Désolé, certaines obligations familiales m’ont empêché de rédiger le compte rendu du spectacle de jeudi. Je me reprends ici même dès que j’ai quelques minutes. En attendant, voici quelques photos du spectacle et des premières parties :
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[ALBUM] Fire/Works – « Shenanigans »
Y’a pas à dire, c’est une belle année pour le folk d’ici, toutes langues confondues. Pourquoi cette remarque? Parce que mes oreilles ne se lassent pas de Shenanigans, du duo montréalais Fire/Works. Le duo composé de David Lagacé et Jonathan Peters propose un album qui embrasse tout en douceur l’automne et ses couleurs flamboyantes. Un brin mélancolique sans tomber dans le mélo, Shenanigans est parfait pour se laisser traîner les pieds dans les tas de feuilles mortes du voisinage.
Même s’ils ont eu de l’aide de plusieurs amis, Lagacé et Peters ont touché à à peu près tout sur cet album réalisé avec l’aide de Jean-Bruno Pinard (qui s’est également occupé de la prise de son). Ils ne peuvent donc pas le renier. Tant mieux, parce que malgré ses tendances très référentielles (on entend du Patrick Watson par ici, du Groenland par là, y’a du Plants & Animals dans certains racoins, on a même un petit arrière-goût de Coldplay à ses débuts à certains endroits), Shenanigans est un album qui risque de passer un petit bout de temps dans votre lecteur CD. Lagacé et Peters n’ont pas voulu réinventer la roue ou faire dans le chic sophistiqué, ils se sont contentés d’écrire les meilleures chansons qu’ils étaient capables d’écrire. Et ils sont capables d’en écrire des maudites bonnes.
Des pièces qui se démarquent? J’aime beaucoup Elephants, parfait amalgame de tout ce qui marche sur Shenanigans. Une chanson aussi riche, texturée, colorée que le reste de l’album.
Voilà un album dont vous devriez encore entendre parler à la fin de l’année. Je vous laisse avec une autre excellente chanson, Underneath Your Skin, qui ouvre l’album. (Coyote Records)
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Spectacle : Fontarabie (av. Fanny Bloom et Bernhari) – Impérial de Québec, 4 octobre 2014
(Photos : ecoutedonc.ca – Jacques Boivin)
Il y a des spectacles qu’on a hâte de voir parce qu’on sait qu’on va prendre part à un événement. Ce ce qui est arrivé ce samedi lorsque nous avons vu Fontarabie, le projet de Julien Mineau, prendre vie devant nos yeux et nos oreilles. Un projet ambitieux qu’evenko a accepté de présenter gratuitement dans trois villes (Montréal, Québec et Gatineau). Non seulement le spectacle était gratuit, mais en plus, nous avions la chance d’assister à deux belles premières parties : Bernhari et Fanny Bloom.
C’était donc un privilège que nous avions en ce samedi soir pluvieux et nombreux sont ceux qui ont répondu à l’appel. Ils n’ont pas été déçus.
Compte rendu chrono.
Bernhari
On l’a vu il y a à peine un mois lorsqu’il a lancé son excellent disque au Cercle. Proposant un set beaucoup plus court (mais intense) qu’à sa première visite, Bernhari et ses musiciens en ont mis plein les oreilles aux quelques spectateurs présents (on arrive tard, à Québec… mauvaise habitude). Toujours aussi intense, Bernhari a retourné sa cymbale dès la première chanson (Sagard).
Cette courte prestation aura permis au jeune Montréalais de se faire quelques nouveaux fans : les réactions autour de nous étaient plus que positives.
On était prêt pour la suite.
Fanny Bloom
Visiblement nerveuse au début de sa prestation, la jeune auteure-compositrice-interprète-reine-de-la-pop a dû changer son programme en cours de route en raison de pépins techniques. Dommage, parce que le programme (que j’ai pu entrevoir) promettait. À la place, nous avons eu des chansons beaucoup plus tranquilles qui ne rendaient pas tout à fait justice à Pan, l’album que Bloom vient tout juste de lancer.
Dommage, mais croyez-moi, la plus déçue, c’est Fanny. Cependant, cela a permis au public de conserver ses énergies pour Fontarabie.
Heureusement, nous avons eu droit à la chanson pop de l’été, la toujours pétillante Piscine.
