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    [ALBUM] Jean Leloup – « À Paradis City »
    Jean Leloup À Paradis City (Le Roi Pompon/Grosse boîte)
    Jean Leloup
    À Paradis City (Le Roi Ponpon/Grosse boîte)

    Ah, Jean Leloup. Artiste génial qui nous a montré qu’il était capable du meilleur (Le Dôme est sans contredit un des cinq albums les plus influents de l’histoire au Québec) comme du pire (Vous vous souvenez de cet album paru sous son vrai nom, Jean Leclerc, vous?). Capable de donner des shows historiques (j’ai quelques souvenirs mémorables de Leloup au défunt Spectrum de Montréal… et au D’Auteuil à Québec) et de nous faire regretter de nous être déplacés (concert décevant au FEQ 2001, débâcle au Colisée en 2008). Après une tournée en 2013 qui lui a permis de remonter dans les bonnes grâces d’à peu près tout le monde (dont votre humble serviteur), revoilà Leloup avec une nouvelle galette!

    Un certain buzz entourait l’album, composé de chansons écrites un peu partout sur la planète au cours des dix dernières années. Certains prétendaient qu’À Paradis City était son meilleur album depuis Le dôme. J’avais donc très hâte de pouvoir me faire une idée par moi-même.

    Alors?

    Ben alors, si À Paradis City n’est pas Le dôme, il est aussi très loin de figurer au bas de la liste. En tout cas, c’est une nette amélioration par rapport à Mille excuses Milady (qui, avec le recul, n’est pas vilain du tout). Leloup nous attend là où on s’y attendait, avec une proposition d’inspiration folk-rock qui ne réinvente certes pas la roue, mais qui est ô combien efficace!

    Il y a longtemps que Leloup nous avait autant donné le temps de chanter avec lui tout en tapant du pied. Notre ami a manifestement toujours le sens de la mélodie et du rythme, et on lui connaissait déjà une sensibilité pop qui lui permet de nous accrocher quand il le souhaite. Le groove de la pièce titre, Paradis City, est imparable. Ajoutez à cela des textes magnifiques écrits par un gars qui a énormément gagné en sagesse ces dernières années.

    C’est encore sombre, les histoires sont encore macabres, mais on comprend beaucoup mieux ce qui se cache derrière les éternelles métaphores du roi ponpon. Et il y a cet espoir, cette lumière qui continue de briller dans toutes ces chansons! Si maître Edgar est mort dans Le dôme, ici, Jean Leloup et ses personnages survivent. Et s’ils n’y arrivent pas, le cycle de la vie, lui, continue. Ainsi va la vie qui va, quoi.

    Il vieillit, notre Jean Leloup national. Quand il chante une chanson comme Petit Papillon, il est aussi sage qu’un Thomas Fersen! Il y a 25 ans, il n’aurait pas été aussi philosophe que sur Les bateaux et sa superbe finale où Leloup est accompagné de violons.

    Je répète : LELOUP EST ACCOMPAGNÉ DE VIOLONS.

    Et c’est bien ainsi. D’ailleurs, côté cordes, Leloup s’est payé la totale sur Le roi se meurt. Que vous allez adorer!

    On ne peut qu’être content de retrouver ce bon vieux Jean Leloup qu’on aime, qui fait ses propres choeurs et qui a manifestement retrouvé le plaisir d’écrire des chansons. Et on ne peut qu’attendre avec impatience un retour sur scène pour mettre ces nouvelles chansons à l’épreuve.

    Zone zéro, l’endroit où t’as peur
    et où tu penses que tu pries.

    [bandcamp width=100% height=120 album=965475926 size=large bgcol=ffffff linkcol=e99708 tracklist=false artwork=small track=377939625]

    Jacques Boivin

    2 février 2015
    Albums
    86/100, À Paradis City, Grosse boîte, Jean Leloup, Le roi ponpon
  • [ALBUM] Tire le coyote – « Panorama »

    [ALBUM] Tire le coyote – « Panorama »
    Tire le coyote Panorama (La Tribu)
    Tire le coyote
    Panorama (La Tribu)

    Benoit Pinette, alias Tire le coyote, avait une grosse commande : créer un successeur digne de Mitan, un des plus beaux albums que j’ai eu la chance d’écouter ces dernières années. Voix surréelle, très haute, comme Neil Young, une influence manifeste, mais aussi une plume magnifique, remplie d’humour, remplie de toutes sortes d’images de toutes sortes de couleurs.

