Pour son cinquième album intitulé Santa Maria, l’auteur-compositeur-interprète Dany Placard propose un folk-rock rythmé, énergique, des paroles simples, mais issues d’une certaine réflexion, sur des musiques qui font taper du pied.
Dès les premières notes de Confucius, qui ouvre l’album nommé tel un volcan d’Amérique centrale, on sent que Placard n’a pas envie de niaiser : les sages paroles déboulent au rythme d’un country-rock fort accrocheur. Sur Chanson populaire, l’extrêmement banal devient sympathique et les nan na na nan, na na na na na naaan sont contagieux. Et puis, comment ne pas aimer une pièce qui s’appelle Hot-dog Michigan?
Certains moments sont plus touchants, comme cette jolie Santa-Maria, espèce d’anti-prière à Marie sur un fond résolument country. D’autres sont plus blues, comme Shop, qui m’a par moments fait penser à une toune mollo de Gros Mené (le petit accent saguenéen de Placard a dû aider).
Le résultat? Un album hop-la-vie tout en restant personnel, grâce à une solide coréalisation de Placard et Éric Villeneuve, et à un band de feu, composé de Guillaume Bourque (guitare, voix), Michel-Olivier Gasse (basse) et Mathieu-Vézio (batterie).
Comme quoi le country et le folk, c’est pas juste du braillage.
Deuxième album complet de l’auteur-compositeur-interprète-boule de bonheur haligonien, Ephemeral est un monstre indie pop lumineux créé à partir du Petit prince, de St-Exupéry. Yep, monsieur Aucoin est ambitieux comme ça.
Sur Ephemeral, Aucoin offre une indie pop lumineuse, contagieuse, dansante qui plaira tant aux fans de son premier album qu’aux nouveaux venus qui ont eu la chance de découvrir l’artiste récemment.
D’ailleurs, si We’re all Dying to Live, sa première (et ô combien ambitieuse) proposition, comptait la participation de 500 collaborateurs, Ephemeral, de son côté, est un diamant brut qui ressemble beaucoup à ce qu’Aucoin fait en spectacle. Moins le cercle avec la toile de parachute. Moins les confettis. Moins les sautillements constants et la danse sans fin. Et les chants en choeur.
Ça ne change rien. Ephemeral est un album fait pour s’exciter, qui va droit au but et qui ne perd pas de temps en intros et en conclusions qui n’en finissent plus.
Pourtant, ce n’est pas comme si Aucoin n’avait pas pris soin de coller un propos cohérent et intelligent à sa musique. Car oui, il y a des paroles derrières ces beats envoûtants et ces mélodies entraînantes. Et oui, elles servent souvent à faire chanter le public, mais Aucoin a fait son possible pour qu’on ne fasse pas que chanter des sottises. Ou des ooooh et des aaaaah à répétition.
En somme, Ephemeral, avec ses Are You Experiencing?, City I Love et Let it Go, est un joli prétexte pour faire la fête. À son prochain passage à Québec, ne le ratez surtout pas!
Petit cours d’histoire de la musique rock et pop québécoise : si vous regardez les vieux disques de vos parents et de vos grands-parents, vous remarquerez quelque chose : leurs artistes préférés étaient signés chez les majors. Beau Dommage? Capitol. Harmonium? CBS. D’autres étaient chez Barclay ou Polygram. Il y a bien eu quelques étiquettes locales comme Kébec-Disque, mais sinon, la domination était presque totale.
Faut dire que nos artistes étaient populaires, nous étions en pleine fièvre culturelle et les disques sortaient des magasins au même rythme qu’ils entraient. Fièvre culturelle poussée par un vent nationaliste et identitaire qui s’est essoufflé au lendemain du référendum de 1980.
Au début des années 1980, l’intérêt envers les artistes de chez nous s’est subitement évanoui et les multinationales du disque se sont sauvées, laissant pour compte de nombreux artistes qui ont connu des années de misère.