Fontarabie
Lorsque Julien Mineau et sa douzaine de musiciens sont montés sur scène, l’Impérial était bien rempli et l’accueil a été plus que chaleureux. Mineau était en forme et ses acolytes étaient tous au diapason. Il n’en fallait pas plus pour que l’interprétation de cette oeuvre particulière qu’est Fontarabie soit un succès.
Ceux qui ont déjà écouté l’album savaient à quoi s’attendre : une oeuvre presque entièrement instrumentale, un brin expérimentale, touchante et troublante. À mi-chemin entre l’orchestre et le band rock, le groupe a tout simplement été magique, la somme de chacun formant un tout cohésif.
Pendant toute la durée de la représentation, les spectateurs étaient accrochés aux musiciens sur scène (c’était beau de les voir aller et regarder de gauche à droite, puis à gauche) et faisaient preuve d’une écoute fantastique.
Lorsque vint l’apothéose, au rappel, alors que tout le monde était au diapason, nous étions tous au bout de nos orteils (ou au bout de nos sièges pour ceux qui étaient en haut), envahis par la chair de poule. C’est ça, de la musique. Ça fait de l’effet.
Nous avons eu droit à l’événement promis. Comme on le croyait, Fontarabie est encore meilleur sur une scène que sur iTunes.
Respect, Julien.
Photos :
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Spectacle : Salomé Leclerc – Théâtre du Petit-Champlain, 2 octobre 2014
Comme elle en a fait du chemin en trois petites années, Salomé Leclerc! Je me souviens du spectacle auquel j’avais assisté alors qu’elle venait nous présenter Sous les arbres. J’étais assis à la même place, mais Salomé était plus loin derrière avec ses complices. J’avais été charmé par son folk riche et complexe, par sa voix bien sûr, mais aussi par cette façon qu’elle avait de laisser ses chansons évoluer. L’album n’avait que quelques semaines et pourtant, certaines chansons n’avaient déjà plus tout à fait la même enveloppe!
Quand on sait à quel point 27 fois l’aurore marque un grand pas dans l’évolution de la jeune auteure-compositrice-interprète, on doit l’admettre : nos attentes n’étaient pas moins que stratosphériques en cette première de tournée!
Alors, qu’en était-il?
Tout d’abord, il y a le fait que Salomé Leclerc était accompagnée d’un groupe complet (Benoit Rocheleau, Audrey-Michèle Simard, José Major et Philippe Brault). Elle n’avait plus le choix, elle devait occuper le devant de la scène. Ça tombe bien, parce qu’elle y est tout à fait à l’aise avec ses deux Gretsch qu’elle manie comme si c’étaient des poids-plume.
Salomé a ouvert le spectacle avec une Caméléon transformée, mais encore tout à fait reconnaissable. Sans tarder, elle a suivi avec une En dedans magnifique qui représente bien l’esprit du nouvel album (et qui a tout l’espace pour évoluer au fil des prestations).
Évoluer. Respirer. Qui a reconnu dès le début Partir ensemble, qui avait un petit côté pop rythmé (avec les frappes sur le tambour, j’ai pensé à Ellie Goulding)? Pas moi, en tout cas. Et cette énième version de Tourne encore? Toujours aussi bonne, quelle que soit son enrobage.
Évoluer. Respirer. Les chansons de 27 fois l’aurore sont aussi vivantes que leur auteure. Sur L’icône du naufrage, on entendait beaucoup mieux la guitare de Salomé, ce qui ajoutait un brin de chaleur à une chanson originalement glaciale. Pour Attendre la fin, je me suis fermé les yeux. Cette chanson nous touche, nous frappe, nous envoûte déjà sur disque. En spectacle, elle prend est plus grande que nature, plus grande que le Petit-Champlain.
Au rappel, Salomé Leclerc a offert une version chaleureuse de La vie d’factrie de Clémence DesRochers. Pas besoin de vous dire que le public a apprécié. Puis en clôture, Devant les canons s’est étirée en un long jam qui nous a permis d’apprécier le talent de tous les musiciens présents.
Seule déception : il restait encore beaucoup de place dans la salle. On aurait bien aimé qu’une plus grande foule vienne découvrir ce que Salomé avait dans le ventre, mais bon, le spectacle était en avant, et il était plus que bon.