    Enregistré au studio Victor à Montréal et réalisé par Benoit Pinette lui-même, Panorama est le résultat de cette grosse commande. Sur ce disque, Pinette abandonne les teintes un brin morriconesques de Mitan et donne libre cours à un folk que certains pourraient peut-être trouver moins planant et atmosphérique, mais que d’autres trouveront plus direct et sincère.

    Panorama, c’est un livre contenant neuf belles histoires racontées avec génie par Pinette. Des histoires de toutes sortes, racontées du point de vue d’un gars qui mélange savamment richesse du vocabulaire et accents populaires. Un folk pur, où la musique est au service des textes du troubadour.

    Pinette a structuré Panorama comme un recueil d’histoires, avec deux jolies pièces instrumentales en guise de couverture. À l’intérieur, on savoure ces histoires et on plonge dedans. En s’approchant de ses racines, Pinette s’est aussi approché de l’auditeur, qui embarque dans le spectacle et qui, pendant une chanson comme Moissonneuse-batteuse, se joint à la fête en entonnant le refrain à tue-tête (Le courant passe, reste à choisir le chemin, on branchera nos radars dans le 220) et en tapant des mains. Quant aux chansons moins rythmées, elles constituent autant de réflexions justes d’un gars qui a les deux pieds bien soudés dans notre monde. Une pièce comme Rapiécer l’avenir aura le même effet chez toutes les personnes qui vieillissent, qu’elles aient 20 ou 80 ans.

    Benoit Pinette a aussi fait appel à Stéphane Lafleur pour une chanson. Celui-ci lui a offert Les chemins de serviettes, toute douce et poétique, à l’image de son auteur, mais soyons honnêtes : cette chanson colle à la peau du coyote, qui l’a vraiment mise à sa main.

    On peut difficilement rester indifférent à l’écoute d’un album si finement préparé, beaucoup plus près de la pièce d’artisanat que du bien de consommation. À l’ère du tout-numérique, de l’autotune et des batteries programmées, il y a quelque chose de fascinant dans cet album où la clarinette réchauffe l’atmosphère. Un album qui nous fait apprécier la profondeur de la contrebasse. Et, parce que c’est là sa principale force, qui nous fait aimer écouter la musique que Pinette et sa bande aiment jouer.

    Merci pour le beau voyage.

    Jacques Boivin

    27 janvier 2015
    Albums
    93/100, La Tribu, Panorama, Tire le coyote
  • [ALBUM] The Lone Bellow – « Then Came the Morning »

    [ALBUM] The Lone Bellow – « Then Came the Morning »
    The Lone Bellow Then Came the Morning (Descendant)
    The Lone Bellow
    Then Came the Morning (Descendant)

    Le premier album de ce trio de Brooklyn m’avait jeté par terre. Des chansons remplies d’émotions, cathartiques, qui vous libèrent un motton en deux temps, trois mouvements. Le leader du groupe, Zach Williams chante comme s’il était illuminé par le Saint-Esprit. Et lorsqu’il est accompagné par Brian Elmquist et Kanene Pipkin, les harmonies qui en résultent semblent sortir tout droit du Paradis. De la pop de grange finement maîtrisée et fort prometteuse.

    Après une longue tournée qui leur a fait faire le tour des États-Unis à un nombre incalculable de reprises, voyant les salles grandir à chaque passage, le groupe est retourné à la maison, question de prendre une pause bien méritée et de se consacrer à la suite des choses.

    Quand est venu le temps d’enregistrer leurs nouvelles chansons, Williams, Elmquist et Pipkin ont fait appel à Aaron Dessner (The National) pour les diriger derrière la console. Celui-ci a aussitôt compris les ambitions des membres du trio et il a trouvé l’emplacement idéal pour les atteindre, voire les dépasser. Il a réservé les studios Dreamland, une ancienne église convertie à quelques heures de New York, où les chansons du groupes ont vraiment pris leur envol. Il a invité une pléthore de musiciens à embellir la trame de base du trio, sans jamais dénaturer celle-ci.

    Dans de telles conditions, et avec ces propos de Williams, qui affirmait que ce nouvel album pouvait rappeler Elvis, période Vegas (rien de moins!), le groupe ne pouvait que frapper la balle à l’extérieur du stade.

    Alors, le résultat? Rien de moins qu’un grand chelem.