Bon, c’est vite expliqué et je prends de nombreux raccourcis, mais c’est dans ce paysage sombre qu’arrive Michel Bélanger lorsqu’il fonde Audiogram et signe Paul Piché, qui y fera paraître Nouvelles d’Europe le 4 septembre 1984. Un album qui était parfaitement de son époque tout en demeurant sensible et engagé.
Depuis maintenant 30 ans, Audiogram est ce savant mélange d’artistes établis (Piché, Rivard, Séguin, Flynn) et de jeunes affamés (RBO, Leloup, Daniel Bélanger, Ariane Moffatt, Bran Van 3000, Pierre Lapointe, Salomé Leclerc). Bélanger et ses complices misent autant sur des valeurs sûres qu’ils prennent de grands risques (Lhasa les a d’ailleurs pris par surprise, on a eu du mal à répondre à la demande!).
Trente ans plus tard, alors que nous sommes dans une autre grande tourmente (qui touche l’industrie mondiale du disque, cette fois), et qu’il n’y a jamais eu autant de maisons de disques indépendantes au Québec, Audiogram revient à la charge et montre toute sa pertinence avec une compilation, Trente, un album triple de trente chansons enregistrées toutes nues en une prise aux Studios Victor par les artistes actuels et passés de l’étiquette de disques.
Véritable pièce d’anthologie, Trente nous fait voyager dans les trente dernières années comme aucun autre document ne l’a fait jusqu’à maintenant. La plupart des artistes qui figurent sur l’album en ont profité pour réarranger quelque peu leurs chansons, question d’éviter de tomber dans la redite.
Quelques moments forts de l’album :
Au bord du lac Bijou, par Zachary Richard. De son album Cap enragé, un des plus beaux albums folk parus au Québec. Pièce remplie d’images fortes.
Car je t’aime, par Paul Piché. Je vous avoue que la version originale me laisse un peu froid, mais celle-ci, où Piché est seul à la guitare et montre une belle sensibilité, est fort jolie.
Arlon, par Salomé Leclerc. Parce que c’est Salomé et que je suis aussi objectif avec elle que je ne le suis avec Annie Clark. Pour à peu près les mêmes raisons. Les textes brillants. La musique géniales. Et la guitare unique, qu’on reconnaît entre toutes. Mais aussi parce qu’Arlon montre que Salomé ne restera pas assise sur ses lauriers et que 27 fois l’aurore sera un album solide.
Point de mire, par Ariane Moffatt. Ariane seule avec sa guitare. Quand on sait à quel point ses chansons sont riches en général, un tel dénuement est rafraîchissant. On aimerait en entendre plus souvent, des comme ça.
Tunnel of Trees, par Gogh Van Go. Juste parce qu’il ne faut pas les oublier et que Tunnel of Trees est un phare.
L’atelier, par David Giguère. Une belle chanson qui, toute nue, donne des frissons.
Le train, par Vilain Pingouin. LA surprise de l’album. Relecture complètement bluegrass. On reconnaît l’air, mais on redécouvre cette chanson. Hey Caya, en avez-vous d’autres, des reprises comme celle-là?
Johnny Go, par Jean Leloup. C’est Leloup qui joue une toune de son meilleur album. Qu’est-ce que tu veux de plus?
Le feu sauvage de l’amour, par Rock et belles oreilles. Version minimaliste avec Bruno au tambour, Guy le doigt sur le clavier, Yves au gazou et André à la (petite) voix. Encore plus kitsch que l’original.
J’vais changer le monde, par Jim Corcoran. Pour ses mots, avec lesquelles Corcoran jongle.
Drinking in L.A., par Bran Van 3000. Version smooth et tellement 2014 de ce classique de James DiSalvio et cie. Stéphane Moraille a beau maintenant pratiquer le droit, sa voix est toujours aussi riche et pleine de soul.
De cara à la pared, en hommage à Lhasa de Sela. Par Yves Desrosiers et Mara Tremblay. Sobre. Vibrant. Touchant.
Tout nue avec toi, par Mara Tremblay. J’ai toujours aimé cette chanson, mais là, revisitée par une Mara Tremblay qui a quinze ans de plus, je craque.