On va retourner la voir dans son terrain de jeu bientôt, sûr et certain.
Les attentes? Allègrement dépassées. Quelqu’un est surpris?
Photos
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Critique : Secret Sun – « Cold Coast »
J’ai découvert Secret Sun lorsque le duo est venu jouer en première partie de Monogrenade en mars dernier. À l’époque, j’avais comparé leur électropop vaporeuse à celle des xx ou de Beach House. J’avais bien aimé.
Réalisé par François Lafontaine et Sébastien Blais-Montpetit, le premer album complet du duo composé de Simon Landry et Anne-Marie Campbell, intitulé Cold Coast, a été lancé cette semaine sur étiquette Bonsound. Pas de surprise, il s’agit, en règle générale, d’électropop atmosphérique où les synthés et les programmations de batterie se mêlent aux guitares de Landry et à la douce voix Campbell.
Certaines pièces, comme Can’t You See, plongent carrément dans le soft-rock et on imagine très bien cette pièce sur une cassette audio 90 minutes enregistrée dans les années 1980, quelque part aux côtés de pièces d’Alan Parsons. D’autres, comme la très mécanique Don’t Behave, sont tellement riches en textures qu’il faut plus d’une écoute pour les apprécier. À moins qu’on se contente de danser dessus sans réfléchir plus loin… Oui, oui, ça se fait très bien!
Qu’ils soient soient pop, trip-hop ou un peu plus rock, les univers visités dans cet album forment un tout cohérent que l’auditeur visite avec plaisir. À écouter avec un drink en 5 à 7 ou dans son pyjama, devant un bon feu.
Très belle carte de visite. On retourne les voir au Cercle en décembre prochain.
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PROMO/CONCOURS – Les Nuits FEQ présentent Alex Nevsky le 11 octobre
On nous l’avait promis, eh ben voilà! Les Nuits FEQ sont de retour avec trois superbes spectacles d’artistes talentueux à un coût tout aussi ridicule (les billets sont 15 $). Plus tard cet automne, nous aurons l’occasion d’assister aux prestations des Barr Brothers et de The Seasons, mais pour le moment, concentrons-nous sur la première de ces soirées qui s’annoncent magiques :
Le 11 octobre prochain, l’Impérial de Québec accueillera Alex Nevsky, qui aura la chance d’inaugurer cette nouvelle saison. Le sympathique auteur-compositeur-interprète viendra nous présenter son spectacle tiré de l’excellent album Himalaya mon amour, comme il l’avait fait en juillet dernier sur la scène Hydro-Québec pendant le Festival d’été.
Sera-t-il encore aussi charmeur et rigolo? Invitera-t-il encore le public à se frencher et à se pogner les fesses? On ne s’ennuie jamais avec Nevsky.
En première partie, le groupe indie-pop dansant Foreign Diplomats et indie-rock Current Swell ne devraient avoir aucun mal à charmer les spectateurs et faire monter le thermostat de quelques degrés.
Bien entendu, ecoutedonc.ca y sera, parce que les spectacles d’artistes renommés à prix raisonnable, on aime ça.
Rendez-vous à l’Impérial de Québec le samedi 11 octobre prochain à 20 heures (les portes ouvrent à 19 heures – ne tardez pas trop). Pour plus de détails et acheter des billets, rendez-vous sur www.infofestival.com ou appelez au 418-523-3131.
CONCOURS – GAGNE UNE PAIRE DE BILLETS POUR LE SPECTACLE D’ALEX NEVSKY
Comme nous l’avons fait le printemps dernier, nous faisons tirer une paire de billets parmi nos lecteurs et abonnés. Pour participer, c’est simple : dans les commentaires ci-dessous, dites-nous sur quelle scène Alex Nevsky a joué au Festival d’été de Québec cette année (indice : la réponse est dans le texte). Parmi tous ceux qui nous auront donné la bonne réponse, nous ferons tirer une paire de billets pour le spectacle des Nuits FEQ du 11 octobre prochain.
Vous avez jusqu’à dimanche, 23 h 59, pour participer.
Bonne chance!