    La pièce-titre, qui ouvre l’album, donne raison à Williams. Then Came the Morning, c’est le grandiose des plus grands spectacles de Vegas transposé dans une vieille église désaffectée dans les Catskill. C’est Elvis et ses paillettes, les choeurs, les cuivres, les cordes, l’émotion, toutte!!! On a hâte de passer à la suite.

    La suite, c’est Fake Roses, une chanson pop adulte aux accents country. Une chanson comme on en a entendu des milliers avant aujourd’hui. Vraiment? Écoutez Zach Williams raconter son histoire, vous chanter sa peine. Vous avez des frissons? Attendez, on va ajouter un peu de violons et de lap steel. Et ce petit piano électrique si accrocheur? Parfait pour faire la transition entre la partie où Williams chante en solo et l’entrée du choeur. Juste quand les trois se mettent à chanter à l’unisson. Ce feeling-là, vous allez encore le sentir à de nombreuses reprises d’ici la fin de l’album.

    Les choeurs. Les harmonies. La grande force de The Lone Bellow. Quand elles sont mises ensemble, les voix de Zach Williams, de Kanene Pipkin et de Brian Elmquist deviennent la plus belle chose que j’ai jamais entendue (sauf peut-être les premiers « papa » de mes enfants). Il y a une grâce et une perfection dans ce chant…

    Chaque nouvelle chanson apporte son lot d’émotions, comme dans Marietta, une ballade en crescendo, ou Take My Love, une chanson un peu plus rock où le groupe nous envoûte et nous pousse à entonner le refrain (fédérateur à souhait) à l’unisson. Même les chansons moins chargées, comme cette magnifique Call to War (écrite par Elmquist, le rockeur des trois, et chantée par Pipkin, qui brille comme on l’a jamais entendue briller), viennent nous chercher, poil par poil.

    Juste de même, on n’est même pas encore à la moitié de l’album et voilà Elmquist, qui prend le haut du pavé à son tour. Brian Elmquist, ce gentil géant tranquille, calme même en transe, brille ici dans un magnifique guitare-voix où Williams et Pipkin sont, pour une fois, les faire-valoir.

    Williams revient ensuite avec la bluesée Diners, qu’on entend avec toutes ses paillettes et ses couleurs, comme à Vegas! ET BANG! Rock n’ Roll! Heaven Don’t Call Me Home est vraiment de ces chansons qui vous font bondir de votre chaise jusqu’à la piste de danse. C’est rythmé et bien sûr, c’est interprété sur le 220 par nos amis brooklynois. Ça fait du bien après toute cette émotion accumulée depuis une demi-heure.

    Le rock se poursuit sur If You Don’t Love Me, une chanson qui se nourrit elle-même, qui commence simplement, mais qui devient un espèce de monstre qui fait hocher des têtes en signe d’approbation en cours de route.

    Quand on arrive à Telluride, on ne peut que s’arrêter pour apprécier le jeu des voix et des guitares qui s’entremêlent doucement et qui finissent par ne devenir qu’un. Quant à To The Woods, qui suit, il s’agit d’une petite chanson chantée par Williams seul et sur laquelle semble reposer toute la lumière du monde.

    Une autre chanson qui risque de devenir une préférée en spectacle, Cold as it Is, permet au groupe de donner une autre petite leçon de rock n’ roll saveur country. Vous savez, toute les émotions qu’on a ressenties tout au long de l’album? C’est le temps de les faire ressortir en tapant des mains et en chantant avec le plus grand des bonheurs avec le groupe… avant qu’il ne se taise pour laisser Zach Williams commencer I Let You Go, où on chante en douceur, vidé de toute cette énergie qu’on avait au début, mais heureux d’avoir vécu une des plus belles expériences auditives des dernières années.

    Voilà, c’est dit. Then Came the Morning, c’est une expérience qu’il faut vivre au moins une fois. La grâce dans laquelle se trouvent les membres du groupe tout au long de l’album, cette espèce d’aura mystique qui les entoure nous donne envie de croire qu’il existe quelque chose de plus grand et de plus beau encore, qu’une chanson comme Fake Roses n’est que le début d’une suite de classiques intemporels que nous laissera The Lone Bellow dans quelques années, lorsque les membres du groupe accrocheront leurs bandoulières pour de bon après une longue et fructueuse carrière…

    Il ne pourra en être autrement.

    Si vous êtes à Montréal, faites tout ce que vous pouvez pour voir The Lone Bellow au Petit Campus le 26 février prochain. Après ça, vous n’aurez plus la chance de voir ce groupe dans un cadre aussi intimiste…

    Ça vaut la peine. Je vous le jure.