Il y en a d’autres et elles valent presque toutes le coup, mais bon, un moment donné, faut faire des choix! Comme sur toutes les compilations du genre, vos préférées seront sûrement différentes des miennes (peut-être que vous aimerez entendre Sous les cheminées comme Richard Séguin l’a toujours faite… moi, ça m’a laissé un peu froid, malheureusement). Trente montre la profondeur du catalogue qu’Audiogram s’est bâti en trois décennies. Un catalogue d’une richesse incroyable et difficilement comparable à l’échelle du Québec.
Surtout, avec les Alex Nevsky, Salomé Leclerc, Philémon Cimon, Amylie, Bernhari, Hôtel Morphée (on en reparle très bientôt), Peter Peter et tous les autres que j’oublie, qui vont rapidement rejoindre les autres comme artistes incontournables, on peut dire qu’Audiogram est promise à un bel avenir, tant qu’elle réussit à négocier les virages rendus nécessaires par le déclin des ventes de disques (physiques ou numériques).
Un trésor national. Trente en est son exposition permanente.
Le duo Alfa Rococo n’a jamais fait les choses à la hâte. On n’a donc pas été surpris qu’il s’écoule quatre ans entre le dernier album du duo composé de Justine Laberge et David Bussières (Chasser le malheur) et Nos coeurs ensemble, une nouvelle proposition qui devrait connaître beaucoup de succès, tant au champ gauche qu’au sein du grand public.
Si Chasser le malheur était un peu sombre dans son propos et dans sa musique, Nos coeurs ensemble est tout le contraire : ça démarre sur les chapeaux de roues avec la grosse pop vitaminée de Lumière, qui n’est pas sans rappeler Passion Pit par son énergie et sa bonne humeur. Comme pour montrer que le couple avait évolué pendant ces quatre ans, voilà Bussières qui prend le devant de la scène (alors que la paire avait presque toujours chanté ensemble) sur Coeur qui explose, une de ces chansons qui nous replonge tout droit dans ce que les années 1980 avaient de meilleur.
Le sexe des anges. On la met en boucle et on danse.
Tiens, sur la pièce-titre, un bijou pop qui devrait tourner à la planche dans les radios, c’est Justine Laberge qui prend les commandes des voix, qu’elle conservera pour plusieurs des pièces qui suivront. Good move, diraient les Anglais, qui permet au duo d’ouvrir ses horizons mélodiques, qui étaient plutôt limités sur les premiers albums.
Pipeline. On finit notre drink à toute vitesse, on la met en boucle et on danse. Exactement le genre de chanson qui fait qu’après « deux ou trois écoutes de l’album, on se surprend à chanter du Alfa Rococo dans la douche (avec un solo de «airdrum» bien senti en plus de ça) » (citation tirée de la critique de Sébastien Moffet, du blogue Le canal auditif, que je suis assidûment, ne serait-ce que pour avoir un autre point de vue). Des chansons construites comme Pipeline, il y en a beaucoup, faut alors qu’elles soient solides en titi pour qu’on les apprécie. Défi relevé ici.
L’album se poursuit avec d’autres beaux morceaux pop intelligente, bien ficelée, qu’on entend trop peu au Québec. Dans un français plus que convenable et exportable, en plus. Et la réalisation de David Bussières est impeccable.
Le trio Volatil, Marcher et Deux montre parfaitement de quoi Alfa Rococo est capable tant sur le plan des paroles que de la musique. Des chansons riches, qui ont l’air toutes simples et qui peuvent être jouées guitare-voix, mais qu’on a décorées avec le plus grand soin.
Nous. On la met en boucle et on danse jusqu’à épuisement.
Si on pouvait résumer Nos coeurs ensemble, on pourrait dire que le troisième album d’Alfa Rococo est une bouffée d’air frais, gracieuseté d’une formation qui n’a pas eu peur de prendre quelques risques tout en proposant un album qui pourrait difficilement être plus accessible.