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Spectacle : Lisa LeBlanc, Théâtre le Petit-Champlain, 27 septembre 2014
Dire que les gens de Québec avaient hâte au retour de Lisa LeBlanc pourrait être considéré comme un euphémisme. Voyez-vous, c’est dans un Petit-Champlain à guichets fermés et rempli à craquer que la grande Acadienne est venue livrer ses chansons, dont quelques-unes de son nouveau maxi à paraître le 4 novembre prochain (Highways, Heartaches and Time Well Wasted).
Emmanuel Éthier (qui a réalisé le maxi à paraître) s’est d’ailleurs joint au groupe composé de Maxime Gosselin (batterie), Jean-Philippe Hébert (guitare) et LeBlanc. Ce spectacle allait être lourd sur les cordes, on a pu s’en rendre compte dès l’introduction, toute en western spaghetti, qui nous a menés à une J’pas un cowboy survoltée. Motel, Cerveau Ramolli et un tas d’autres chansons de son excellent premier album se sont succédés.
Bon. Évidemment, un bon nombre de personnes étaient là pour entendre Aujourd’hui, ma vie c’est de la marde, et LeBlanc n’était pas là pour les décevoir, même s’il y avait beaucoup de dérision dans le ton de l’auteure-compositrice-interprète. Radiohead a Creep, Lisa a Marde.
Si la première partie du show avait tout pour plaire aux fans de la première heure, la deuxième, de son côté, avait de quoi capter l’attention des curieux, comme moi, qui ont hâte d’entendre le maxi.
C’est donc avec ravissement qu’on a donc entendu LeBlanc chanter Gold Diggin’ Hoedown. Oh boy. Highways, Heartaches and Time Well Wasted ne sera pas un album propre! On avait déjà eu la chance d’entendre la magnifique You Look Like Trouble (But I Guess I Do Too), qui commence en douceur pour se terminer dans un chaos infernal, mais contrôlé. Pensez Cerveau Ramolli, puissance 10. Comme pour le prouver, LeBlanc enchaîne avec un classique de… Mötorhead, Ace of Spades, qui a tout à fait l’air à sa place même si elle a été jouée avec aucun ménagement.
Pour le premier rappel, après une plus que vraie Y fait chaud (en hostie), LeBlanc a sorti une autre nouvelle pièce, Race Track, qui bénéficie d’une énergie semblable aux deux autres présentées précédemment. J’aimerais vous rappeler qu’on est en fin de spectacle (ou en rappel) et que Lisa LeBlanc nous présente ses nouvelles chansons, bien après que ses classiques en devenir soient joués! Faut avoir confiance en titi dans son matériel pour faire ça. D’ailleurs, le plaisir qu’avait LeBlanc à jouer ces pièces était contagieux, ça dansait et ça headbangait à qui mieux-mieux dans un Petit-Champlain toujours aussi bondé.
Pour le deuxième rappel, LeBlanc en avait une autre, en franglais, juste pour nous : God Knows (qu’y fera pas beau). Jouée seule à la guitare, ce morceau donne le motton. D’ailleurs, Lisa était elle-même plutôt émue. Elle a décidé de jeter le programme de la soirée aux poubelles et de nous interpréter quelques reprises, dont une version touchante de Le monde a bien changé (1755), et, pour terminer, une interprétation juste et sympathique Dreams, de Fleetwood Mac.
Wow. Quelle belle façon de « boucler » une tournée! Montréalais, il reste encore un spectacle le 30 septembre au Lion d’Or. Vous ne voudrez absolument pas manquer ça.
Les Deuxluxes
C’était la deuxième fois que j’avais la chance de voir les Deuxluxes appliquer leur Traitement deuxluxe devant une foule et bien que pour moi, l’effet de surprise avait fait place à des attentes élevées, ce n’était pas le cas du public présent qui a tout de suite été charmé par le rock n’ roll sale et bluesé d’Étienne Barry et Anna Frances Meyer.
De mon côté, j’ai pu apprécier combien le couple s’était amélioré en un peu moins de six mois. Faut se comprendre, ici : la bombe, c’est Meyer, qui danse, chante, joue de la guitare comme si c’était sa dernière prestation. Une vraie rockeuse. Mais les bombes, ça n’explose pas tant que la mèche n’est pas allumée. Là-dessus, le jeu précis de Barry à la guitare et à la batterie provoque tout ce qu’il faut d’étincelles pour permettre à sa complice d’occuper l’espace scénique et envouter les fans.