    Jacques Boivin

    26 janvier 2015
    Albums
    94/100, Descendant Records, The Lone Bellow, Then Came The Morning
  • [ALBUM] The Decemberists – « What a Terrible World, What a Beautiful World »

    [ALBUM] The Decemberists – « What a Terrible World, What a Beautiful World »
    The Decemberists What a Terrible World, What a Beautiful World (Capitol)
    The Decemberists
    What a Terrible World, What a Beautiful World
    (Capitol)

    Quand j’ai entendu les réactions mitigées lors du dévoilement des premiers extraits du septième album du groupe de Portland, j’ai préféré attendre l’album au complet, question de me faire une idée sur l’ensemble de la proposition plutôt que sur la somme de ses éléments.

    C’est ainsi que dès que j’ai pu mettre la main sur l’album, j’ai tamisé l’éclairage, je me suis pris un petit cidre et j’ai mis les haut-parleurs dans le piton. Colin Meloy se présente seul, guitare en bandoulière. Sans perdre de temps, il commence à gratter son instrument et il nous chante :

    We know, we know
    We belong to ya
    We know you built your life around us
    And would we change
    We had to change some
    You know
    To belong to you

    Désolé les fans qui n’ont pas aimé The King is Dead, mais le virage folk de type « tête d’affiche de festivals » amorcé il y a quelques années se poursuit ici. N’empêche, The Singer Addresses His Audience, la pièce d’ouverture, est un avertissement très clair : Oui, les Decemberists ont vieilli et changé, mais ils savent toujours donner un show, comme ce crescendo qui saura sûrement donner des frissons en spectacle.

    Alors, ce changement? Eh ben, il en résulte un album encore plus accessible que The King is Dead, qui devrait permettre au groupe de faire le plein de nouveaux fans, mais à quel prix?

    Le groupe retrouve bien ses vieilles habitudes sur quelques morceaux, et on retrouve des cuivres, des cordes et, bien entendu, de l’accordéon. Seulement, on a l’impression que ces chansons ont été composées et enregistrées sur le pilote automatique. C’est bon, mais maudit que ça ne surprend personne et les fans de la première heure vont probablement commencer à s’ennuyer de Hazards of Love.

    Dans ses chansons, Meloy ne raconte plus nécessairement d’histoires fictives. Les chansons deviennent alors plus personnelles, et malgré tout le talent lyrique de Colin Meloy, elles perdent un peu de cette aura spectaculaire qui entourait le riche vocabulaire du chanteur. Il reste le duo Lake Song – Till the Water is All Long Gone, où le groupe est tout simplement à son meilleur (et où les mots de Meloy brillent). Et que dire de 12-17-12, qui traite du discours du président Obama au lendemain de la tuerie de Newton? Un bijou.

    What a Terrible World, What a Beautiful World est un album imparfait d’un groupe qui veut avancer, mais qui a trop peur de déplaire et fait plutôt du surplace sur le pilote automatique. C’est dommage, car si certains moments passent lentement dans une certaine indifférence, d’autres sont tout simplement brillants.

    Jacques Boivin

    22 janvier 2015
    Albums
    74/100, Capitol, The Decemberists, What a Terrible World What a Beautiful World
  • [ALBUM] Belle and Sebastian – « Girls in Peacetime Want to Dance »

    [ALBUM] Belle and Sebastian – « Girls in Peacetime Want to Dance »
    Belle and Sebastian Girls in Peacetime Want to Dance (Matador)
    Belle and Sebastian
    Girls in Peacetime Want to Dance
    (Matador)

    Ça fait presque 20 ans que la jolie pop de Belle and Sebastian adoucit nos oreilles. Le groupe de Glasgow a tellement de matériel qu’il est parti en tournée avec un spectacle de B-Sides il y a quelques années! Il y a donc longtemps qu’on sait de quoi sont capables Stuart Murdoch et sa bande.

    Après un Write About Love apprécié de plusieurs (j’en suis), mais qui en a laissé certains sur leur appétit, Girls in Peacetime Want to Dance, le neuvième album de Belle and Sebastian, débarque dans nos lecteurs et je dois être franc : si mes premières écoutes ont été décevantes, aujourd’hui, j’ai de plus en plus de mal à décrocher. Faut dire qu’on trouve ici les chansons les plus pop et accrocheuses depuis Mike Piazza, New York Catcher, rien de moins.