(Photo de couverture – crédit : Sébastien Ouellet, ecoutedonc.ca)
Mardi soir dernier, Bernhari est venu présenter son excellent album aux gens de Québec en offrant un concert de lancement gratuit au Cercle. On aurait apprécié un parterre mieux rempli, mais bon, la pluie, la rentrée universitaire et le fait que ce mardi était plutôt un lundi déguisé ont incité de nombreuses personnes à rester chez elles.
Tant pis pour elles. Le jeune homme, visiblement heureux de montrer son savoir-faire à ses nouveaux fans, s’est donné à fond. Sans suivre à la lettre la séquence de l’album, le spectacle était monté un peu de la même manière, avec les chansons les plus explosives au début (Sagard vous pète les tympans avec du bonheur), les (belles) chansons plus lentes au milieu et la pièce Bouquet final à la fin, juste avant une Kryuschkova explosive.
Bien entouré, notamment par le plus en plus présent Emmanuel Éthier, Bernhari a montré qu’il était plus que ce mélange de My Bloody Valentine et Claude Léveillée qu’il aime bien utiliser pour se décrire. Il est une bête de scène unique à qui on promet un bel avenir.
Surtout, sur scène, même derrière son lourd attirail, Alexandre Bernhari dégage une forte présence. Imaginez quand il se lève pour chanter parmi les spectateurs (la prochaine fois, ils seront moins timides, promis!)…
J’avais le goût de lui faire un gros high five en sortant du Cercle. Je me reprendrai le 4 octobre prochain, lorsqu’il viendra jouer en première partie de Fanny Bloom et de Fontarabie. Ne le manquez pas, cette fois-là. Une fois, passe encore, deux fois, vous allez finir par le regretter.
Ce groupe a attiré mon attention à la sortie de son premier album (l’excellent O’ Be Joyful) en 2012. D’ailleurs, il a fait partie de mon palmarès de fin d’année et je vous avoue qu’aujourd’hui, je l’aurais beaucoup mieux placé qu’à la 32e position et j’ai encore beaucoup de plaisir à l’écouter.
C’est donc avec une grande joie que nous avions appris, ce printemps, que le deuxième album du couple américain (Cary Ann Hearst et Michael Trent) allait paraître à la fin de l’été. C’est avec une plus grande joie encore que j’ai eu la chance d’en entendre une ou deux nouvelles à Bonnaroo.
Les attentes étaient donc très élevées. Hearst et Trent allaient-ils être en mesure de les surmonter?
Swimmin’ Time est un album rempli de catastrophes. Des incendies, des inondations, des tempêtes, des ruptures… Les temps sont durs pour les héros des histoires de Hearst et Trent. Pourtant, dans chacune des chansons, il y a cette lueur d’espoir. Le bonheur n’est jamais loin. Et il se chante, comme en font foi les perles qui peuplent cet album.
La première pièce de Swimmin’ Time, The Devil is All Around, est du pur Shovels & Rope, une chanson aux airs country-folk assez simple pour être jouée à deux qui mettra les fans de la première heure à l’aise tout en donnant aux nouveaux fans l’idée de remonter quelques années en arrières pour mieux connaitre le duo. À la deuxième pièce, l’entraînante Bridge on Fire, Shovels & Rope a repoussé ses limites. Cette chanson, une histoire de rupture qui sonne autant comme une claque au visage qu’un coup de pied au derrière, où règnent la rythmique du piano, les distorsions de la guitare et la parfaite harmonie des deux voix, se déguste à répétition, comme la suivante, la langoureuse Evil.
La suivante, After the Storm, deviendra sans aucun doute un classique et occupera une place de choix dans toutes les prestations du duo. Chanson très triste, mais remplie d’espoir, After the Storm est chantée et jouée avec une belle intensité qui vient nous retrousser les poils à chaque écoute.
Quelques chansons plus loin, Pinned aurait facilement pu se trouver sur O’ Be Joyful. Ce qui n’est pas un gros défaut, car jusque là, on avait habilement évité la redite, ce piège qui attend toute formation spécialisée dans la pop de grange (ou l’Americana, si vous préférez).