Mise à jour : Shit! J’ai oublié de vous parler de la belle complicité qui existait entre Lisa LeBlanc et les Deuxluxes, qui ont partagé la scène à trois reprises au cours de la soirée. Moments fort agréables!
Programme – Lisa LeBlanc, 27 septembre 2014
Théâtre Petit-Champlain- Intro – J’pas un cowboy
- Motel
- Cerveau ramolli
- Du duvet dans les poches
- Lignes d’Hydro
- Kraft Dinner
- Câlisse-moi là
- Downtown
- Chanson d’une rouspéteuse
- Aujourd’hui, ma vie c’est d’la marde
- Gold Diggin’ Hoedown
- You Look Like Trouble (But I Guess I Do Too)
- Ace of Spades (reprise de Motörhead)
- (1er rappel) Y fait chaud
- (1er rappel) Race Track
- (2e rappel) God Knows Y fera pas beau
- (2e rappel) Le monde a bien changé (reprise de 1755)
- (2e rappel) La danse de Mardi Gras (traditionnel cajun)
- (2e rappel) Dreams (reprise de Fleetwood Mac)
Photos
(Crédit photo : ecoutedonc.ca – Jacques Boivin)
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Critique : Fanny Bloom – « Pan »
On avait déjà une bonne idée de la sensibilité pop de Fanny Bloom après l’avoir entendue au sein de La patère rose et écouté son premier album solo, Apprentie-guerrière.
Sur Pan, Bloom se jette dans le vide, mais elle n’a pas oublié son parachute. Il s’agit là d’un album pop bien de son temps, où les airs rythmés côtoient les jolies balades. Pour une irrésistible Piscine (l’hymne de l’été de plusieurs), on retrouve une magnifique Mélodie. Si Danse nous plonge dans la dance pop des années 1980, sur Il faudra, les synthés sont résolument de notre époque.
C’est un peu comme si Bloom avait décidé de jouer avec tous les sens de Pan, faire appel à tous ses… pans (OK, j’arrête!).
Du côté des textes, Fanny Bloom a une jolie plume pour le genre, oui, ça parle d’amour, de relations interpersonnelles, de l’essoufflement de sentiments, de narcissisme, des sujets simples du quotidien. Cependant, mais les textes se tiennent très bien, Bloom ne cherche pas la rime facile et sa jolie voix récite si bien ces mots qu’on écoute attentivement. Tant mieux si les images nous viennent immédiatement à l’esprit. La poésie, c’est pas toujours l’art de l’incompréhensible.
Sur le plan musical, comme je le disais plus tôt, on passe par pas mal toutes les couleurs de la palette pop, mais sur Pan, mademoiselle a un faible pour les années 1980. Le quadragénaire en moi, qui a vécu les années 80 en même temps que ses premières poussées d’acné, ne lui en tiendra pas trop rigueur, car elle est allée chercher les meilleurs éléments (la flûte de pan, sérieux!) tout en évitant les pièges grotesques du genre. De plus, on peut compter sur la présence des Misteur Valaire (dont certains membres ont également été membres de La patère rose… je ne sais pas pourquoi je vous dis ça, vous le savez sûrement) sur deux chansons (Deadbird et Il faudra). Et Étienne Dupuis-Cloutier, qui était derrière la console sur Apprentie guerrière, est de retour comme coréalisateur et complice. En passant, la réalisation est impeccable.
Somme toute, comme deuxième effort solo, Pan est un album solide qui devrait permettre à Fanny Bloom de mieux se faire connaître dans le merveilleux monde de la pop. Il y a sûrement une place pour de la pop intelligente, mais contagieuse, sur nos radios et dans nos médias électroniques. Et Fanny Bloom est la personne parfaite pour occuper cette place.
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Critique : Salomé Leclerc – « 27 fois l’aurore »
Oh, que je l’attendais, celui-là. Je l’attendais à peu près autant que j’attendais le dernier St. Vincent ce printemps, ou Metals, de Feist, il y a quelques années. Salomé Leclerc m’avait lentement séduit avec Sous les arbres, un album qui ne m’avait pas particulièrement impressionné à la première écoute, mais qui est devenu un de mes albums préférés de 2011. Salomé avait déjà réussi, en un album tout en douceur, à laisser sa marque en se bâtissant un son bien à elle, un univers qu’on reconnaîtrait dès les premières notes de ses chansons. On sentait déjà le besoin d’expérimenter, de promener ce son dans d’autres univers que le folk, qu’elle maîtrisait déjà fort bien.