    Ceux qui ont entendu les premiers extraits et lu les premières critiques, n’ayez crainte, Belle and Sebastian n’est pas devenu un groupe d’électropop, bien au contraire, même si les quelques incursions du groupe sur le plancher de danse sont fort réussies. Les deux premières chansons (la belle Nobody’s Empire et l’entraînante Allie) sauront réconforter les vieux fans. Cependant, avouons-le, la première fois qu’on entend The Party Line, on bondit de sa chaise, on lance son veston et on saute à pieds joints dans cette mélodie irrésistible et ces rythmes plus qu’accrocheurs. De son côté, Enter Sylvia Plath semble sortie tout droit d’un album des Pet Shop Boys. Avec la voix un peu éthérée de Murdoch, ça fonctionne à merveille.

    À ma première écoute, j’avais l’impression que le groupe se cherchait, qu’il était tiraillé. Puis au fil des écoutes et de ma réflexion, je me suis rendu compte de quelque chose : c’est justement la force de Belle and Sebastian. Tous ces trucs qui s’opposent, mais qui pourtant se marient si bien ensemble. Ces Electronic Renaissance qui cotoyaient les I Don’t Love Anyone sur Tigermilk, eh ben, ça ressemble à Enter Sylvia Plath qui précède la plutôt klezmer The Everlasting Muse. Sur cet album, Sarah Martin donne la réplique à Murdoch comme elle ne l’a jamais fait auparavant, trouvant même une chaleur et une sensibilité qu’on ne lui connaissait pas sur Play for Today.

    Girls in Peacetime Want to Dance est un de ces albums qui ne s’apprivoise pas très facilement. On peut être déçu sur le coup, frustré de ne pas tout piger. Mais avec un peu de patience, on finit même par apprécier les moments qui nous semblaient monotones à la première écoute.

    Ce n’est pas le meilleur album du groupe, loin s’en faut, mais ne vous inquiétez pas, nos amis sont loin d’être en panne.

    Jacques Boivin

    22 janvier 2015
    Albums
    78/100, Belle and Sebastian, Girls in Peacetime Want to Dance
  • [ALBUM] Dan Mangan + Blacksmith – « Club Meds »

    [ALBUM] Dan Mangan + Blacksmith – « Club Meds »
    Dan Mangan + Blacksmith - Club Meds (2015)
    Dan Mangan + Blacksmith
    Club Meds (Arts & Crafts)

    Les extraits lancés cet automne ne laissaient aucun doute. Les fans de la première heure de Dan Mangan seraient brassés dès les premières notes d’Offred, qui ouvre lentement l’album.

    Avec Club Meds, l’auteur-compositeur-interprète laisse tomber la pop riche et complexe, proche de la pop de chambre, comme on pouvait l’entendre sur des classiques comme Robots. De Robots il n’y a point ici. Mangan a même déplacé le centre d’attention : alors qu’on s’attardait beaucoup à ce qu’il chante, nous voilà solidement concentrés sur la musique, principale force de cet album puissant qui ratisse large. Un peu dommage, quand on y pense, car Mangan en a vu des choses pendant son congé de paternité!

    Ça donne des Mouthpiece, une chanson folk sombre, mais diablement rythmée, atmosphérique à souhait, mais menée par des guitares bien ancrées au sol. “Those who pretend to believe hardest might actually begin to / The nature of the bliss the warmth of ignorance gives in to”, qu’il dit, le gars. Ça donne des Kitsch, où Mangan se sert de sa voix davantage comme un instrument que pour réciter des paroles, pendant qu’à l’arrière, Blacksmith joue un espèce de post-rock que les gars de Radiohead ne renieraient pas.

    Il faut attendre la sixième chanson, XVI, pour retrouver un peu du Mangan qu’on connaissait si bien. Une chanson sur Louis et Marie-Antoinette qui regardent Occupy Wall Street se dérouler sous leurs yeux C’est une fort jolie chanson, qui précède une War Spoils divinement léthargique.

    New Skies termine l’album comme un rêve qui prend de la force et de l’ampleur dans une explosion finale de cuivres et de guitares. Imparfaite, mais bien sentie.

    En somme, Club Meds nous amène un Dan Mangan transformé, qui sentait le besoin de changer pour garder sa pertinence. On a beaucoup hâte d’entendre le tout sur scène, le 20 février à l’Impérial de Québec (info).

