ne s’inquiète pas, Daft Punk propose toujours d’excellentes pièces pour vous laisser aller le popotin comme la pièce d’ouverture Give Life Back to Music, comme l’indique son intro remplie d’énergie qui explose sur un rythme disco-house qui fait taper du pied et les voix vocodées des deux artistes. Il faut toutefois y ajouter la guitare de Nile Rogers, qui change complètement la donne. Voilà, cet album ne sera pas un ramassis d’échantillonnages (on n’en retrouve que sur Contact), il sera vrai, avec de vrais musiciens.

    Ce vrai, avec de vrais musiciens, on le ressent partout, parfois même au centuple, puisque le duo n’a pas hésité à expérimenter, à ajouter de vraies orchestrations, à faire appel à des ensembles de cordes, à des chorales, dans de nombreuses chansons, dont la sublume Giorgio by Moroder, un bijou de chanson narrée par Giorgio Moroder, un des pionniers du disco et de l’électro. La chanson commence avec un Moroder qui, du bout de ses 75 ans, nous parle de ses premiers pas. Puis une musique aux accents disco se fait ententre alors que Moroder poursuit son entrevue. Puis le séquenceur, dans une espèce de musique hypnotisante qui ne donne d’autre choix que de se laisser aller. Le génie vient plus tard alors qu’une pièce disco se transforme en une puissante envolée musicale qui donne toute la place aux orchestrations et à la rythmique, complètement déchaînée. Cette tempête musicale est un moment marquant de l’album, un point fort de la musique en 2013 qui devrait être examiné plus attentivement par ceux qui dénigraient les gars de Daft Punk parce qu’ils ne faisaient que bidouiller sur des Macs.

    Après un moment plus difficile comprenant la collaboration de Gonzales (jolie, mais qui ne lève pas) et celle de Julian Casablancas (le seul moment « fast forward de l’album »), on entend la voix de Pharell Williams pour la première fois dans Lose Yourself to Dance, un morceau heureux qui ne fait que montrer ce qu’on savait depuis toujours : pas besoin de plus qu’une guitare, une basse, un drum et un gars qui chante en falsetton pour avoir une envie irrésistible de danser. Mais cette danse, elle est organique, elle est naturelle, elle pardonne aux gauches comme moi. 😉

    On a eu le point fort, voilà maintenant le sommet émotif de l’album : la pièce Touch, une collaboration avec l’auteur-compositeur Paul Williams, va dans toutes les directions tout en gardant un fil conducteur. La chanson s’écoute comme on lit un livre, elle se savoure lentement avec tous ses mouvements, sa partie rock, sa partie chorale, sa partie frissons. Il m’a semblé que des gars comme les membres d’Harmonium n’auraient pas renié ce genre de pièces, qui s’intègrent parfaitement à la fin des années 1970 qu’elles tentent d’émuler.

    Le parfait bonheur continue ainsi jusqu’à la fin de l’album et se promène entre les collaborations avec Panda Bear et Todd Edwards (Fragments of Time, sortie tout droit d’un album de Hall and Oates) tout en demeurant un tout cohésif. La dernière pièce, Contact, se trouve elle aussi parmi les bons moments musicaux et devrait être absolument sublime en spectacle.

    On regrette un peu la relative faiblesse de la première partie de l’album, où Giorgio by Moroder trône un peu trop seul parmi les bons moments. Cependant, dans l’ensemble, il s’agit d’un pari tout à fait réussi pour Daft Punk, qui réussit à se démarquer de ses compères Justice et Phoenix tout en se rapprochant, dans l’esthétique et dans les émotions, d’un autre duo français diablement influent : Air.

    Un jour, on remerciera Daft Punk d’être sorti aussi loin de sa zone de confort.

    Jacques Boivin

    24 mai 2013
    Albums
    9/10, Critique, Daft Punk, Mai 2013, Random Access Memories
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