Ça tombe bien, 27 fois l’aurore, qui paraît mardi prochain (le 23 septembre), nous promène dans ces autres grands espaces tout en demeurant fidèle à cette sonorité si distinctive, qui nous permet de retrouver sans difficulté Salomé, qu’elle soit seule derrière sa guitare (et la batterie) ou entourée de boucles et de batteries électroniques, gracieuseté du coréalisateur Philippe Brault.
En ouverture, Arlon permet cette transition en douceur, car la guitare lourde et la voix rauque de la jeune auteure-compositrice-interprète dominent. Comme toujours, Leclerc propose des textes soignés. Cependant, on remarque la présence de synthétiseurs, qui ajoutent des couleurs à une palette déjà riche.
En dedans est un peu plus enjouée musicalement, les guitares se mélangent parfaitement aux choeurs et au rythme particulier de la batterie. Puis, au milieu de la chanson, les fioritures électro viennent se joindre à la fête, et elles sont bientôt rejointes par des cuivres (Benoit Rocheleau au trombone et au cornet). Tout s’assemble si parfaitement, si naturellement, après deux pièces, on nage déjà en plein bonheur.
On reconnaît déjà là le travail de pro de Philippe Brault (qui est résolument en FEU ces temps-ci), qui aura su aider la talentueuse artiste dans ses expérimentations. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : Leclerc aurait pu se contenter de présenter ses chansons comme elle l’avait fait sur Sous les arbres, et ça aurait probablement donné d’excellents résultats. Mais avec Brault derrière les pitons, elle a pu choisir un enrobage complètement différent pour la magnifique L’icône du naufrage, où les guitares laissent la place aux synthés et aux ordinateurs, tout en restant parfaitement elle-même.
Sur Un bout de fil, malgré le bruit de plus en plus envahissant, l’auditeur reste accroché aux touches du piano et boit les paroles de Leclerc, qui semble toute nue derrière ce voile. Le coeur bat très fort après cette chanson toute en douceur, mais très, très intense sur le plan des émotions. Y’a beaucoup d’écoutes de James Blake derrière!
Le batteur José Major se joint à Leclerc et à Brault sur quelques chansons, dont l’entraînante Le bon moment, qui devrait plaire aux fans de la première heure qui auront peur de foncer tête baissée dans le reste du projet. Si j’avais à trouver une seule faiblesse à l’album, ce serait cette pièce, qui a un petit rythme à la Cochez oui, cochez non… pas qu’elle soit mauvaise, mais tout ce rythme entre deux superbes chansons très douces est étrange. Elle aurait peut-être été plus à sa place avec Arlon et En dedans.
Vers le sud est comme un rêve, un voyage dans un univers feutré, qui nous ramène là où nous étions sur Un bout de fil. Mélange parfait de guitare et de claviers.
Quant à Les chemins de l’ombre, éthérée elle aussi, un brin irréelle itou, ce mélange d’acoustique, d’électronique et de rythmique fonctionne parfaitement. L’esprit de James Blake se trouve encore bien ancré ici, mais cette fois-ci, il n’est pas seul. On sent quelques pincées de Thom Yorke çà et là dans la chanson.
Parlant de Thom Yorke, la ligne de basse, la batterie, la guitare et la quincaillerie d’Attendre la fin font énormément penser à du Radiohead. Du BON Radiohead. Du NOUVEAU Radiohead. On s’imagine sans peine un Yorke dansant frénétiquement sur les parties rythmées de la chanson pour reprendre son souffle quelques instants avant de rentrer en transe. Le texte est d’une grande simplicité, mais ça ne l’empêche pas d’être d’une grande beauté. Vos oreilles auront un orgasme de quatre minutes.
Salomé Leclerc ne se gênera pas pour nous donner le motton une autre fois sur Et si cette fois était la bonne, où la voix de Leclerc est féérique comme dans un rêve, comme un espoir qui finit par se noyer dans les cuivres de Rocheleau, que j’ai trouvés d’une tristesse inouie. Non, cette fois n’est toujours pas la bonne, nous dit Salomé. Et ça fait mal. En silence. Autre moment parfait.