    Jacques Boivin

    14 janvier 2015
    Albums
    80/100, Arts&Crafts, Blacksmith, Club Meds, Dan Mangan
  • [ALBUM] Fire/Works – « Shenanigans »

    [ALBUM] Fire/Works – « Shenanigans »

    Y’a pas à dire, c’est une belle année pour le folk d’ici, toutes langues confondues. Pourquoi cette remarque? Parce que mes oreilles ne se lassent pas de Shenanigans, du duo montréalais Fire/Works. Le duo composé de David Lagacé et Jonathan Peters propose un album qui embrasse tout en douceur l’automne et ses couleurs flamboyantes. Un brin mélancolique sans tomber dans le mélo, Shenanigans est parfait pour se laisser traîner les pieds dans les tas de feuilles mortes du voisinage.

    Même s’ils ont eu de l’aide de plusieurs amis, Lagacé et Peters ont touché à à peu près tout sur cet album réalisé avec l’aide de Jean-Bruno Pinard (qui s’est également occupé de la prise de son). Ils ne peuvent donc pas le renier. Tant mieux, parce que malgré ses tendances très référentielles (on entend du Patrick Watson par ici, du Groenland par là, y’a du Plants & Animals dans certains racoins, on a même un petit arrière-goût de Coldplay à ses débuts à certains endroits), Shenanigans est un album qui risque de passer un petit bout de temps dans votre lecteur CD. Lagacé et Peters n’ont pas voulu réinventer la roue ou faire dans le chic sophistiqué, ils se sont contentés d’écrire les meilleures chansons qu’ils étaient capables d’écrire. Et ils sont capables d’en écrire des maudites bonnes.

    Des pièces qui se démarquent? J’aime beaucoup Elephants, parfait amalgame de tout ce qui marche sur Shenanigans. Une chanson aussi riche, texturée, colorée que le reste de l’album.

    Voilà un album dont vous devriez encore entendre parler à la fin de l’année. Je vous laisse avec une autre excellente chanson, Underneath Your Skin, qui ouvre l’album. (Coyote Records)

    Jacques Boivin

    8 octobre 2014
    Albums
    8/10, Fire/Works, Shenanigans
  • Critique : Secret Sun – « Cold Coast »

    Critique : Secret Sun – « Cold Coast »
    Secret Sun Cold Coast (Bonsound)
    Secret Sun
    Cold Coast (Bonsound)

    J’ai découvert Secret Sun lorsque le duo est venu jouer en première partie de Monogrenade en mars dernier. À l’époque, j’avais comparé leur électropop vaporeuse à celle des xx ou de Beach House. J’avais bien aimé.

    Réalisé par François Lafontaine et Sébastien Blais-Montpetit, le premer album complet du duo composé de Simon Landry et Anne-Marie Campbell, intitulé Cold Coast, a été lancé cette semaine sur étiquette Bonsound. Pas de surprise, il s’agit, en règle générale, d’électropop atmosphérique où les synthés et les programmations de batterie se mêlent aux guitares de Landry et à la douce voix Campbell.

    Certaines pièces, comme Can’t You See, plongent carrément dans le soft-rock et on imagine très bien cette pièce sur une cassette audio 90 minutes enregistrée dans les années 1980, quelque part aux côtés de pièces d’Alan Parsons. D’autres, comme la très mécanique Don’t Behave, sont tellement riches en textures qu’il faut plus d’une écoute pour les apprécier. À moins qu’on se contente de danser dessus sans réfléchir plus loin… Oui, oui, ça se fait très bien!

    Qu’ils soient soient pop, trip-hop ou un peu plus rock, les univers visités dans cet album forment un tout cohérent que l’auditeur visite avec plaisir. À écouter avec un drink en 5 à 7 ou dans son pyjama, devant un bon feu.

    Très belle carte de visite. On retourne les voir au Cercle en décembre prochain.

    [usr = 7]

    Jacques Boivin

    1 octobre 2014
    Albums
    7/10, Cold Coast, Secret Sun
  • Critique : Fanny Bloom – « Pan »

    Critique : Fanny Bloom – « Pan »
    Fanny Bloom Pan (Grosse boîte)
    Fanny Bloom
    Pan (Grosse boîte)

    On avait déjà une bonne idée de la sensibilité pop de Fanny Bloom après l’avoir entendue au sein de La patère rose et écouté son premier album solo, Apprentie-guerrière.

    Sur Pan, Bloom se jette dans le vide, mais elle n’a pas oublié son parachute. Il s’agit là d’un album pop bien de son temps, où les airs rythmés côtoient les jolies balades. Pour une irrésistible Piscine (l’hymne de l’été de plusieurs), on retrouve une magnifique Mélodie. Si Danse nous plonge dans la dance pop des années 1980, sur Il faudra, les synthés sont résolument de notre époque.