Sur la pièce-titre, un autre petit défaut se remarque (et se démarque), malgré les mélodies géniales : sur Swimmin’ Time (la pièce comme l’album), Shovels & Rope chante presque tout le temps (disons 99 %) en harmonie. Presque jamais une voix seule. Presque toujours à deux. Avec la voix de Trent qui se fait souvent un peu enterrer par celle, beaucoup plus punchée, de Hearst.
Ces défauts sont vite oubliés quand on écoute les cuivres d’Ohio, qui nous amènent dans un monde que Tom Waits n’aurait certainement pas renié. Du pur bonheur, qui se poursuit sur le petit country-folk Mary-Ann & One-Eyed Dan.
Malgré les quelques défauts de Swimmin’ Time, quand on regarde les pas en avant accomplis par Shovels & Rope, on ne peut qu’être admiratifs. Il y a à peine deux ans, Hearst et Trent vivaient à l’arrière de leur fourgonnette. Aujourd’hui, ils nous offrent un des meilleurs albums de pure Americana depuis un petit bout de temps.
Si vous êtes à Montréal, allez les voir le 28 septembre prochain au Corona Virgin Mobile. C’est une joyeuse expérience en soi.
Willows, c’est le nouveau nom de scène de l’auteure-compositrice-interprète franco-manitobaine Geneviève Toupin. Willows, c’est aussi le titre de ce nouvel album (le troisième en carrière), folk et intimiste à souhait, qui constitue un retour aux sources métisses et métissées pleinement assumées de cette artiste talentueuse.
Sur ce disque, Toupin joue sur tous les tons : l’atomosphérique, l’introspectif et le ludique ont tous droit de cité. Les arrangements sont sobres, mais magnifiques. La réalisation (avec Émilie Proulx, une autre qui a du talent à revendre) est soignée. Les pièces ont été enregistrées live, comme elles devraient être jouées en spectacle.
Les chansons sont résolument folk, mais chacune a sa personnalité, évitant ainsi le piège de la redite et de la facilité. On apprécie le caractère entraînant d’Entends-tu, comme on est touché par la beauté des choeurs sur Au-delà des étoiles. On sourit à l’avalanche de mots de Bill Murray comme on craque pour les harmonies parfaites sur Je t’emmènerai.
En bref, un bel album, qu’on écoute autant tranquille dans son salon que sur la grande route, les fenêtres grandes ouvertes, quelque part entre Willows (CA) et Willows (SK).
Si vous n’aviez jamais entendu parler de Bernhari jusqu’à maintenant, ne vous inquiétez pas, c’est normal. À moins de l’avoir vu en première partie du spectacle de Fontarabie ou d’en avoir entendu parler lorsqu’il faisait partie des formations L’Étranger et L’Ours (ne cherchez pas, monsieur a effacé toutes les traces de ces projets), les chances d’entendre parler de ce jeune auteur-compositeur-interprète-multi-instrumentiste ont été plutôt minces.
Ça devrait changer. Voyez-vous, Bernhari lance un premier album que j’écoute en boucle depuis une semaine et qui étonne par son mélange réussi de shoegaze et de chanson (certains ont même évoqué Claude Léveillée).
Réalisée par Emmanuel Éthier (que vous avez pu entendre avec Jimmy Hunt) et enregistré en compagnie d’Éthier, de Shawn Cotton et Simon Quévillon, cette première proposition nous ramène en plein printemps érable, qui a fortement touché l’artiste.
On peut dire sans se tromper que l’écriture de Bernhari est d’un grand romantisme. Ça sent l’amour et l’espoir autant que la révolte dans son récit. La hargne des guitares remplies de distorsion autant que la douceur du piano qui l’accompagne dans les chansons les plus douces.
Après quelques écoutes, on ne peut qu’être impressionné par la qualité de l’écriture de ce jeune artiste, tant sur le plan du récit qui ne tombe jamais dans la facilité, laissant à l’auditeur tout l’espace nécessaire pour se faire son propre cinéma, que sur le plan de la musique, qui apporte quelques nouvelles couleurs à la palette de la chanson d’ici.