Sur Devant les canons, on appréciera cette phrase magnifique : « La poésie n’est pas dans la leçon / Mon assise, debout devant les canons ». Si les guitares de Leclerc, les cuivres de Rocheleau, la basse et les claviers de Brault et la batterie de Major ne vous ont pas encore donné la chair de poule, attendez que Salomé se mette au refrain. Magistral.
L’album se termine avec J’espère aussi que tu y seras, une autre chanson qui semble inspirée de James Blake. C’est encore sombre, mais elle permet de décanter après l’intensité des trois chansons qui ont précédé.
Salomé Leclerc aurait pu la jouer facile et éviter en deux pirouettes tous les pièges du deuxième album. Elle aurait pu nous offrir un autre Sous les arbres et nous l’aurions acclamée. Elle a plutôt choisi de foncer tête baissée dans un projet difficile, plein d’embûches, mais dans lequel elle n’avait pas de limites. Elle aurait pu se planter royalement. Au contraire, elle relève le défi avec brio et gagne son pari. Mon seul (tout petit) reproche, c’est le drôle de placement d’une des chansons, chose que je peux moi-même corriger avec une liste de lecture. Mais à mon avis, ça serait manquer de respect à cette oeuvre magnifique, tant sur le plan musical que textuel. Malgré son univers très sombre, très automnal, 27 fois l’aurore de Salomé Leclerc est à ce jour l’album le plus intéressant que j’ai écouté cette année.
Incontournable.
[vimeo http://vimeo.com/103143200]
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Critique : Hôtel Morphée – « Rêve américain »
Bon, enfin, une semaine après tout le monde, j’ai quelques minutes pour vous parler du nouvel opus d’Hôtel Morphée, Rêve américain.
Avec leur premier album complet, Des histoires de fantômes, les membres d’Hôtel Morphée avaient montré leur capacité de créer des ambiances, des moods, un peu à la manière d’autres groupes de multi-instrumentistes talentueux qu’on a vu poindre depuis le début de la décennie. Paru au début de l’été, le premier extrait de Rêve américain, l’excellente Dernier jour, montrait que la bande menée par Laurence Nerbonne était capable d’évoluer, de dépasser ses propres limites et de créer de maudites bonnes chansons qui ne se contentent plus d’installer des ambiances.
Tout ce qu’on pouvait espérer, c’était que le reste de l’album soit taillé dans le même roc. Dès les premiers instants de Rêve américain (la pièce-titre), on respire : on a affaire à du solide. Laurence Nerbonne est particulièrement en verve et en voix. Les paroles sont sombres, mordantes, à l’image de cette Amérique peinte en rouge et en noir. Les musiques sont clairement moins orchestrales qu’auparavant, mais elles ne manquent pas de punch.
Les violons sont toujours très présents, mais ils laissent une plus grande place aux claviers (Blaise Borboën-Léonard, qui violonne et touche à tout), aux guitares (André Pelletier), bien senties, et à la batterie (Stéphan Lemieux), plus rythmée que jamais. La réalisation de Philippe Brault est soignée, et on évite les pièges de la sur- (et de la sous-) production.
Je dois avouer que la première écoute m’a laissé un peu sur mon appétit. Puis après deux ou trois autres lectures de l’album, j’ai fait joué à répétition des pièces comme Psycholove (une histoire d’amour entre psychopathes) et Des milliers de gens (une vraie bombe). Au fil des écoutes, j’en suis venu à une drôle de conclusion : et si Rêve américain était l’album qu’on attendait en vain depuis des années de la part d’un groupe de pop indé comme Metric? Ce n’est pas comme si le groupe n’assumait pas son désir de traverser les frontières avec sa musique!
Même Je reviendrai et son usage de l’autotune (qui m’horripile quand je m’en rends compte) se glisse sous ma peau et titille mes neurones comme peu de chansons du genre l’ont fait ces dernières années. Et cette Petite mort, qu’on souhaite remixée pour l’entendre pendant des heures, elle fait mal? Pas grave, on en veut encore!
En quelques mots, Rêve américain aura dévoilé un Hôtel Morphée plus mordant, plus caustique, plus sale, mais vachement plus sexy. L’attente en a valu la peine. Rêve américain ne se contente pas de frapper la cible, il la défonce.
[vimeo http://vimeo.com/105681574]
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