    C’est un peu comme si Bloom avait décidé de jouer avec tous les sens de Pan, faire appel à tous ses… pans (OK, j’arrête!).

    Du côté des textes, Fanny Bloom a une jolie plume pour le genre, oui, ça parle d’amour, de relations interpersonnelles, de l’essoufflement de sentiments, de narcissisme, des sujets simples du quotidien. Cependant, mais les textes se tiennent très bien, Bloom ne cherche pas la rime facile et sa jolie voix récite si bien ces mots qu’on écoute attentivement. Tant mieux si les images nous viennent immédiatement à l’esprit. La poésie, c’est pas toujours l’art de l’incompréhensible.

    Sur le plan musical, comme je le disais plus tôt, on passe par pas mal toutes les couleurs de la palette pop, mais sur Pan, mademoiselle a un faible pour les années 1980. Le quadragénaire en moi, qui a vécu les années 80 en même temps que ses premières poussées d’acné, ne lui en tiendra pas trop rigueur, car elle est allée chercher les meilleurs éléments (la flûte de pan, sérieux!) tout en évitant les pièges grotesques du genre. De plus, on peut compter sur la présence des Misteur Valaire (dont certains membres ont également été membres de La patère rose… je ne sais pas pourquoi je vous dis ça, vous le savez sûrement) sur deux chansons (Deadbird et Il faudra). Et Étienne Dupuis-Cloutier, qui était derrière la console sur Apprentie guerrière, est de retour comme coréalisateur et complice. En passant, la réalisation est impeccable.

    Somme toute, comme deuxième effort solo, Pan est un album solide qui devrait permettre à Fanny Bloom de mieux se faire connaître dans le merveilleux monde de la pop. Il y a sûrement une place pour de la pop intelligente, mais contagieuse, sur nos radios et dans nos médias électroniques. Et Fanny Bloom est la personne parfaite pour occuper cette place.

    [usr 8]

    Jacques Boivin

    23 septembre 2014
    Albums
    8/10, Fanny Bloom, Pan
  • Critique : Salomé Leclerc – « 27 fois l’aurore »

    Critique : Salomé Leclerc – « 27 fois l’aurore »
    Salomé Leclerc 27 fois l'aurore (Audiogram)
    Salomé Leclerc
    27 fois l’aurore (Audiogram)

    Oh, que je l’attendais, celui-là. Je l’attendais à peu près autant que j’attendais le dernier St. Vincent ce printemps, ou Metals, de Feist, il y a quelques années. Salomé Leclerc m’avait lentement séduit avec Sous les arbres, un album qui ne m’avait pas particulièrement impressionné à la première écoute, mais qui est devenu un de mes albums préférés de 2011. Salomé avait déjà réussi, en un album tout en douceur, à laisser sa marque en se bâtissant un son bien à elle, un univers qu’on reconnaîtrait dès les premières notes de ses chansons. On sentait déjà le besoin d’expérimenter, de promener ce son dans d’autres univers que le folk, qu’elle maîtrisait déjà fort bien.

    Ça tombe bien, 27 fois l’aurore, qui paraît mardi prochain (le 23 septembre), nous promène dans ces autres grands espaces tout en demeurant fidèle à cette sonorité si distinctive, qui nous permet de retrouver sans difficulté Salomé, qu’elle soit seule derrière sa guitare (et la batterie) ou entourée de boucles et de batteries électroniques, gracieuseté du coréalisateur Philippe Brault.

    En ouverture, Arlon permet cette transition en douceur, car la guitare lourde et la voix rauque de la jeune auteure-compositrice-interprète dominent. Comme toujours, Leclerc propose des textes soignés. Cependant, on remarque la présence de synthétiseurs, qui ajoutent des couleurs à une palette déjà riche.

    En dedans est un peu plus enjouée musicalement, les guitares se mélangent parfaitement aux choeurs et au rythme particulier de la batterie. Puis, au milieu de la chanson, les fioritures électro viennent se joindre à la fête, et elles sont bientôt rejointes par des cuivres (Benoit Rocheleau au trombone et au cornet). Tout s’assemble si parfaitement, si naturellement, après deux pièces, on nage déjà en plein bonheur.