D’Ouverture à Bouquet final, il est difficile de trouver une chanson qui n’a pas son attrait particulier. Chaque pièce a un petit quelque chose de spécial qui nous donne envie d’y revenir tout en nous laissant la possibilité d’y goûter sans devoir écouter le reste de l’album. Pourtant, si chacun des éléments semble à lui seul constituer une oeuvre complète, l’album dans son ensemble, construit comme un gros feu d’artifice qui gagne en romantisme ce qu’il perd en hargne, jusqu’aux grandes explosions du Bouquet final, en constitue une autre qui mérite totalement notre attention.
Avec cet album ambitieux, Bernhari apparaît comme un nouveau joueur important sur la scène musicale québécoise. Du moins, il va falloir le surveiller.
La première fois que j’ai vu Arkells, c’était en première partie de Metric en 2010. Le groupe de Hamilton, en Ontario, montrait déjà ce qui allait être sa marque de commerce : une énergie particulière sur scène, un indie rock ambitieux qui ne jurerait pas dans un gros amphithéâtre. Avec High Noon, troisième album d’Arkells, Max Kerman et ses complices visent la reconnaissance planétaire.
La première pièce de High Noon, la très entraînante et intense Fake Money, constitue une ouverture à la Where the Streets Have No Name, une pièce qui donne le ton en promettant à l’auditeur quelques instants mémorables, mais étrangement, le groupe nous emmène totalement ailleurs dès les premières notes de Come to Light.
Alors qu’on aurait pu s’attendre à un album qui défonce des plafonds, comme diraient les z’Anglais, High Noon est plutôt un album pop-rock solide aux riffs accrocheurs et aux mélodies teintées de soul. Un album efficace, mais qui manque parfois un peu de punch. On aurait aimé plus de Systematic, où le groupe est branché sur le 220. Celle-là, c’est un hit assuré.
Alors, est-ce qu’Arkells va percer à l’extérieur du pays? C’est très probable, il y a quelques gros morceaux sur l’album. Ça va surtout dépendre de leur travail sur la scène (où ils sont à leur meilleur – et où on a hâte de les voir).
Il y a des groupes, comme ça, qui sont réguliers comme des horloges. Leurs membres connaissent les attentes de leurs fans et ils répondent à ces attentes à tout coup. Bien sûr, ils ajouteront quelques épices çà et là, question de ne pas livrer le même album chaque fois, mais la recette de base demeure toujours sensiblement la même.
Pour leur huitième album, They Want MySoul, les membres du groupe texan Spoon ont fait comme ils ont l’habitude de faire : enregistrer un excellent album qui ne réinvente rien, mais qui remplit parfaitement son mandat, tout en étant juste assez différent du précédent. They Want My Soul est un joyeux cocktail de chansons rock bien ficelées, à la sensibilité pop très évidente, qui feront hocher de la tête et taper du pied même les mélomanes les plus difficiles.
De nombreuses pièces sont irrésistibles : Rainy Taxi et son côté minimaliste, menée par un rythme soutenu et des claviers qui partagent le devant de la scène avec les guitares et la voix un peu bluesée de Britt Daniel. Do You et ses do do, do do, do do en escalier, à chantonner lorsqu’on est en mouvement. Knock Knock Knock, basée au départ sur un riff de guitare acoustique et des sifflements, langoureuse et soul. They Want My Soul, la pièce-titre, un petit bijou d’indie rock classique avec ses riffs un peu brouillons mais terriblement accrocheurs. Let Me Be Mine pourrait être la pièce maîtresse d’une bande sonore de roadtrip et devrait faire des malheurs en spectacle tellement elle appelle à la participation du public. New York Kiss ferme l’album avec une pop accrocheuse, qui laisse énormément de place aux claviers.
Sans rien avoir du monument ou du chef-d’oeuvre, They Want My Soul ne devrait avoir aucun mal à se tailler une place sur les palmarès de fin d’année. Les chansons sont excellentes, les arrangements sont sobres sans tomber dans le minimalisme radical. Spoon nous offre ici son album le plus pop à ce jour et devrait permettre au groupe de se gagner de très nombreux nouveaux fans, tout en demeurant fidèle à lui-même et en offrant à ses fans l’album que ceux-ci espéraient.