    On reconnaît déjà là le travail de pro de Philippe Brault (qui est résolument en FEU ces temps-ci), qui aura su aider la talentueuse artiste dans ses expérimentations. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : Leclerc aurait pu se contenter de présenter ses chansons comme elle l’avait fait sur Sous les arbres, et ça aurait probablement donné d’excellents résultats. Mais avec Brault derrière les pitons, elle a pu choisir un enrobage complètement différent pour la magnifique L’icône du naufrage, où les guitares laissent la place aux synthés et aux ordinateurs, tout en restant parfaitement elle-même.

    Sur Un bout de fil, malgré le bruit de plus en plus envahissant, l’auditeur reste accroché aux touches du piano et boit les paroles de Leclerc, qui semble toute nue derrière ce voile. Le coeur bat très fort après cette chanson toute en douceur, mais très, très intense sur le plan des émotions. Y’a beaucoup d’écoutes de James Blake derrière!

    Le batteur José Major se joint à Leclerc et à Brault sur quelques chansons, dont l’entraînante Le bon moment, qui devrait plaire aux fans de la première heure qui auront peur de foncer tête baissée dans le reste du projet. Si j’avais à trouver une seule faiblesse à l’album, ce serait cette pièce, qui a un petit rythme à la Cochez oui, cochez non… pas qu’elle soit mauvaise, mais tout ce rythme entre deux superbes chansons très douces est étrange. Elle aurait peut-être été plus à sa place avec Arlon et En dedans.

    Vers le sud est comme un rêve, un voyage dans un univers feutré, qui nous ramène là où nous étions sur Un bout de fil. Mélange parfait de guitare et de claviers.

    Quant à Les chemins de l’ombre, éthérée elle aussi, un brin irréelle itou, ce mélange d’acoustique, d’électronique et de rythmique fonctionne parfaitement. L’esprit de James Blake se trouve encore bien ancré ici, mais cette fois-ci, il n’est pas seul. On sent quelques pincées de Thom Yorke çà et là dans la chanson.

    Parlant de Thom Yorke, la ligne de basse, la batterie, la guitare et la quincaillerie d’Attendre la fin font énormément penser à du Radiohead. Du BON Radiohead. Du NOUVEAU Radiohead. On s’imagine sans peine un Yorke dansant frénétiquement sur les parties rythmées de la chanson pour reprendre son souffle quelques instants avant de rentrer en transe. Le texte est d’une grande simplicité, mais ça ne l’empêche pas d’être d’une grande beauté. Vos oreilles auront un orgasme de quatre minutes.

    Salomé Leclerc ne se gênera pas pour nous donner le motton une autre fois sur Et si cette fois était la bonne, où la voix de Leclerc est féérique comme dans un rêve, comme un espoir qui finit par se noyer dans les cuivres de Rocheleau, que j’ai trouvés d’une tristesse inouie. Non, cette fois n’est toujours pas la bonne, nous dit Salomé. Et ça fait mal. En silence. Autre moment parfait.

    Sur Devant les canons, on appréciera cette phrase magnifique : « La poésie n’est pas dans la leçon / Mon assise, debout devant les canons ». Si les guitares de Leclerc, les cuivres de Rocheleau, la basse et les claviers de Brault et la batterie de Major ne vous ont pas encore donné la chair de poule, attendez que Salomé se mette au refrain. Magistral.

    L’album se termine avec J’espère aussi que tu y seras, une autre chanson qui semble inspirée de James Blake. C’est encore sombre, mais elle permet de décanter après l’intensité des trois chansons qui ont précédé.

    Salomé Leclerc aurait pu la jouer facile et éviter en deux pirouettes tous les pièges du deuxième album. Elle aurait pu nous offrir un autre Sous les arbres et nous l’aurions acclamée. Elle a plutôt choisi de foncer tête baissée dans un projet difficile, plein d’embûches, mais dans lequel elle n’avait pas de limites. Elle aurait pu se planter royalement. Au contraire, elle relève le défi avec brio et gagne son pari. Mon seul (tout petit) reproche, c’est le drôle de placement d’une des chansons, chose que je peux moi-même corriger avec une liste de lecture. Mais à mon avis, ça serait manquer de respect à cette oeuvre magnifique, tant sur le plan musical que textuel. Malgré son univers très sombre, très automnal, 27 fois l’aurore de Salomé Leclerc est à ce jour l’album le plus intéressant que j’ai écouté cette année.

    Incontournable.

    [vimeo http://vimeo.com/103143200]

    [usr 9]

    Jacques Boivin

    19 septembre 2014
    Albums
    27 fois l’aurore, 9/10, Salomé Leclerc
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